Brian Tyler : de l’ombre à la lumière
Interviews • Publié le 29/01/2009 par

Au printemps 2003, pas moins de trois albums du jeune – et alors relativement inconnu – Brian Tyler étaient édités par Varèse Sarabande en l’espace de quelques semaines : le virtuose The Hunted (Traqué), l’épatant Darkness Fall (Nuits de Terreur) et le colossal Children Of Dune (Les Enfants de Dune). Cette situation assez peu commune fut à l’origine d’un long entretien avec celui qui allait devenir une figure de proue du scoring hollywoodien.

 

Non content de remplacer Jerry Goldsmith sur Timeline (Prisonnier du Temps), Tyler deviendra également l’héritier de la franchise Rambo en 2008. Il aura entre-temps été associé à Alien Vs. Predator : Requiem, autre franchise initiée par Goldsmith. Sans comparer les deux compositeur, on peut reconnaître à Brian Tyler certaines des qualités de son aîné : l’éclectisme de ses choix et le fait qu’il a parfois embelli de sa musique des films franchement médiocres…

 

Fort des succès récents de Eagle Eye (L’Oeil du Mal) et Bangkok Dangerous, le compositeur a un planning déjà chargé pour 2009 avec l’adaptation live de Dragon Ball et le quatrième volet de The Fast And The Furious. Et le 17 février prochain déboulera dans les bacs son score pour The Lazarus Project, édité par… Varèse Sarabande.

 

 

Pouvez-vous nous décrire votre parcours jusqu’au métier de compositeur pour le cinéma ?

J’ai commencé par apprendre à jouer du piano alors que j’étais enfant, puis de la batterie, de la guitare… Plus tard, j’ai joué dans des orchestres pendant plusieurs années. Alors que j’avais quelque chose comme quatorze ans, j’ai commencé à faire des tournées en tant que pianiste, notamment en France, au Royaume-Uni et en Russie. Ensuite, j’ai poursuivi mes études à Moscou et, de retour aux Etats-Unis, je suis allé à l’UCLA (University Of California, Los Angeles) et à Harvard, tout en continuant à jouer dans des formations et à composer, en commençant par des concertos et d’autres types d’œuvres, alors que je sortais de l’adolescence. Après l’université, j’ai sérieusement commencé à composer, d’abord des chansons dans le cadre d’un contrat avec Sony Music. L’une de ces chansons a été utilisée dans le générique de fin d’un film. Lorsque le réalisateur a demandé s’il pouvait utiliser ma chanson, j’ai trouvé ça formidable et je lui ai demandé si je pouvais également écrire la musique du film ! Il a dit non (rires). Mais je l’ai quand même fait, le réalisateur l’a entendue et il a changé d’avis (rires). C’était un film à tout petit budget, une production indépendante. Le responsable de la musique de la direction de la Twentieth Century Fox a entendu cette musique sur CD et l’a tellement aimée que j’y ai gagné un engagement pour mettre en musique un autre film. De là, j’ai été mis en rapport avec l’agence Gorfaine & Schwartz. Tout s’est éclairci, j’avais alors quatre ou cinq partitions à composer. C’est ainsi que tout a démarré.

 

Votre famille n’est pas étrangère à l’univers hollywoodien ?

Non. Mon grand-père, Walter Tyler, était décorateur et directeur artistique. Il a notamment œuvré sur The Ten Commandments (Les Dix Commandements). Il a été nommé dix fois aux Oscars, a remporté une statuette. En fait, j’ai ici dans mon studio son Oscar. Il a travaillé sur Samson & Dalila, Sabrina… Soixante-quinze films en tout. Il m’a raconté tellement d’histoires sur Hollywood. Aucun autre membre de ma famille n’était lié de près ou de loin à Hollywood. Il était le seul. De même qu’aujourd’hui, je suis le seul membre de ma famille à travailler dans l’univers de la musique.

 

 

On vous a découvert avec The Fourth Floor (Le Quatrième Etage). Que pouvez-vous nous dire de cette composition ?

Cette partition incluait de nombreux instruments intéressants, tout en étant assez classique. J’ai eu recours au duduk, au violoncelle, au piano, à des voix que j’ai intégrés à un orchestre restreint, un orchestre de chambre. Mais j’ai aussi fait appel à des éléments inattendus comme des morceaux de métal, des marteaux, des verres et des trucs bizarres en guise de percussions. Tous ces éléments mis ensemble ont abouti à la partition que vous connaissez. Ce fut une expérience vraiment intéressante. J’ai été particulièrement attentif au jeu entre le violoncelle et le piano. En ce qui concerne le duduk, je le trouve très similaire à la voix humaine. C’est un instrument très expressif, très vibrato, très naturel. J’ai souhaité établir un lien entre cette «voix féminine» et le personnage interprété par Juliette Lewis. Concernant le côté obscur de l’histoire, je voulais que ce soit la même chose et j’ai donc eu recours aux voix. J’ai ensuite alterné les deux, duduk-voix-duduk. C’est comme un dialogue entre les deux instruments. Au fur et à mesure que le film se déroulait, je voulais que les spectateurs oublient qui était qui en n’indiquant pas clairement quel instrument se référait à quel thème. Je voulais m’éloigner du schéma classique à la Tchaikovsky et être plus déroutant. C’est pourquoi le duduk a une place à part au sein de l’orchestre de chambre.

 

 

Olivier Soude
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