L’Âge d’Or de la comédie musicale égyptienne

#7 : Le film de bédouins

Dossiers • Publié le 13/08/2018 par

SAMIRA TAOUFIK, la fière bédouine (1937-)


La libanaise Samira Taoufik est tout particulièrement renommée pour ses chansons interprétées en langues bédouines et jordaniennes. Issue d’une famille modeste des hautes montagnes de Syrie, cette brune pulpeuse aux yeux de braise et à la voix majestueuse a incarné à l’écran le prototype de la paysanne bédouine honnête, courageuse et très respectueuse, en interprétant des mélodies savamment modernisées, inspirées du folklore rural des campagnes arabes.

 

Elle fait ses débuts au cinéma en 1963, au coté de Kamel el Chenawi dans La Bédouine Amoureuse (Al Badawiya al Achika) de Niazi Mostafa. Les chansons de ce film, en particulier le superbe morceau traditionnel Ghannou Ya Hbab qui ouvre le générique de début sur un solo de flûte éthéré, peuvent se retrouver sur un ancien 33 tours totalement introuvable mais qui (magie du numérique !) peut facilement s’écouter sur internet.

 

L’année d’après, on retrouve la belle Samira dans le drame historique La Fille d’Antar (Bent Antar – 1964) de Niazi Mostafa, avec la fameuse Kouka. Au générique musical figurent des artistes assez obscurs comme le syrien Abdul Ghani Sheikh ou le libanais Afif Radwan, mais c’est surtout le jordanien Jamil al Aas (1928-2003), compositeur de grand talent et remarquable joueur de oud, qu’il faut mentionner. Il signe la romance Hasses Baqlbi Dakka que la chanteuse interprète au bord d’une rivière, ainsi que la chanson de L’Épée Levée, noble et majestueuse, interprétée par Samira et un chœur masculin de grande envergure.

 

Samira Taoufik

 

Auteur de nombreux titres de Samira Taoufik, c’est aussi Jamil al Aas qui signe les superbes chansons d’inspirations folkloriques de La Fille du Désert (Hasna el Baddiah – 1964) de Seif-Eddine Chawkat et surtout de La Tzigane Amoureuse (Al Ghajaria al Achika – 1974), réalisé par Rida Myassar. Des chansons magnifiées par l’interprétation passionnée de Samira dont le charme et l’entrain apportent une véritable plus-value à des films particulièrement impersonnels sur le plan de la réalisation et de l’histoire. Dans La Tzigane figure également au générique d’ouverture une excellente interprétation au buzuq arabe d’Adawar, du gitan Matar Muhammad (1939-1995). On trouve aussi le thème romantique de L’Amour est Bleu d’André Popp et même la musique d’un certain Jerry Goldsmith sur les scènes d’actions !

 

On retrouve également Samira dans plusieurs productions internationales comme Une Bédouine à Paris (Badawia fi Paris – 1964) et Une Bédouine à Rome (Badawia fi Roma – 1965) mais le charme opère moins, et les chansons, mélangées à des thèmes illustratifs plus popisants, sont moins inspirées. Le comble du ridicule est atteint sur le dernier segment de cette trilogie urbaine avec Jours à Londres (Ayam fi London – 1977) où Samira interprète une chanson arabe traditionnelle accompagnée d’un joueur de cornemuse en kilt (une cornemuse que l’on n’entend d’ailleurs même pas !)

 

Dans le film historique La Fille du Sheik (Bent el Cheikh) réalisé en 1970 par Helmi Rafla, on peut apprécier le refrain très accrocheur de la chanson folklorique jordanienne Hayalla Blayali el Kaif interprété par Samira lors de la grande scène finale dans le palais du Sheik. La svelte danseuse au sourire malicieux qui l’accompagne est la comédienne Amira, qui s’était fait remarquer dans des petites comédies légères, notamment Afrah (1968), d’Ahmed Badrakhan, où elle se dandine coquinement devant l’acteur Fouad el Zahri.

 

 

Julien Mazaudier
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