2016 : le Palmarès de la rédaction

« Fuck 2016 ! » Curieuse (et vulgaire, mais oui) manière d’entamer la rétrospective musicale d’une année déjà lointainement mise en terre, allez-vous vous empresser de me rétorquer… Et pourtant, certains d’entre vous s’en souviennent certainement, c’était bien la formule à la mode en décembre dernier, fleurissant sur tous les réseaux sociaux afin de blâmer sans appel douze mois qui ont vu s’accumuler un nombre non négligeable de disparitions plus ou moins prématurées de nombreuses personnalités issues, en particulier, du paysage musical et cinématographique : citons David Bowie, George Michael, Pierre Boulez, Nikolaus Harnoncourt, Ettore Scola, Michael Cimino, Alan Rickman, Debbie Reynolds et sa fille Carrie Fisher, éternelle Princesse Leia dans nos cœurs de geeks. Bref, la liste est bien longue…

Alors, au fond, peut-être même, depuis le temps que vous attendiez, vous imaginiez-vous que nous avions de la même manière envoyé purement et simplement balader notre traditionnel palmarès de l’année… Que nenni ! Après trois mois estampillés 2017, si nous confessons bien volontiers un beau retard, soyez certains que 2016 avait tout ce temps encore toute notre attention. Pourquoi ? Parce que, aussi mortifère fut-elle donc, il ne fait nul doute qu’elle a également eu beaucoup à offrir à nos oreilles ! Et le moment est maintenant arrivé de vous le (dé)montrer…

Vous connaissez désormais parfaitement le principe : deux montages vidéos, pour votre plus grand plaisir, espérons-le, accessibles en deux petits clics de souris, et qui célèbrent à la fois les meilleures partitions de l’année 2016 et les rééditions les plus emblématiques parmi celles sorties au cours de cette même année. Pour mémoire, l’année passée avait vu le plébiscite du Jupiter Ascending (Jupiter, le Destin de l’Univers) de Michael Giacchino et la réédition d’Obsession de Bernard Herrmann dans l’une et l’autre des catégories. En piste !

FLORENT GROULT

Rédacteur en chef adjoint

NOUVEAUTÉS 2016 : LE TOP DU TOP

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En dixième position, nous trouvons d’abord la seule musique de série télévisée du classement, la meilleure selon nous donc, logiquement : car pour Penny Dreadful, c’est bien « la sensibilité et le bagage classique de Korzeniowski » qui font merveille, nimbant « cette relecture passionnée des grands mythes fantastiques d’une brume romantico-gothique qui transcende l’atmosphère et sublime la tragédie. » Rien que ça ! C’est tellement bien dit, que voulez-vous ajouter à ça ? Dario Marianelli, lui, a pris à l’évidence « un profond plaisir à incorporer des instruments folkloriques dans la masse orchestrale quand d’autres n’y voient au fond que de simples artifices » : il offre donc à Kubo And The Two Strings (Kubo et l’Armure Magique) un « petit bonheur à déguster sans modération », « rempli d’enthousiasme » et où l’écriture « est délicate et laisse libre cours à l’émotion. » Et de conclure que « décidément, après les Boxtrolls, l’animation lui réussit » : c’est pourtant vrai, et c’est la neuvième place pour lui. Christopher Young se hisse en huitième position avec sa partition pour – accrochez-vous – Xi You Ji Zhi : Sun Wukong San Da Baigu Jing, un deuxième Monkey King donc, « aussi imposant, luxuriant et passionné que le précédent », une « invitation au voyage » « explosive et colorée » qui « lui permet d’aller encore plus loin dans la fantasy épique. » Au fait, Baptiste, ton chinois, il en est où ?

Pendant ce temps, Justin Hurwitz s’impose sans doute comme la révélation de l’année : certes, le La La Land qu’il trousse pour Damien Chazelle n’a pas forcément déchaîné les passions de tous, mais il a su en convaincre suffisamment avec « des titres tour à tour tendres ou éclatants dont la sophistication n’a d’égale que la fraicheur », un ensemble qui « regorge d’énergie », « nous entraînant dans un parcours chatoyant entre score tantôt orchestral tantôt jazzy et des chansons inspirées. » A suivre donc, incontestablement. De son côté, Marco Beltrami est revenu dans nos cœurs, et en sixième position, avec son « score musclé et décomplexé » pour Gods Of Egypt, mêlant « robustesse et lyrisme orchestral avec la manière » et signant au passage « un thème principal aussi grandiose que ludique et des orchestrations luxuriantes. » Il y a pire comme come-back, en effet…

Après John Williams l’année passée, on attendait de pied ferme Alexandre Desplat dans une galaxie lointaine, très lointaine… Mais, comme vous le savez tous évidemment, c’est finalement Michael Giacchino qui aura officié en hyperespace sur Rogue One: A Star Wars Story. Le verdict ? Un compositeur « apportant sa pierre à l’édifice sans renier sa propre personnalité », ce qui, avouons-le, n’est pas la moindre des qualités d’une partition « qui transpire un profond respect et une énergie très communicative », offrant en particulier un « superbe et émouvant dernier acte », et « tout ça en quatre semaines » seulement, ma bonne dame ! Et pouf, une cinquième position bien méritée. Autre très belle surprise en quatrième place, La Tortue Rouge de Laurent Perez del Mar, pour laquelle nous n’avons, il est vrai, pas tari d’éloges : une musique « superbe et mémorable », « intime et poignante », « qui touche au cœur avec la plus grande sincérité », « charme par ses orchestrations délicates, émeut par la pureté de ses thèmes. » Qui a dit que nous n’étions pas de grands sensibles ?

