Vous avez également participé à la mini-série Children Of Dune. Aviez-vous déjà entendu les précédentes partitions liées à l’univers de Dune ?
J’ai vu de très nombreuses fois le film de David Lynch. Je l’ai vu au cinéma lors de sa sortie et j’ai grandi avec ! Etant jeune, j’ai beaucoup écouté la partition. J’avais le 33 tours. J’ai lu les livres aussitôt que j’ai vu le film. C’est étrange mais j’ai commencé à composer de la musique pour l’univers de Dune dès 1984 ! A l’époque, je composais des musiques pour les films que j’aimais, uniquement pour mon plaisir personnel. Pas la partition en entier bien sûr, mais toujours un thème principal. Et Dune était l’un de ceux-là. Les premières notes que vous entendez sur l’album, je les ai en tête depuis des années ! Et je me souviens que je me disais, lorsque j’ai commencé à composer pour le cinéma, que si j’avais un film qui traitait du désert, je recaserais mon thème de Dune (rires) ! Alors vous pensez bien que sur Children Of Dune, je ne me suis pas privé de l’utiliser ! Bien que j’aie vu la première mini-série Dune de nombreuses fois, j’avoue que je n’ai pas fait attention à la partition de Graeme Revell. Le fait est que j’ai mis en musique Plan B, le précédent film du réalisateur Greg Yaitanes, qui a fait ensuite Children Of Dune. Et nous étions chez moi un soir alors que je travaillais sur la musique de Plan B quand la mini-série Dune est passée à a télévision. On l’a regardée et un an et demi plus tard, nous travaillions ensemble sur la suite ! C’est très gratifiant de travailler sur un projet qui tient à cœur depuis des années.
Quelles étaient les attentes de Greg Yaitanes pour la musique ?
Comme nous avions déjà travaillé ensemble par le passé, il a appris à me faire confiance. Pour Children Of Dune, il m’a simplement dit qu’il voulait être touché par la musique, qu’elle devait suivre l’histoire et il voulait un thème spécifique pour les Fremen. J’ai donc suivi ses consignes à la lettre et j’ai été plus loin en composant un thème pour chaque Maison. Dans l’ensemble, il m’a laissé faire ce que je voulais. Contrairement à ce qui se passe quand je travaille pour un film, il m’a impliqué très tôt dans la production. En fait j’étais là alors qu’il travaillait encore sur le scénario ! J’ai aussi assisté à la naissance des décors, des costumes, à la création du story-board. Alors qu’il filmait en République Tchèque, il m’envoyait des rushes du tournage. J’ai donc assisté aux premières heures de la création de Children Of Dune. Puis, de l’écriture à l’enregistrement, j’ai disposé d’un délai compris entre un mois et demi et deux mois pour composer la partition.
Etes-vous satisfait de l’interprétation de la partition par l’orchestre de Prague ?
Oui, beaucoup. Les musiciens ont été superbes. Ils sont très méthodiques et ils jouent très bien. Le processus a toutefois été long à mettre en place. L’enregistrement de certains passages a pris plus de temps que prévu. Le fait est qu’ils sont plus habitués à jouer de la musique de concert. A Los Angeles, les musiciens sont très habitués aux musiques de films et saisissent les intentions du compositeur dès la première lecture de la partition. Leur interprétation diffère de la musique de concert. Le style est également différent. Par exemple, à Prague, les violons jouaient trop vibrato. En un sens, si on peut rapprocher Los Angeles de Londres pour le style, j’associe Prague à Moscou dans le sens où on y joue parfois encore les morceaux dans l’esprit du XIXème siècle. C’est très beau, mais dans les scènes les plus sombres, j’ai dû demander aux violons d’y aller plus doucement, et ça s’est bien passé. Je suis très satisfait de leur performance.
Pouvez-vous nous parler de vos orchestrateurs, Dana Niu et Robert Elhai ?
Dana Niu travaille maintenant pour d’autres compositeurs, mais j’ai été le premier avec qui elle a collaboré. Mon précédent orchestrateur, Christopher Lennertz, est devenu compositeur, et elle orchestre aussi ses partitions maintenant. Dana aussi est compositrice, et elle est également mon assistante depuis quatre ans. J’orchestre tout sur papier dès le début mais j’aime qu’il y ait une deuxième opinion sur mes orchestrations. Dana a une maîtrise technique évidente, tandis que Robert Elhai a toujours le chic pour suggérer l’emploi d’instruments auxquels je n’aurais pas pensé. J’ai besoin que mes collaborateurs soient honnêtes et me disent où nous allons. J’ai fait la connaissance de Robert Elhai par l’intermédiaire de son travail avec Elliot Goldenthal. Robert partage mon sens de la musique. Il essaie toujours d’être rythmique et d’aller plus loin dans son approche de l’orchestre. Il est le meilleur dans la connaissance des cordes et des différents instruments de cette famille. Il s’y connaît mieux que moi. Enfin, juste un petit peu mieux (rires). J’ai fait appel à lui tout récemment pour la musique d’un double épisode de Star Trek : Enterprise où interviennent les Borg. L’épisode est excellent. Il est même relié aux événement décrits dans Star Trek : First Contact (Star Trek : Premier Contact) ! J’ai pu enregistrer la partition, très agressive, avec un orchestre imposant et un chœur. Peut-être qu’il y aura un album…
Parmi les trois heures que compte la partition de Children Of Dune, comment avez-vous choisi de garder certains morceaux pour l’album et de laisser les autres de côté ?
C’était très dur ! Et lorsque le cd a été bouclé, chaque jour pendant une semaine j’ai modifié le nombre et le choix des morceaux. Chaque jour ! Le tout dernier jour, j’ai fini par trancher parce que je devais rendre le master (rires). Ce que j’ai essayé de faire, c’est au moins d’exposer les différents thèmes de la partition. Il y a tant de thèmes et de personnages ! Je voulais également raconter l’histoire en musique. Et il y avait certains morceaux auxquels je tenais absolument, comme le Main Title et la chanson Inama Nushif.