Ravi Shankar (1920-2012)
Portraits • Publié le 14/12/2012 par

L’annonce de sa disparition aura mis en émoi toute la communauté musicale : les hommages qui se sont instantanément bousculés dans la presse et sur les réseaux sociaux suffisent sans doute à donner la mesure de l’influence, tant artistique que spirituelle, que le musicien indien Ravi Shankar a exercé de par le monde tout au long d’une longue carrière débutée en 1938. Son histoire, c’est d’abord celle d’un artiste incroyablement talentueux, compositeur accompli et sitariste génial, qui a œuvré avec une infinie conviction pour le rayonnement de la musique de son pays. Parmi les innombrables rencontres qui ont jalonné sa vie, il en est ainsi quelques-unes qui resteront dans la légende, notamment celles qui le lia au Beatle George Harrison ou au violoniste Yehudi Menuhin au milieu des années 60.

 

A première vue, le cinéma ne tient donc qu’une place très relative dans son immense carrière. On se rappellera ainsi peut-être qu’il accompagna le court documentaire de l’anglais James Ivory The Sword And The Flute ou la fiction documentaire du suédois Arne Sucksdorff, En Djungelsaga (L’Arc et la Flûte), tous deux en 1959. Citons également Charly en 1968 pour le réalisateur Ralph Nelson ou bien entendu Gandhi en 1982, le film de Richard Attenborough qui lui rapporte même une nomination aux Oscars, partagée avec le compositeur anglais George Fenton. Mais toute succincte qu’elle soit, sa filmographie recèle en son sein un véritable joyau sous la forme d’une collaboration extraordinaire avec le réalisateur bengali Satyajit Ray, constituée de Parash Pathar (La Pierre Philosophale) en 1958 mais aussi et surtout de la fameuse et superbe Trilogie d’Apu. Lorsqu’il entreprend le travail pour le premier film, Pather Panchali (La Complainte du Sentier) en 1955, Shankar est bousculé par son emploi du temps, ne peut visionner que la moitié du film et enregistre toute sa composition en une seule séance de onze heures. A l’écran, le résultat tient du miracle : le film donne ainsi à entendre l’une des expériences musicales les plus intenses au cinéma, exemple parfait d’une partition en état de grâce qui célèbre la vie et qui, de la douleur la plus extrême à la joie la plus extatique, s’impose tel le chant intérieur des personnages mis en scène. Suivront avec un même bonheur Aparajito (L’Invaincu) et Apur Sansar (Le Monde d’Apu), respectivement en 1956 et 1959.

 

Ravi Shankar s’est éteint à Los Angeles, le 11 décembre dernier, à l’âge de 92 ans.

 

Florent Groult
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