Entretien avec Amaury Laurent Bernier

Itinéraire d'un autodidacte

Interviews • Publié le 04/06/2025 par

Amaury Laurent Bernier fait partie de ces talentueux compositeurs français dont le nom est hélas quasiment inconnu dans l’hexagone. « Nul n’est prophète en son pays » dit l’adage. Il faut dire que l’artiste, au parcours atypique et aux multiples talents, s’est installé en Allemagne, où il exerce son métier… ou peut-être, devrais-je écrire, ses métiers. En effet, en véritable autodidacte passionné de musique et de sons, il compose, écrit, joue et chante ! Et si cela ne suffisait pas à remplir son agenda déjà bien chargé, il répond également positivement aux interviews. En une décennie, Amaury Laurent Bernier a déjà œuvré sur plus de 120 projets extrêmement variés. Insatiable touche-à-tout, le compositeur est aussi animé par une réelle curiosité, tant artistique qu’humaine.

 

Parmi ses nombreux travaux pour le cinéma et la télévision, on peut citer Prinzessin Emmy (Piet De Rycker), Willi und die Wunderkröte (Markus Dietrich), Totem (Sander Burger), Elli Ungeheuer Geheim (Elli et l’Équipe de Monstres – Jesper Møller, Jens Møller et Piet De Rycke) ou encore Das Leben Vor Mir (Anna Justice) et Zwei zu Eins (La Belle Affaire – Natja Brunckhorst). Pour certains d’entre vous, ce sera donc l’occasion de ressortir leur dictionnaire allemand-français.

Êtes-vous issu d’une famille de musiciens ou d’artistes de façon générale ?

Il n’y a jamais eu de musiciens dans ma famille. Mon père est un peintre très talentueux, mais contrarié : il a dû se tourner vers un métier plus alimentaire pour subvenir aux besoins de la famille. En revanche, depuis qu’il est à la retraite, il rattrape le temps perdu en se consacrant pleinement à sa passion. Il a déjà vendu pas mal de toiles, je suis extrêmement fier de lui !

 

Pourquoi avez-vous été attiré par la musique ?

Mon frère avait laissé une vieille guitare abandonnée en haut d’une armoire. Je l’ai trouvée un jour où je m’ennuyais – je devais avoir 15 ans. À la même période, j’ai découvert Led Zeppelin. Une énorme claque, un coup de foudre brutal, mais comme une évidence. Ça a fait tilt. Mais même plus jeune, je me souviens avoir passé des heures dans le bureau de mon grand-père à écouter des vinyles de Jacques Brel.

 

Quel fut votre parcours musical scolaire ?

Je n’ai pas de parcours musical scolaire… du tout. J’ai toujours mieux appris seul et l’école m’a toujours ennuyé. Je suis 100 % autodidacte, mais j’ai bien sûr puisé des infos un peu partout pour évoluer en tant que compositeur. Cela dit, je pense que ce parcours m’a permis de développer une oreille et une sensibilité très intuitives.

 

Enfant, étiez-vous déjà intéressé par les musiques pour l’image ?

Encore aujourd’hui, j’ai en tête des dizaines de génériques de dessins animés comme Les Trois Mousquetaires, Jeanne et Serge, Saint Seiya, ou encore des thèmes de films – notamment ceux de Vladimir Cosma pour les comédies avec Pierre Richard, ou ceux de Francis Lai. Je ne le savais pas à l’époque, mais ça a dû jouer un rôle très important dans mon envie de composer pour l’image.

 

Écoutez-vous régulièrement de la musique pour votre plaisir ?

Tout le temps. La plupart du temps en vinyle, mais j’essaie aussi de découvrir régulièrement de nouvelles musiques. La chance de notre génération, c’est que tout est accessible : il suffit d’appuyer sur le bouton « aléatoire » d’une plateforme d’écoute pour tomber sur quelque chose de nouveau. C’est une forme de hasard très inspirante. Mais parfois ma passion pour l’histoire prend le dessus et je passe des heures a écouter des podcasts.

