Alex North : une notice biographique
Portraits • Publié le 09/05/2009 par

 

De l’enfance à Chester à la trépidante et épuisante vie new-yorkaise, c’est le temps, toujours crucial pour un jeune musicien, des enseignements nécessaires, des premières rencontres et des découvertes musicales tous azimuts (le jazz, les racines russes…) qui mèneront finalement aux planches de Broadway.

 

 

 

1910


Naissance le 4 décembre à Chester, en Pennsylvanie. 1910 est l’année officiellement reconnue, mais une erreur administrative pourrait en fait l’avoir rajeuni : Isadore (Alexis ou Alex) Soifer (son vrai nom) serait en fait né le même jour, en 1909. Il est avec Jerome (Joe puis Joseph), Abraham (Abe) et Harry l’un des fils de Jesse et Baila Soifer, immigrés juifs d’origine russe ayant quitté les terres du Tsar au début du siècle.

 

 

1915


Le père, Jesse, décède brutalement d’une crise d’appendicite sur la table d’opération à l’âge de 30 ans : effrayé, le jeune Alex refuse d’assister à l’enterrement et fuira dès lors toutes funérailles familiales. La mère, Baila (Bessie), épicière jusqu’ici, achète une maison et ouvre une pension de famille à Chester.

 

 

1917


Reçoit ses premières leçons de piano de son frère Joe, puis d’un professeur de quartier.

 

 

1919


Rencontre Samuel Barber, alors lui même âgé de 9 ans et également né à Chester : les deux jeunes musiciens se lient d’amitié alors qu’ils partagent des cours de piano avec le même professeur, William Hatton Green, le plus réputé de la ville.

 

 

1922


Tout en suivant le cursus scolaire de la Chester High School (de laquelle il sortira diplômé en 1927), Alex rejoint la Henry Street Settlement Music School de Philadelphie où, pendant quatre ans, il étudie la théorie et le chant. Mais c’est vers une carrière de pianiste soliste qu’il s’oriente alors avant tout : il suit pour cela une master class de Leopold Godowsky et devient très vite l’élève personnel du pianiste George Boyle (également professeur pour Samuel Barber ainsi que pour George Antheil l’année précédente).

 

 

1924


Découvre assidûment le jazz américain au Steel Pier, une fameuse salle d’Atlantic City (aujourd’hui un parc de loisirs) où il se rend le plus souvent possible applaudir des artistes tels que Coon Sanders, Ted Weems ou Paul Whiteman. Alors qu’il multipliait jusqu’ici les petits boulots pour subvenir à ses besoins, il décide de financer ses études musicales en devenant opérateur télégraphique : après une courte formation, il est engagé à la Western Union.

 

 

1929


Après être entré au Curtis Institute de Philadelphie l’année précédente, il rejoint finalement New York et intègre la prestigieuse Julliard School of Music sous les recommandations de George Boyle qui y tient une classe : il y perfectionne sa technique pianistique et étudie la théorie musicale et la composition avec Bernard Wagenaar.

 

 

1932


Diplômé le 6 février, Alex décide néanmoins d’abandonner la perspective d’une carrière de pianiste professionnel et choisit de devenir compositeur. C’est à ce titre en tout cas qu’il rejoint bientôt la compagnie de danse tenue par Martha Graham où il rencontre une jeune danseuse moderne du nom d’Anna Sokolow : son rythme de vie est alors éreintant et se partage entre l’écriture de ses musiques, les répétitions de danse d’Anna et son travail (essentiellement de nuit) à la Western Union dont il a rejoint l’une des agences new-yorkaises.

 

 

1933


Le 29 août, création de The Anti-War Trilogy (ou Anti-War Cycle), première œuvre d’importance qui inaugure une longue collaboration professionnelle entre Anna et Alex, en même temps que le début de leur vie maritale.

 

 

1934


Important voyage en Union Soviétique au début de l’année : grand admirateur de Prokofiev, il souhaite avant tout y suivre des études musicales subventionnées mais c’est en qualité d’opérateur télégraphique qu’il a fait sa demande de travail (appuyée par son frère Joseph, membre de l’International Labor Defense, une organisation associé au Parti Communiste américain) dès la fin de l’année 1932 auprès de l’Agence Soviétique de New York. En raison de sa faible qualification, il est pourtant tout prêt d’être renvoyé aux Etats-Unis quelques semaines après son arrivée sur place lorsque le pianiste (et ami) Grisha Schneerson lui ouvre les portes du Conservatoire de Moscou : après audition, il y est admis pour étudier la composition avec Anton Weprik et Victor Bielyi. Dès le 29 juin, alors qu’Anna l’a rejoint pour quelques temps, il reçoit des commissions de l’Union des Compositeurs Soviétiques et devient ainsi le premier (et seul) compositeur américain membre de cette institution. Il devient par ailleurs le directeur musical du Théâtre d’Etat letton puis d’un groupe d’exilés allemands appelé «Kolonne Links».

 

 

1935


Si son expérience russe lui apparaît particulièrement bénéfique, la nostalgie le pousse néanmoins à rentrer aux USA en fin d’année : il se met alors à composer abondamment pour des danseurs et chorégraphes tels que Martha Graham, Hanya Holm, Agnès De Mille, Marthe Krueger, Doris Humphrey et bien entendu Anna. Il sera également appelé à enseigner régulièrement sur ce sujet pendant trois ans. 1935 est également l’année où il choisit de changer définitivement de patronyme afin de lancer sa carrière musicale : Alexis Soifer opte pour le nom de North, un pseudonyme que son frère Joseph utilise déjà depuis qu’il est devenu journaliste pour un hebdomadaire clairement orienté à gauche et qu’il a co-fondé, le New Masses de New York.

 

 

1936


Bénéficiant d’une subvention pour participer à un atelier de travail baptisé «Arts in the Theater», Alex North compose sa première partition pour une pièce de théâtre, Dog Beneath The Skin, qui ne sera finalement jamais montée. Alors que nombre de ses danses sont régulièrement présentées au Kaufman Auditorium, il signe également ses premières musiques pour des documentaires (China Strikes Back) ainsi que ses premières œuvres de musique de chambre. Il travaille par ailleurs jusqu’en 1937 avec Aaron Copland, lequel comptera plus tard North (aux côtés de Bernard Herrmann, Leonard Rosenman et Gail Kubik) parmi les compositeurs qu’il estime le plus à Hollywood).

 

 

1937


Alex et Anna voyagent beaucoup. C’est ainsi qu’ils font tous deux la connaissance de Leonard Bernstein, venu admirer la danseuse lors de l’un de ses récitals à Boston. Le 14 novembre, leur rêve commun est exaucé et ils font donc leurs grands débuts à Broadway au Guild Theater avec deux œuvres intitulées Opening Dance et Slaughter Of The Innocents (cette dernière inspirée de l’un des documentaires sur lesquels Alex vient de travailler, Heart Of Spain). Accompagnés d’Aaron Copland, ils y retrouvent Leonard Bernstein, présent à leur invitation. De cette soirée daterait l’amitié entre Copland et Bernstein.

 

 

Florent Groult
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