Place maintenant au podium ! La troisième marche d’abord pour James Newton Howard et son Fantastic Beast And Where To Find Them (Les Animaux Fantastiques) : une musique qui « scintille et virevolte de bout en bout » où le compositeur, « pas embarrassé par l’héritage musical de la franchise Harry Potter », sait se montrer « flamboyant quand il le faut » et donne à entendre à tous une magie et un émerveillement « bluffants d’efficacité. » Comment ne pas être « séduits par tant de tact et de talent » ? Oui, comment ? A la deuxième position, nous retrouvons un compositeur espagnol « qui a toujours démontré un talent surnaturel pour aller débusquer l’émotion là où elle se cache, quelque part en nous, sans même que nous le sachions » : cette jolie tournure semble en effet décrire à la perfection un Fernando Velázquez qui, pour A Monster Calls (Quelques Minutes Après Minuit), est donc une fois encore parvenu « à instaurer cette fameuse et irrésistible proximité émotionnelle » qu’on attend particulièrement, « éclairant le récit et donnant corps à la fantasmagorie. » Pas de doute : il forme avec son complice Juan Antonio Bayona « un duo dont la synergie est parfaite. »

Enfin, pour la seconde année consécutive, c’est bien Michael Giacchino, encore lui, qui se hisse sur la première marche de notre podium, avec sa troisième contribution à une autre saga intergalactique ultra-célèbre. Car pour Star Trek Beyond (Star Trek : Sans Limites), il est tout bonnement « loin de se reposer sur ses lauriers » et nous propulse « en orbite quelque part dans l’univers » grâce à ce « sens de la narration qu’on apprécie tant chez lui. » Il continue ainsi « de se réinventer avec brio et revisite habilement sa thématique, l’enrichissant » jusqu’à nous laisser « pantelants. » Tant pis pour ses détracteurs, pour nous la chose est claire : il nous épate, il nous épate, il nous épate !

FLORENT GROULT

Rédacteur en chef adjoint

NB : toutes les citations qui sont reprises dans le commentaire ci-dessus sont extraites des notules de notre UnderScorama mensuel, que nous vous invitons à suivre régulièrement afin de découvrir en avant-première les partitions qui figureront dans notre Palmarès de l’an prochain !

INÉDITS & RÉÉDITIONS 2016 : LE TOP DU TOP

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Même si nous avons parfois eu la nette impression que nos éditeurs préférés s’employaient de plus en plus souvent à fouiller les fonds de tiroirs pour soutenir le rythme de leurs annonces, présageant peut-être par là même de la fin de cet espèce d’ « âge d’or » pléthorique des parutions discographiques dans notre petit domaine d’expertise, 2016 n’en fut pas moins largement parsemée de titres du plus haut intérêt. Parmi ceux-ci, il a bien fallu n’en retenir que la petite dizaine habituelle, entre véritables (re)découvertes et coups de cœur, rééditions longtemps attendues et parfaits inédits.

Au pied du classement, Le Cinéma de Quincy Jones piloté par l’indispensable Stéphane Lerouge s’est révélé être « un formidable concentré de savoir-faire estomaquant » qui permet « d’apprécier le génie du monsieur », dévoilant notamment « un compositeur malin, consciencieux et merveilleusement entouré » qui « maîtrise à peu près tous les genres imaginables. » En quelques mots ? Un coffret « qui a donc sa place chez tout mélomane qui se respecte. Point. » Et c’est sans appel, vous voilà prévenus ! Classée neuvième, la toute nouvelle édition de Rambo: First Blood Part II (Rambo 2 : la Mission) a permis de redécouvrir « l’un des plus énormes scores d’action martiale » de Goldsmith, une partition « foisonnante », cernant « le personnage à la perfection », peut-être même celle « qui marie le plus intimement l’électronique chère au compositeur à une masse orchestrale épique qui emporte tout sur son passage. » On vous laisse seuls juges. Autre redécouverte, de taille celle-là : The Ten Commandements (Les Dix Commandements) d’Elmer Bernstein, qui a bénéficié chez Intrada d’un traitement véritablement royal, justement récompensé ici. Il faut dire que cette « partition-fleuve oscillant avec aisance entre intimisme et spectaculaire » valait bien une attention toute particulière tant elle « résume à elle seule toute une vision hollywoodienne épique, romantique, excessive d’une époque maintenant révolue. » En découle donc aujourd’hui, près de soixante ans après sa création, une parution « définitive comme on n’osait même pas en rêver », une « édition de grand malade » même pour notre Olivier « Pazu » Galliano qui, aux dernières nouvelles, ne s’en est pas encore remis !