 

Quels sont les artistes et genres qui ont votre préférence ?

Je suis très éclectique, mais j’ai un faible pour les musiques avec des thèmes forts et une approche organique. J’écoute beaucoup de folk des années 60-70, comme Nick Drake ou Dylan (avant son accident de moto), du rock progressif des années 70, comme Genesis, de la pop des années 60 à la Beach Boys, mais aussi Queen, Stevie Wonder, Led Zeppelin, Miles Davis… Je suis aussi passionné par les vieilles musiques de film, où l’on trouve, à mon sens, des thèmes beaucoup plus marquants et inventifs que dans certaines productions actuelles. Et puis j’écoute aussi des choses plus violentes, comme Tool, Pantera, ou du rock des années 90 : Pearl Jam, Soundgarden, Radiohead… Côté musique plus récente, j’aime beaucoup ce qui se passe sur la scène indie australienne en ce moment.

 

 

D’ailleurs, quels sont les compositeurs qui sont une source d’inspiration dans votre processus créatif ?

Tous ceux qui ont des thèmes forts : Michael Giacchino, Bernard Herrmann, Francis Lai, Vladimir Cosma, Henry Mancini, Ennio Morricone, Alexandre Desplat… Et aussi ceux qui ont une identité sonore marquée, comme Johnny Greenwood.

 

Pour en revenir à vos études, comment passe-t-on de la littérature à la musique ?

L’école, ça n’a jamais été mon truc. Je m’y suis souvent ennuyé. Je ne me suis jamais senti assez bon écrivain pour envisager sérieusement cette voie, alors que la musique m’a semblé plus abordable, plus immédiate, comme un espace où je pouvais me perdre, expérimenter, et finir par y trouver ma place. J’ai enchaîné les petits boulots jusqu’à pouvoir cumuler assez d’heures pour obtenir le statut d’intermittent – dont six années… dans les pompes funèbres ! C’était mon premier objectif, à l’époque où j’étais avant tout musicien. Puis, petit à petit, des opportunités m’ont amené progressivement vers la musique de film.

 

A ce titre, vos études littéraires vous servent-elles dans votre travail ?

Absolument, et je le revendique. Je pense que ça m’a donné une vraie sensibilité au sous-texte, à ce que l’histoire ne dit pas directement, à ce que les personnages ressentent sans l’exprimer. Cette capacité d’écoute et de lecture entre les lignes me nourrit énormément dans mon travail de composition.

 

Avant la musique de film, vous avez commencé par travailler pour d’autres artistes, en tant qu’auteur, musicien multi-instrumentiste, arrangeur ou encore producteur. Que retenez-vous de cette période ?

Beaucoup de soif d’apprendre, de belles rencontres et une grande dose de nouveauté. C’était une période très excitante, pleine de découvertes. Elle m’a permis de toucher à plein d’aspects du métier et de comprendre la musique dans toute sa diversité.

 

De quels instruments jouez-vous ?

Oula… Guitare, mandoline, basse, piano, banjo, oud, cithare, harmonica, bouzouki, percussions… Depuis peu, je m’essaie aussi un peu au violoncelle et à la batterie. Et je vais bientôt me mettre à la clarinette : c’est un instrument qui me fascine par sa versatilité.

 

Quelle a été votre première composition en tant que musicien professionnel ?

Honnêtement… je ne m’en souviens plus !

 

Quel a été le déclic qui vous a amené à travailler pour la télévision et le cinéma ?

Il y avait un concours pour mettre en musique un court-métrage avec son groupe. L’idée était de jouer la musique en live pendant la projection du film. J’ai décidé de m’y mettre à ce moment-là. C’est là que tout a commencé.

 

Ce fut donc votre première musique pour l’image ?

