The Dead Zone (Michael Kamen)

La tragédie au futur

Disques • Publié le 03/12/2013 par

The Dead ZoneTHE DEAD ZONE (1983)
DEAD ZONE
Compositeur :
Michael Kamen
Durée : 42:52 | 16 pistes
Éditeur : Milan Music

 

4.5 out of 5 stars

Alors jusque-là indépendant et sortant de surcroît de l’échec commercial de Videodrome, c’est contraint par la Paramount et Dino De Laurentiis que David Cronenberg collabore avec Michael Kamen pour adapter le roman de Stephen King The Dead Zone. Une fois n’est pas coutume, et personne ne s’en plaindra puisqu’en l’occurrence, cela fut l’occasion pour le jeune auteur de Venom (Venin) de composer une de ses musiques les plus intéressantes, et ce dès le début de sa carrière pour le cinéma. Kamen s’est en effet démarqué du style de Shore en insufflant le romantisme qu’on lui connaît à une partition tragique et fantastique.

 

Autant dire que Kamen avait tout compris au personnage principal de ce drame macabre, un homme qui a tout perdu : «The Dead Zone était le roman de Stephen King que je préférais – j’ai trouvé le personnage de Christopher Walken tragique et mélancolique». L’aspect fantastique est exposé dès les premières secondes d’Opening Titles via les synthétiseurs vaporeux et menaçants, puis le thème principal en émerge prudemment, comme d’un cauchemar, annonçant la tragédie à venir et gardant en son sein une étrangeté qui trouve un écho persistant dans la dernière minute en suspens. Avec le seul thème principal qui ne ménage pas ses effets dans sa première présentation, le compositeur embrasse déjà tous les aspects narratifs du film.

 

Comme le télépathe David Selig dans le roman Dying Inside (L’Oreille Interne) de Robert Silverberg, Johnny Smith voit son existence bouleversée et intimement liée à son don. Entre le romantisme désespéré exprimé par les cordes dans Coma et l’envolée de Lost Love, les effets orchestraux dans Alone ou les coups d’éclat à la limite de la dissonance de 1st Vision – 2nd Sight et au début de Drawing Vision – Through The Ice, le spectateur se retrouve littéralement dans la peau de Smith, qui vit la prescience comme une malédiction et voit échouer tous les aspects de sa vie.

 

The Dead Zone est donc un score aux préoccupations émotionnelles évidentes, alors même qu’elles sont symbiotiques du récit purement fantastique : l’ambiance tendue à l’extrême de Death Of A Visionary, faite des cordes crissantes jouant carrément dans le registre horrifique pour finir sur la mélancolie du thème principal, est un préambule au drame humain, ce morceau précis réunissant les deux enjeux qui sont les moteurs de la tragédie. Une implication multiple pour deux aspects d’une même histoire que Michael Kamen dévoile avec une sincère gravité et une vive émotion : deux traits de caractère qui restent bouleversants encore trente ans plus tard.

 

Christopher Walken

Sébastien Faelens