Bruno Coulais : l’élégance en concert

Programme chambriste à la Cinémathèque Française

Évènements • Publié le 10/05/2011 par

C’est une Cinémathèque Française fièrement parée aux couleurs de la grande exposition Stanley Kubrick qui, en ce mercredi 4 mai 2011, a accueilli le concert d’ouverture de la rétrospective que l’établissement consacre pendant deux semaines à la carrière de Bruno Coulais. Si bien des passionnés, franciliens pour la plupart bien sûr, ont fait le déplacement et rallié le quartier de Bercy pour l’occasion, on remarque bien vite parmi le public qui se presse doucement dans la salle Henri Langlois quelques invités de marque. Citons parmi eux, entre autres, les compositeurs Jean-Claude Petit et Jean-Michel Bernard, la comédienne Arielle Dombasle, les réalisateurs Jacques Perrin, Jean-Paul Salomé et Volker Schlöndorff, mais aussi Colette Delerue et l’ubiquiste Stéphane Lerouge. Une assemblée attentive et disciplinée que s’empresseront de remercier chaleureusement les responsables de l’événement. Pendant ce temps, sur scène, un ensemble réduit (quatuor à cordes, cor anglais, piano et quelques percussions) auquel viendront au besoin s’adjoindre quelques solistes (tous des habitués de l’œuvre de Coulais) s’installe bientôt pour entamer le programme musical de la soirée.

 

Pour être honnête, ce n’est pas sans une certaine circonspection qu’on attendait de savoir jusqu’à quel point quelques-unes des partitions retenues, pour tout dire celles qui doivent le plus à une certaine diversité de timbres, allaient passer l’épreuve de l’arrangement chambriste. De ce point de vue, il n’y avait finalement pas de quoi être méfiant. De Microcosmos au Peuple Migrateur en passant par Le Fils du Requin, Le Deuxième Souffle (« J’ai énormément de mal à me remettre de la mort d’Alain Corneau », confiera alors Coulais), Genesis ou Ulzhan, il y avait là largement de quoi combler l’admirateur du compositeur. Et ce, même si celui-ci avouera n’avoir pas été en mesure par manque de temps (ou, comme il se reprend lui-même amusé, « par fainéantise ») de préparer à la lettre la sélection établie à l’origine (pas d’extraits de Agathe Cléry ou de La Clé des Champs par exemple). Seul petit bémol peut-être, l’interprétation de certains segments à l’écriture plus radicalement contemporaine aurait mérité de la part d’un quatuor parfois un tantinet brouillon un peu plus de précision. Un détail…

 

 

Contrairement à ce qu’avait laissé supposer une première annonce incomplète, l’instrument de prédilection du compositeur était quant à lui bel et bien de la partie sur certains arrangements. Comme on peut s’en douter, la voix aura ainsi occasionné les plus beaux moments de la soirée. Celle, posée, de Marie Kobayashi, qui aura la charge de mener les thèmes principaux de Microcosmos et de Coraline ainsi que de transmettre l’esprit des chants corses de Don Juan, mais aussi celle, pleine de caractère, de Gabriel Yacoub, qui fera vibrer la salle à plusieurs reprises avec Le Peuple Migrateur et surtout le très beau chant plein d’embruns tirés de Océans. Autre soliste remarquable, bien connu de la scène classique, le violoniste Laurent Korcia se présentera à son tour sur scène, d’abord seul pour interpréter un segment du Stabat Mater que le compositeur avait naguère offert au festival de la Basilique de Saint-Denis, puis accompagné pour le motif central des Femmes de l’Ombre.

 

Et finalement, entre deux reprises accordées en guise de bis, c’est le compositeur et arrangeur Jean-Michel Bernard qui apportera la véritable conclusion à ce récital tout à fait réussi à bien des égards, en se laissant aller au piano à de délicieuses variations autour de la ligne mélodique de Coraline. L’instant est certes trop court, mais il est la preuve, si le besoin en était, que la musique de Bruno Coulais se prête à bien des exercices. La marque d’un grand compositeur, sans aucun doute. Laissons d’ailleurs à Jean-Michel  Bernard le soin de conclure : « Pour bien connaître la famille Coulais depuis des années », confiera-t-il, « de père en fils pour ainsi dire, je crois que le terme qui leur convient le mieux est « élégance » ». En vérité, ce fut bien là également le maître mot de cette charmante soirée…

 

Florent Groult
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