Oui, mais je ne me rappelle plus du titre du film, qui venait du Québec. À l’époque, j’avais tout composé sur Reason, et utilisé Cubase pour enregistrer les guitares. C’était un morceau très rock progressif.

 

Comment avez-vous commencé à faire des musiques pour des publicités ?

À l’époque, j’étais encore en France. Je démarchais des agences en « re-scorant » des publicités existantes – je recomposais une musique sur une pub déjà réalisée, pour leur montrer ce que je pouvais apporter. La plupart n’étaient pas intéressées, mais quelques-unes m’ont donné ma chance. Et petit à petit, ça a pris.

 

Cette expérience fut-elle bonne ?

Très ! J’en fais encore de temps en temps. Mais le milieu de la pub a beaucoup changé : entre les agences spécialisées, les pitchs à peine rémunérés, et maintenant l’intelligence artificielle… Aujourd’hui, je n’en fais plus que lorsqu’il s’agit de projets avec des réalisateurs que je connais bien et qui me font confiance. Je fais aussi du sound design à cette occasion.

 

 

Pourquoi avoir quitté la France pour vous installer en Allemagne ?

Un ami habitait à Hambourg, je suis parti le voir en vacances… et j’y ai rencontré ma femme. Elle s’est avérée enceinte dès notre première nuit ensemble ! Disons que c’était une opportunité assez claire à saisir. Et qui fut la meilleure decision de toute ma vie !

 

N’est-ce pas compliqué de repartir de zéro dans un nouveau pays, sans parler la langue, ni avoir de contacts ?

Oui, surtout avec un bébé en route ! On a traversé des moments pas faciles, mais j’ai toujours eu beaucoup d’énergie pour me donner les moyens d’atteindre les objectifs que je me fixe. Et j’essaie toujours de garder du plaisir dans ce que je fais. Pour les contacts, je les ai créés en écrivant beaucoup de lettres. Quant à la langue, je l’ai apprise principalement en regardant la télé ! Au début – et ça m’arrive encore parfois – j’entendais souvent des phrases du genre : « On vous appellera quand on aura un projet français ! » :)

 

Les façons de travailler sont-elles différentes entre les deux pays ?

J’ai vraiment commencé ma carrière de compositeur ici, en Allemagne, donc j’aurais du mal à comparer de façon précise. Mais il y a déjà une grande différence au niveau du statut : ici, je travaille en freelance, ce qui serait pratiquement impossible en France, où le système repose beaucoup plus sur l’intermittence.

 

Connaissiez-vous déjà le travail des compositeurs allemands tels que Martin Böttcher, Klaus Doldinger, Christian Bruhn, Peter Thomas, Hans-Martin Majewski, Gert Wilden, Rolf Wilhelm ou plus récemment à Martin Todsharow, Ralf Wengenmayr et Annette Focks…

Je connais évidemment certains d’entre eux, et beaucoup de compositeurs contemporains sont devenus des amis. Mais c’est drôle : je connais très peu des noms que vous venez de citer ! Je vais aller écouter leur travail dès que possible — merci pour la découverte !

 

Les réalisateurs ou producteurs allemands appréhendent-ils différemment la musique pour l’image ?

J’ai travaillé avec des réalisateurs et producteurs hollandais, suédois, danois, américains, canadiens… Je pense que ça dépend avant tout du projet, du budget, et parfois des « stars » au casting. Je remarque quand même que les équipes sont souvent moins stressées sur les films d’animation ou les films indépendants traditionnels que sur les projets à gros budgets ou avec un casting important. Après, tout dépend de la sensibilité de chacun. J’essaie toujours de parler musique le plus tôt possible, d’échanger des playlists Spotify avec les réalisateurs… J’ai croisé des réalisateurs encore plus nerds que moi, passionnés de musique de film, et d’autres qui avaient déjà mal à la tête au bout de quinze minutes d’écoute. :)

 

Comment choisissez-vous vos projets ?

