La Caduta degli Dei (Maurice Jarre)

L'anti-Zhivago

Disques • Publié le 01/07/2008 par

La Caduta degli DeiLA CADUTA DEGLI DEI (1969)
LES DAMNÉS
Compositeur :
Maurice Jarre
Durée : 60:11 | 12 pistes
Éditeur : Screen Trax

 

5 out of 5 stars

« Sa réputation comme musicien de films l’entraîne à collaborer à des productions (…) de plus en plus internationales jusqu’au fameux Dr. Zhivago (…) dont la mélodie de Lara lui vaudra la gloire… et le tarissement de l’inspiration, car il n’arrivera pas à s’en débarrasser pendant des années dans les films suivants, qui en reprennent presque tous les leitmotiv, plus ou moins arrangés.» (Ecran n°39, 15 septembre 1975).

 

Explicitement nommée, la partition des Damnés apparaît en ligne de mire du constat exposé ici. S’il n’est pas sans fondement, même aujourd’hui, (l’auteur précisant à l’époque que Jarre venait tout juste «d’exorciser Zhivago»), il apparaît néanmoins sévère tant il semble présomptueux, à revoir ce Crépuscule des Dieux signé Visconti, de mésestimer l’implication et la justesse de l’approche choisie par Maurice Jarre. Voilà en effet un film pour lequel la musique (et par là même le style propre au compositeur), ne pouvait sortir indemne. Car c’est bien le nazisme qui, omniprésent, s’infiltre dans cette partition aussi sûrement qu’il transparaît à l’image, pervertissant tout et imposant sa brutalité. Si Jarre reprend donc bel et bien des fragments de ses thèmes précédents (dont le thème le Lara), c’est pour mieux en gommer le brillant, en éteindre la flamme, les rendant blafards jusqu’à n’être que l’ombre d’eux-mêmes.

 

Il ne reste alors, pour toucher à l’essence même de cette partition, qu’à sentir avec quelle manière il désincarne les valses qu’il affectionne tant pour n’en faire que les vestiges cadavériques d’un passé fastueux à jamais disparu. Et au bout du compte, la musique des Damnés pourrait fort bien apparaître au regard de la carrière de Maurice Jarre comme une sorte d’anti-Zhivago, une occasion presque unique d’entrevoir le côté obscur d’un compositeur plus volontiers enclin à mettre en lumière qu’à plonger dans les ténèbres. Morbide mais essentiel.

 

La Caduta degli Dei

Florent Groult
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