The Wolverine (Marco Beltrami)

Rififi à Tokyo pour Wolverine-san

Disques • Publié le 21/11/2025 par

THE WOLVERINE (2013)
WOLVERINE : LE COMBAT DE L’IMMORTEL
Compositeur :
Marco Beltrami
Durée : 58:22 | 22 pistes
Éditeur : Sony Classical

 

3.5 out of 5 stars

 

La chronologie et le lore ont toujours été des sujets importants dans le monde des super-héros, autant pour les comics que pour les films. C’était notamment le cas avec X-Men Origins: Wolverine, tourné juste pour révéler les origines de Wolverine. Cela l’était aussi pour X-Men: First Class (X-Men : le Commencement), qui débutait une nouvelle ère mutante de prequels. Paradoxalement, The Wolverine se situe après X-Men: The Last Stand (X-Men : l’Affrontement Final), alors que Jean Grey est morte, tuée par Logan. Pour illustrer ce héros en détresse, la Twentieth Century Fox est donc allé chercher le talentueux James Mangold, qui prend avec lui le compositeur Marco Beltrami, habitué des films d’horreurs (Scream, The Faculty) et de super-héros (Blade II, Hellboy). Paradoxalement à nouveau, Beltrami ne semble pas composer une musique répondant au genre super-héroïque.

 

Dès le début notamment, la partition ne semble pas thématique. Initialement, aucun thème ne ressort, malgré l’apparition de nombreux motifs : certains bien repérables (comme celui à l’harmonica dans A Walk In The Woods) et d’autres moins (un motif zen de romance assez peu développé dans Two Handed et Whole Step Haiku). Beltrami compose finalement comme il avait l’habitude de le faire au début des années 2000 sur des films comme Terminator 3: Rise Of The Machines (Terminator 3 : le Soulèvement des Machines) ou Blade II : une partition avant tout expérimentale, percussive, froide, mélangeant sonorités électro et orchestre et parcourue de motifs plutôt que de thèmes. Le film se passe au Japon : Beltrami invoque donc toute une panoplie d’instruments japonais qu’il détourne, en les utilisant de manières surprenantes et ne cédant jamais à la gamme pentatonique, qui est une gamme typiquement japonaise (1).

 

En découle alors des pistes d’action excellentes, très rythmiques, tendues, mélangeant cuivres vrombissants, sonorités orientales étonnantes, percussions détonantes (enclume, cloche, gong), rythmes électro, piano et cordes dramatiques déchaînées (l’incroyable diptyque Logan’s Run et Funeral Fight par exemple). Très proche de l’image, Beltrami atteint l’efficacité la plus directe en illustrant chaque coup, chaque retournement de situation et de positions de force, le tout avec une intelligence et une fluidité impressionnante. Cet exercice exigeant pêche un peu malheureusement dans le final du film. Dans une dimension plus horrifique (mêlant dissonances et instruments assourdissants) mais aussi plus classique (notamment dans l’orchestration, dominée par les cordes et les cuivres), Beltrami s’essouffle un peu et perd partiellement son audience et son style en tournant un peu à vide durant ces treize minutes réparties sur trois morceaux (The Hidden Fortress, Silver Samurai et Sword Of Vengeance).

 

L’émotion n’est toutefois pas absente, au contraire. L’album, très mélancolique, est parcouru d’un court motif à l’harmonica, présent dès le début et semblant illustrer par sa répétition et son côté évasif l’errance de Logan qui n’arrive pas à se pardonner et qui tourne donc en rond. Pour briser ce cycle vient alors le thème des souvenirs (The Offer, Two Handed), calme et reposé, très porté par les cordes et des flûtes et lié autant à son vieil ami mourant Yashida qu’à Mariko, fille de Yashida et love interest de Logan. Le thème final paraît ainsi comme une libération. On est surpris de découvrir à la fin de l’album que Beltrami a bel et bien composé un thème noble et héroïque à souhait pour Wolverine (Where To?). A ce moment-là, Logan a dépassé son traumatisme en acceptant de laisser son passé derrière lui (Yashida, initialement un bon souvenir, qu’il tue à la fin du film) et en reprenant foi dans le futur (Mariko, qui reprend finalement la société de son grand-père). En plus de conclure le développement de Logan, ce thème lie tout ce qu’on a entendu jusqu’alors. Le thème d’émotion, le motif à l’harmonica et le thème dramatique associé (Abduction, The Hidden Fortress) en découlent tous. Wolverine semble avoir fait sien tous ces évènements et, comme le thème, émerge victorieux et revigoré de ses expériences. Pendant ce temps, Beltrami nous prouve qu’il est parfaitement possible d’imposer une identité radicale pour un genre aux attentes aussi cadenassées et en même temps d’y répondre avec rigueur. Une démonstration de force certes imparfaite, mais impressionnante de maîtrise.

 

 

(1) Composer Marco Beltrami Talks The Wolverine, Snowpiercer, Carrie And More – Entretien réalisé par Cody Ferrell – Comic Book Therapy, 25 Juillet 2013.

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