En général, ce sont plutôt les projets qui me choisissent ! :) Cela dit, si on me propose de faire un score électronique minimaliste, je décline poliment, en orientant vers des compositeurs plus adaptés. J’ai besoin de sentir que je peux vraiment embellir un projet, y apporter quelque chose de personnel.

 

Vous avez travaillé sur un certain nombre de films d’animation. Est-ce parce que cela vous offre une plus grande liberté créative ?

Tout a fait ! Et pour être honnête, ce sont aussi les gens du monde de l’animation qui m’ont donné ma première chance ici. Je suis quelqu’un de fidèle. Et dans l’animation — et particulièrement la stop motion — il y a souvent beaucoup plus de liberté créative. On peut toucher à tous les genres, essayer des idées complètement farfelues, sortir des sentiers battus… C’est un terrain de jeu incroyable pour un compositeur.

 

Travaillez-vous différemment selon qu’il s’agisse d’un film en prises de vues réelles ou d’animation ?

Oui, mais c’est surtout lié au fait qu’on arrive généralement plus tôt sur les projets d’animation.

Souvent, on a accès aux animatiques dès le début, ce qui permet de commencer à travailler très en amont. Sur un film en prises de vues réelles, à moins qu’il y ait besoin d’une chanson ou d’une musique spécifique pendant le tournage, on reçoit en général un « rough cut » ou un « picture lock » pour commencer.

 

 

Composez-vous avec ou sans les images ?

Les deux. J’aime que la musique puisse aussi exister seule, sans les images, qu’elle fonctionne en tant que telle. Pour certaines scènes, je garde juste l’histoire en tête et je détourne un peu mon regard de l’image. Mais pour le score à proprement parler, bien sûr, je me sers des images.

 

Vous composez parfois des chansons pour des films. A quel moment créez-vous la chanson, par rapport au score ?

Ça dépend s’ils en ont besoin pendant le tournage. Par exemple, dans Totem, la chanson The Swallow Song a été écrite dès la lecture du scénario, car un acteur la chante à l’écran. Dans le film d’animation Elli Ungeheuer Geheim, certaines chansons ont été composées à partir du « rough edit ». D’autres n’étaient pas prévues au départ, mais j’ai senti que le film avait besoin d’un moment chanté. Et puis, j’adore écrire des chansons. Mon prochain album sort d’ailleurs à la fin de l’année sur le label Quixote RPM. :)

 

Votre approche musicale est-elle différente, selon le réalisateur avec lequel vous collaborez ?

Évidemment, mais aussi selon le film, l’histoire, l’univers… Ce n’est pas pour faire plaisir au réalisateur, mais vraiment pour servir le récit.

 

Êtes-vous attentif à la relation entre un réalisateur et un compositeur ?

La quasi-totalité des réalisateurs avec qui j’ai travaillé sont devenus des amis proches. On se voit, ils viennent dîner, je fais un bœuf bourguignon, on ouvre quelques bouteilles… C’est très important d’apprendre à se connaître humainement, de construire une vraie relation de confiance.

 

Lorsque vous composez, utilisez-vous les outils numériques ou préférez-vous le faire à l’ancienne ?

Je suis plutôt à l’ancienne… mais à notre époque, on est un peu obligé d’utiliser les outils numériques, surtout en tant que producteur. Les budgets deviennent de plus en plus serrés et les délais de plus en plus courts.

 

Que pensez-vous de l’évolution de la musique de film ?

Je trouve que l’on est dans une période assez intéressante, avec beaucoup d’expérimentations et de liberté. Actuellement, les compositeurs se concentrent beaucoup sur la couleur et les textures, ce qui est positif, mais pour moi, il manque des thèmes forts. Je pense que la prochaine étape, c’est d’avoir les deux : une grande richesse sonore avec des thèmes puissants.

 

Qu’en est-il du financement dans le monde du film et surtout de celui alloué à la musique ?

