Adaptation (Carter Burwell)

Le bonheur est une fleur qu'il faut cueillir

Disques • Publié le 16/06/2025 par

ADAPTATION (2002)
Compositeur :
Carter Burwell
Durée : 47:29 | 18 pistes
Éditeur : Astralwerks

 

 

4.5 out of 5 stars

 

Carter Burwell est un musicien qui se met souvent dans la peau de personnages seuls au monde, incompris, paniqués, fatigués, frustrés, maudits. Il observe leur vie et annonce leur tragédie avec une clarté discrète. Il dépeint le désespoir et rend compte de la fatalité avec une gravité d’autant plus évidente qu’elle est raisonnée, son registre privilégiant les voix sincères des instruments. L’on trouve ce credo dans Adaptation, réflexion filmique des créateurs de Being John Malkovich qui plonge dans les méandres du processus créatif. Entre l’absence d’épanouissement et la recherche d’une vie meilleure (voire de l’amour), le sujet central d’Adaptation tourne autour des questions posées par Charlie Kaufman et Spike Jonze sur l’écriture et de l’inspiration que cherche le scénariste paralysé par la vie, incarné par Nicolas Cage.

 

C’est ainsi que la spirale dans The Evolution Of The Screenwriter et The Evolution Of Evolution s’accélère pour plomber la réflexion et faire stagner, la menant dans l’impasse dans The Screenwriter’s Nightmare. Le thème principal dans The Writer And The Crazy White Man semble moins torturé mais il exprime le doute et les limites que l’on aimerait pouvoir dépasser, la mélodie ne faisant que tourner sur elle-même, accompagnée par une multitude d’effets synthétiques absurdes qui narguent l’esprit confus. Mais la spirale obsessionnelle finira par s’inverser car une lueur d’espoir semble apparaître après le cauchemar : il y a dans The Slough Pit Of Creation une révélation qui prendra le dessus, d’abord par le piano se manifestant avant les sursauts des guitares dissonantes, puis par les cordes qui lui indiqueront le chemin vers la lumière. Le piano jouera lui-même la spirale afin d’illustrer l’exaltation générée par l’inspiration, ainsi que le besoin de créer de nouveau. Les affres de la création entretenues par un certain mal-être : un thème doublement illustré puisque l’élément de la spirale, qui incarne et mine la réflexion, devient occasionnellement le moteur du processus. Pour trouver l’inspiration, le scénariste se cherche d’abord lui-même.

 

Puis l’émergence du thème de An Unashamed Passion laisse doucement entrevoir ce par quoi le bonheur peut arriver, un désir aussi profond que sincère qu’on n’ose pas toucher du doigt, comme une bouffée d’émotion incontrôlable mais impossible à exprimer. Approaching The Object Of Desire réunit ce thème et le thème principal comme pour dire que l’épanouissement passe par un combat avec ses propres peurs. Et c’est après la libération par le chaos dans Evasion And Escape que l’on atteint la quiétude, les cordes donnant à The Unexpressed Expressed toute sa plénitude. L’amour, jusque-là inaccessible, éclate enfin, une fois que les peurs et les limites sont vaincues. Peut-être finira-t-on par être heureux ?

 

 

Sébastien Faelens
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