L’Âge d’Or de la comédie musicale égyptienne

#2 : Les chanteuses à la voix d'or

Dossiers • Publié le 09/07/2018 par

NOUR EL HOUDA : la Voix d’Or (1924-1998)


Nour el Houda, surnommée « la Voix d’Or », enregistre beaucoup de disques et tourne avec les plus grands acteurs et réalisateurs du moment. Elle a une réputation exemplaire, passe pour un modèle de vertu, refusant même d’embrasser ses partenaires à l’écran ou de mettre des tenues sexy. Elle voudrait, de son propre aveu, mourir vierge, comme elle est née.

Extrait du beau livre « Ô Nuit, Ô mes Yeux », écrit et illustré par Lamia Ziadé.

 

Tout en enregistrant un grand nombre de 78 tours, cette superbe libanaise a joué à l’écran au coté des plus grands artistes du moment. Impressionné par la voix d’or de la jeune artiste, l’acteur-metteur en scène renommé Youssef Wahbi, lui propose de tenir le rôle d’une jeune chanteuse dans Gawhara, la Perle (Gawharah – 1943). Après ce succès, Nour partage la vedette avec Mohamed Abdelwahab dans Je ne suis pas un Ange (Lastou Malakan – 1946) et surtout Farid al Atrache dans Ne le dis à Personne (Ma Toulch Lihadd – 1951), qui comprend le facétieux Kamar el Zaman. Elle va tourner également plusieurs films avec le chanteur-compositeur Mohamed Fawzi.

 

Nour el Houda et Mohamed Fawzi dans Embrasse-moi Père (1947) d’Ahmed Badrakhan

 

Mais c’est surtout dans le registre psychologique tourmenté et le répertoire musical dramatique que le talent de Nour el Houda resplendit, en se hissant par instant au même niveau d’expressivité vocale que la grande prêtresse de la chanson arabe, Oum Kalthoum. On retiendra en particulier le film criminel psychologique Vie Inquiète (Hayat Heira – 1948), de et avec Ahmed Salem qui contient de belles chansons lyriques pour flûte naï et ensemble de cordes.

 

Autre film intéressant du même réalisateur, L’Avenir Inconnu (Al Moustaqbal al Maghoul 1948), qui bénéficie d’une lumière soignée du chef opérateur Ahmed Khourchid. Les musiques sont de Riad al Sombati, Mohamed Abdelwahab, Mohamed el Kassabgi et Mohamed Fawzi. Dans ce mélodrame très marqué par l’esthétique du cinéma hollywoodien, on relèvera la terrible séquence où l’homme que chérit secrètement Nour el Houda lui annonce son intention de se marier avec la belle Madiha Yousri. Abattue, devant sa fenêtre, où se reflète une mer déchaînée, elle se met alors à interpréter une complainte déchirante. Les choses finiront heureusement par s’arranger lorsque Madiha finira défigurée et amnésique.

 

Nour el Houda dans L’Avenir Inconnu (1948) d’Ahmed Salem

 

Le peu connu Narguis (Nargis – 1948), réalisé par Abdel Fatah Hassan, mérite lui aussi l’attention, car il contient des chansons inspirées de Mohamed el Kahlawi et Zakaria Ahmed. Dans cette romance contrariée, on retient en particulier le duo musical entre Nour el Houda et Mohamed Fawzi sur la chanson légère Ya Allah ya Nanni, ainsi qu’un magnifique chant de lamentation interprétée divinement par la chanteuse lors d’une séquence nocturne.

 

Peu désireuse de faire une longue carrière au cinéma, Nour el Houda quitte l’Égypte en 1953 pour son Liban natal où elle chantera encore à la télévision jusque dans les années 60 avant de disparaître de la vie publique.

 

Julien Mazaudier
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