Actuellement, la situation est assez difficile pour beaucoup d’autres dans le secteur. Je peux parler de mon expérience personnelle : trois films et une série auxquels j’étais associé ont été annulés. Cette année, j’ai lu le meilleur scénario qu’il m’ait jamais été donné de lire – une œuvre audacieuse, magnifiquement écrite, très émotive, avec un message politique clair. Mais peu de temps avant le tournage, le financement a été retiré. Pourquoi ? Parce qu’on a jugé le film trop politiquement controversé, trop provocateur, trop engagé, trop risqué pour être subventionné. Il faut donc toujours trouver un équilibre ! Bien sûr, un film n’a pas forcément besoin d’être politique ou de porter un message. Le cinéma peut – et doit aussi – nous offrir des moments de détente, d’humour et de légèreté. Surtout en période de crise, l’art est particulièrement important. Les gens ont besoin d’histoires – pas seulement pour réfléchir, mais aussi pour rêver, rire et décrocher du quotidien. Le divertissement ne devrait pas être un luxe. Ici, la rupture au sein de la coalition dirigée par le chancelier Scholz a conduit au gel de nombreux financements culturels. Peut-être que les responsables ont voulu d’abord attendre de voir comment les choses évolueraient, mais on sent globalement une grande prudence. Et cette retenue ne touche pas seulement le cinéma – elle est aussi très visible dans la publicité. Beaucoup de marques sont devenues très frileuses dès qu’il s’agit d’investir dans des concepts créatifs ou audacieux. Cela a bien sûr à voir avec l’incertitude économique générale.Malgré tout, je reste optimiste pour l’avenir. J’espère que la situation va bientôt s’éclaircir – pour nous tous.

 

A l’heure où l’I.A. s’incruste partout, ne craignez-vous pas pour la pérennité de votre profession ?

Je pense que ce sera plus compliqué, évidemment, surtout dans des secteurs comme la publicité. Après, quand on appelle un compositeur pour un film, on le fait aussi pour son identité. Chaque humain est différent. Je n’ai pas peur, je pense juste qu’il faut vivre avec, trouver la bonne balance, le bon équilibre. Évidemment, cela pourrait passer par une période compliquée au début.

 

Travaillez plus spécifiquement avec certains musiciens ou orchestres ?

Oui, je suis très fidèle. Pour les clarinettes et saxophones, c’est Björn Dahlberg. Pour les flûtes, c’est Josh Plotner. Pour les altos et violons solos, c’est Stefan Pintev. Pour les trompettes, j’ai une amie américaine, Virginia Luehrsen, et Ryan Svendsen. Je travaille aussi avec l’orchestre sud-africain du Cap, via Cinemagic Scoring.

 

Aimeriez-vous pouvoir proposer vos musiques sous forme de suites, par exemple, pouvant être interprétées en concert ?

J’avoue que cette idée a fait son chemin ces derniers temps. Là, j’ai un album de pop indie progressive qui sort en fin d’année, et aussi un EP de néo-classique avec une flûtiste. Peut-être que le prochain projet sera dans cette direction. :)

 

 

En parallèle à votre travail pour l’image, vous menez aussi des projets musicaux personnels variés, comme 34 Days In Lockdown ou Mötley Crüe: The Bluegrass Experience. Que vous apportent ces projets ?

Du fun ! J’ai besoin de diversité. La musique, c’est toujours une photographie dans le temps. On évolue, et j’ai besoin d’écrire tout le temps. C’est viscéral. Honnêtement, j’en ai besoin pour me sentir heureux.

 

De nombreux béophiles sont attachés au CD. Hélas, si vos œuvres sont trouvables en version dématérialisée, très peu le sont en CD…

Deux BO sont disponibles via le label Movie Score Media : Elli and Her Monster Team (Elli Ungeheuer Geheim) et Two to One (Zwei zu Eins) ! Quant à mon prochain album, il sortira aussi en vinyle. :) C’est un format que je préfère, parce qu’il y a ce côté « objet » qui compte vraiment. L’artwork est davantage travaillé et c’est quelque chose qui me manque beaucoup dans le digital. Les CDs, je n’ai jamais été très fan, personnellement. Je n’ai même rien pour les lire chez moi. Par contre, j’ai une collection d’environ 300 vinyles…

 

Publicités, courts-métrages, cinéma, séries TV… Et pas encore de musiques pour les jeux vidéo ?

