Death Warrant (Gary Chang)

Tout dans les Muscles #2 : Coup Bas (du front)

Disques • Publié le 29/07/2022 par

DEATH WARRANT (1990)
COUPS POUR COUPS
Compositeur :
Gary Chang
Durée : 44:31 | 20 pistes
Éditeur : Perseverance Records

 

2.5 out of 5 stars

 

David S. Goyer, scénariste réputé à Hollywood pour avoir revu et corrigé les super-héros emblématiques de l’Amérique moderne avec la trilogie du Chevalier Noir et l’insipide mouture du Superman version Snyder, était-il prédestiné à entrer dans la case des scénaristes pour films musclés ? Nul ne pouvait encore le savoir lorsqu’en 1988, alors âgé de seulement 22 ans, il vend à la MGM son premier scénario (ultra simpliste et bas du front) qui servira de base au film Death Warrant (Coups pour Coups). Cette œuvre inoubliable, d’un haut pouvoir nihiliste des mérites du cinéma (on se demande s’il y a vraiment un réalisateur derrière), met en vedette la star montante du métrage de tatane dans la tronche, Jean-Claude Van Damme, « the muscles from Brussels », Mr. Grand Écart Facial, le derviche du coup de pied circulaire. Réalisé comme un téléfilm du samedi soir, sans aucun génie (mais ça vous l’aviez deviné), ce film pourtant dans la catégorie « savates testostéronées » et dont on pourrait attendre un étalage prolifique en scènes d’action, réussit l’improbable exploit d’être mortellement… ennuyeux ! L’expression irrémédiablement monolithique du « jeu d’acteur » de notre moule à gifles belge donne au film un relief proche de celui de son plat pays natal. En termes de rythme, là encore, cela relève de la performance olympique ! Le film fait se succéder, laborieusement, des scènes complètement inintéressantes et culmine dans un « mano à piede » où le héros (au pantalon de prisonnier moulé sur des fesses rebondies semblant monter jusqu’au torse) distribue les mandales et les piédales à sa Némésis de toujours, l’infâme Sandman, que l’on croyait pourtant, ô surprise, bel et bien mort dans la séquence introductive du film. Ce marchand de sable paraissant, à plusieurs reprises, indestructible, et qui au final sert de métaphore involontaire pour le spectateur proche du sommeil anesthésique, finira néanmoins brulé vif puis (parce que ce n’est jamais suffisant de carboniser un méchant) aura le cerveau empalé sur une tige métallique (on peut ici tirer un beau coup de chapeau à Van Damme parce qu’il fallait quand même bien viser, vu la surface de contact réduite !).

 

Alors, forcément, quand le projet de mettre en musique cet opéra de nullité échoue dans les mains du pauvre Gary Chang, il y a fort à parier qu’il se gratta la tête pour accoucher d’un score qui puisse maintenir l’attention, heu non, ça ce n’est pas possible, la tension, voulais-je écrire, et l’action. Et ma foi, vu le peu de moyens accordés, le bougre ne s’en tire pas si mal. Malgré des synthés qui tâchent (mon dieu, les cuivres sonnent de manière abominable !!!), Gary Chang a réussi, dans les moments cruciaux (d’accord, ils ne sont pas légion !), à obtenir une (vraiment) petite formation orchestrale. Mais l’essentiel du travail de Chang a été de créer des sons pour évoquer l’univers carcéral stressant en allant jusqu’à sampler l’instrument percussif inventé par John Bergamo à partir d’un fuselage de réacteur de Boing 707 ! Un motif récurrent d’action et de suspens, rappelant le son des vieux pianos électroniques de l’époque, influencé par la légendaire habileté de Jerry Goldsmith dans ce domaine, est utilisé avec parcimonie et de manière non systématique (mais vu qu’il n’y a pas pléthore de scènes de bourre-pif, ce n’est pas étonnant) pour tenter de muscler un travail de montage basique.

 

Chang, pour unique balle de match, s’est vu accorder le droit de coécrire une chanson en guise de générique de fin alors que le héros, bien entendu victorieux, emballe définitivement le faire-valoir féminin de ce film tristement faiblard. Si le compositeur fait ce qu’il peut avec ce qu’il a dans les mains et sous les yeux, il arrive tout de même à faire le boulot. Le CD n’est sans doute pas un must-have dans une cédéthèque de musique de film, mais il n’est pas non plus totalement déshonorant. Le compositeur aura d’ailleurs encore l’occasion de s’illustrer dans des séries TV assez miteuses et des films de cinéma sans grande envergure, dont le point d’orgue sera sans doute un succédané (en vérité, un spin-off surfant outrageusement sur la vague du succès) de Die Hard (Piège de Cristal) pour Steven Seagal intitulé Under Siege (Piège en Haute Mer). Gary Chang, trop souvent cantonné (ah ah) au film et série d’action et de suspense de seconde zone, n’a pas eu la chance qu’il aurait sans doute méritée.

 

Christophe Maniez
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