Chaque réédition d’une musique de James Horner, tragiquement disparu en 2015, est désormais espérée avec une certaine émotion, et c’est sans doute notre Stéphanie qui explique le mieux pourquoi : « On avait beau pester sur sa tendance lourde au recyclage, il avait l’art de composer des scores thématiques d’une richesse dingue. » Alors, lorsque un éditeur (Intrada, encore !) nous régale, on ne peut qu’acquiescer fermement comme ici avec The Rocketeer, une « merveille de mélodies et de fantaisie », « une partition d’aventure particulièrement entreprenante et juvénile » qui « se dévore comme un roman d’aventures. » Varèse Sarabande, eux, ont misé sur une autre valeur sûre et un titre attendu… que dis-je, fantasmé depuis des années : avec Starship Troopers, c’est la « dernière oeuvre majeure de Poledouris » qui se dévoile enfin en version largement rallongée, un « mélange beaucoup plus sophistiqué qu’il n’y paraît d’ironie musicale et d’énergie martiale brute », toute chose, faut-il le signaler, « qu’on chercherait en vain dans la production hollywoodienne d’aujourd’hui. » Certes, mais même si le « bonheur extatique d’écouter plus en détail ce monument » est manifeste, il n’en demeure pas moins que la production proprement dite « laisse un petit goût d’inachevé », notamment considérant que « certains choix de montage et de mixage sont un peu contestables. » Il faudra s’en contenter pour l’heure.

A la cinquième position, attention ! Il faut d’abord « aimer sentir la crasse et la peur » et se plonger « dans les abysses poisseuses et suintantes invoquées par un Shore au sommet de son art. » La musique de Se7en est en tout cas bel et bien « l’une des plus géniales réussites artistiques de sa carrière » sous la forme d’un « genre de lent crescendo inexorable porté par un magma orchestral organique qui enserre l’esprit pour ne jamais le lâcher. On l’attendait depuis longtemps, ce joyau noir, pour s’y perdre comme dans un cauchemar » : alors comme ça, cher Milio, la cave d’UnderScores ne te convient plus ? « Diamant noir » encore au pied du podium de tête : pour le Chinatown de Roman Polanski, Jerry Goldsmith signait en effet « un indispensable et inaltérable chef d’œuvre dont la concision et le pouvoir de fascination sont admirables et exemplaires. » En dépoussiérant l’album d’origine et surtout en la complétant de la toute première édition du score original, Intrada a donc bel et bien accompli « un vrai petit miracle. » Puisqu’on vous le dit !

A la troisième marche de ce palmarès, voici les dinos… heu… les deux partitions de Jurassic Park et The Lost World (Le Monde Perdu), réunies chez La-La Land dans un petit coffret qui a (peut-être) eu chez vous les honneurs du dernier sapin de Noël : d’un côté une musique « richement développée, qui provoque instantanément des frissons de plaisir », de l’autre un « score furieux » qui laisse pantois par sa « férocité et la complexité de l’écriture rythmique. » Bref, la « glue magique » entre les images de Steven Spielberg et la musique de John Williams n’en finit en tout cas plus de nous fasciner. Pas vous ? Deuxième position pour l’intégrale du Hellboy de Marco Beltrami chez Varèse Sarabande, une édition cette fois plébiscitée sans retenue, et une manière de redécouvrir dans toute sa splendeur une musique « d’une richesse incroyable », « brillante de bout en bout » et qui, en plus de nous entraîner « dans un maelström d’émotions », « donne une substance incroyable à la romance entre freaks et aux éléments les tragiques du film de Del Toro. » C’est bien simple : « Si Hellboy III se fait un jour, il FAUT que Beltrami soit de la partie. » Désolé Milio, aux dernières nouvelles, le projet est bien mort et enterré.

Enfin, sur la plus haute marche de ce podium, c’est un « ré-enregistrement sensationnel » qui s’est distingué haut la main : grâce soit rendue à Prometheus et Tadlow Music et à « l’interprétation, magique », du City of Prague Philharmonic Orchestra dirigé par Nic Raine, qui ont combiné leurs talents pour redonner « tout son éclat » au Thief Of Bagdad (Le Voleur de Bagdad) de Miklós Rózsa, un « conte musical enchanteur et superbe de bout en bout » propre à provoquer « une sorte d’émerveillement enfantin », « entre luxuriance orchestrale aux couleurs chatoyantes et exotisme naïf mais délicieux. » Un ultime conseil ? Ne passez pas à côté de cet authentique chef-d’œuvre.

Notre palmarès désormais dévoilé, il ne vous reste plus, si vous le souhaitez, qu’à découvrir une à une nos petites listes individuelles, et y déceler nos coups de cœur. Bonne lecture et à l’année prochaine !

FLORENT GROULT

Rédacteur en chef adjoint

OLIVIER DESBROSSES
Rédacteur en chef