Non, malheureusement, et j’aimerais énormément. Je viens juste de finir le jeu Zelda: Tears Of The Kingdom. J’aimerais tellement travailler sur des projets comme ça. J’ai aussi une énorme envie de composer pour le théâtre, mais je n’ai pas de réseau dans ces domaines.

 

Si vos musiques pour l’image semblent peu connues et reconnues en France, il n’en est pas de même en Allemagne. Vous y avez ainsi récemment reçu deux prix : le German Film Music Prize et le Best Composer at Independant Days Film Festival.

C’est normal, ma carrière a commencé ici, en Allemagne. Mais j’aimerais beaucoup travailler aussi sur un long-métrage français. Après, à moins d’une coproduction, cela semble difficilement envisageable pour des raisons de fonds…

 

Puisque vous assurez des tournées promotionnelles pour soutenir les films bénéficiant de votre musique, avez-vous constaté une évolution quant au regard porté par le public sur la musique de film ? Les spectateurs vous parlent-ils de votre travail ?

Oui, et notamment pour les films d’animation. La musique est plus mise en valeur, il y en a tout simplement plus, donc les gens retiennent davantage. Les gens semblent retenir quelques thèmes de ces travaux, et ça, c’est le plus beau compliment qu’on puisse vous faire en tant que compositeur. Les gens se demandent comment se passe le travail d’un compositeur, comment on en arrive là… Honnêtement, aller dans les festivals et parler aux gens est l’une de mes étapes préférées !

 

Pouvez-vous nous parler de vos futurs projets, qu’ils soient pour l’image ou non ?

Je sors deux mini-EP en juin et septembre, qui annonceront la sortie de mon album en novembre, chez le label Quixote RPM. C’est un recueil de morceaux indie pop progressif, très cinématographiques aussi. On va faire pas mal de vidéos en stop motion autour de cet album. :) Ensuite, je devrai retourner mettre des films en musique à la fin de l’année.

 

J’ai cru comprendre que la question de la santé mentale chez les compositeurs freelances vous intéresse. Pouvez-vous en dire plus ?

Oui. C’est difficile parfois, on passe par des longues périodes sans travail (parfois six mois !). On se remet beaucoup en question. C’est pour ça qu’il faut aussi faire un projet à côté qui nous fait plaisir, qui nourrit l’âme. Et honnêtement, il faut éviter les réseaux sociaux à ce moment-là. C’est juste un miroir des succès des autres et cela peut nous renvoyer à notre échec passager ou à notre situation d’attente d’un projet. Peu de gens abordent le sujet malheureusement. J’ai la chance d’avoir une famille qui me soutient quotidiennement, entre ma femme, ma fille et ma chienne, et ça me permet de ne pas sombrer dans la dépression. :)

 

Quels conseils donneriez-vous à un jeune compositeur qui envisagerait de se consacrer à la musique pour l’image ?

Écoute ta force intérieure. Fais confiance à tes premières idées. Et surtout, écoute beaucoup de musique — pas seulement du classique ou des bandes originales. Concentre-toi sur l’histoire, pas uniquement sur l’image.

 

 

Pour découvrir la musique du compositeur : Bandcamp

 

Too Early At The Party, son prochain 45 tours digital, sortira le 13 juin sous le label Quixote RPM.

 

Entretien réalisé en mai 2025 par Franck Le Roux
Transcription : Franck Le Roux
Illustrations : © Amaury Laurent Bernier
Remerciements à Amaury Laurent Bernier pour sa gentillesse et sa sincérité.

Franck Le Roux
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