AFTERWARDS
Compositeur : Alexandre Desplat
Durée : 53:21 | 18 pistes
CD : Naïve
Rating:
Alors que Largo Winch poursuit sa carrière en salles, le nom d’Alexandre Desplat s’inscrit à nouveau sur les écrans français, cette fois au générique du nouveau film de Gilles Bourdos. Si on a pu quitter 2008 un brin déçu par la solide mais froide partition pour le blockbuster creux de Jérôme Salle, c’est avec beaucoup plus d’attention qu’on attendait de savoir de quelle manière le compositeur allait prolonger sa collaboration avec le réalisateur pour lequel il a signé cinq ans auparavant la passionnante et intrigante musique d’Inquiétudes.
«Nous discutons de ce projet depuis déjà trois ans» indique le compositeur. «(Gilles) me parle de l’immatérialité, de la lumière et de ses jeux, de la blancheur, la transparence, des reflets. Il ne voulait à aucun prix une musique de film de genre ou une musique paranormale qui fait peur. Il voulait se décaler de tout cela. Avec un code plus poétique, plus abstrait.»
Fort de cette recommandation, le compositeur choisit avant tout d’effleurer le plus simplement possible le mysticisme et le surnaturel du récit : du bout de son orchestre, il joue ainsi lui-même avec la transparence des timbres (de son propre aveu, les voix des acteurs ont été comme souvent un facteur essentiel) et la luminosité des aigus, en particulier ceux du piano, de la harpe et des violons. Ensuite, afin de ne pas sombrer trop facilement dans un pathos excessif, il évite soigneusement d’aborder de front les composantes du drame (la perte d’un enfant, le coma, la maladie, la mort) pour finalement n’en esquisser que les contours en multipliant les fragments mélodiques, comme autant d’impressions plus ou moins fugitives qui peuvent aller et venir à l’envi.
«Pour le cinéma de Gilles, il faut de longues plages musicales, des bouffées qui apparaissent et disparaissent, des fulgurances ou des accélérations et garder cette espèce de rivière souterraine qui avance (…). Pour respecter le cahier des charges, il fallait tenir sur la longueur, toujours dégager la poésie et le mystère des séquences, le drame, le souvenir de l’enfance, le chagrin et la perte. Le mouvement rythmique fait croire à une musique d’action alors qu’on joue surtout avec toutes ces émotions.»
Car Gilles Bourdos, comme à l’époque d’Inquiétudes dont on retrouve ici certains codes, a une fois de plus donné au compositeur les moyens d’imprimer son propre rythme au film. Pouvoir toujours fascinant de la musique sur l’image, il suffit d’une simple boucle de harpe pour étirer un plan, de quelques notes de piano pour suspendre l’instant présent alors qu’une pulsation électronique presque organique peut brusquement l’accélérer en une urgence qui témoigne instantanément de la confusion des sentiments. C’est alors précisément que le compositeur laisse parfois entendre des salves de cuivres saisissants, des crescendos et decrescendos qui prennent aux tripes, nouent l’estomac en charriant une violence contenue où se mêlent la peur, la colère, le ressentiment et la culpabilité.
Enfin, lorsque survient la délicieuse mélodie toute en simplicité du thème principal, celui du bonheur, de la douceur, de la beauté de la vie (The Wonder Of Life, tel est le titre qui s’y associe sur le disque), elle apparaît comme un cadeau inestimable dont on finit par sentir qu’il sera éphémère et qu’on se doit de goûter pleinement avant qu’il ne s’échappe. Desplat a ainsi tout au long de sa partition fait sien l’argument qui gouverne la réalisation toute entière et que livre l’un des protagonistes du film, tout comme le réalisateur : «La merveille est dans l’instant et on s’en aperçoit toujours trop tard.»
«La nécessité de trouver un univers poétique qui ne soit ni illustratif ni pléonastique, m’a beaucoup inspiré.» confie le compositeur. «J’ai mis relativement peu de temps à écrire cette musique. Lorsqu’on s’entend bien avec un metteur en scène, il y a un échange, une générosité qui permettent d’aller vite. Un metteur en scène obtient le maximum de ses acteurs et de ses autres collaborateurs en s’impliquant avec cœur. Dans cette situation, je trouve assez vite.» Au-delà des réserves que peuvent susciter par ailleurs le traitement et la mise en scène de Gilles Bourdos, nul doute que son compositeur a pour sa part parfaitement saisi, et avec une infinie délicatesse, l’essence même du sujet. Sa partition pour Et Après est une très grande réussite.
01. The Wonder Of Life (02:55)
02. Crossroad (04:56)
03. River Flows (02:58)
04. N.D.E. (04:23)
05. Vision (02:03)
06. Dandelions (02:14)
07. Alexander C. (01:23)
08. New Mexico (03:17)
09. Last Exit To Albuquerque (02:13)
10. White Sands (01:17)
11. Kind Of Red (05:14)
12. The Messenger (04:48)
13. Tell Me When (02:07)
14. Here & Now (01:18)
15. The Night Blooming Cereus (02:58)
16. Angel Reflections (03:10)
17. The Swan’s Song (02:20)
18. Lost (02:53)
FICHE TECHNIQUE
Direction d’orchestre : Alexandre Desplat