Pascal Le Pennec. Voilà un nom qui ne parle pas vraiment au grand public. Mais évoque-t-il vraiment plus de choses pour la majorité des béophiles ? Rien n’est moins sûr ! En effet, malgré son talent indéniable, il suffit notamment d’écouter ses musiques de film pour s’en convaincre, le compositeur breton est assurément encore trop peu connu. Et c’est bien dommage, car l’homme est en plus fort sympathique. J’en veux pour preuve nos échanges d’e-mails. Au départ, je l’avais juste contacté pour lui dire tout le bien que je pensais de sa musique pour Slocum et Moi, le nouveau long-métrage de Jean-François Laguionie. Honnêtement, je n’attendais pas grand-chose, sachant que peu de compositeurs prennent le temps de répondre. Mais Pascal Le Pennec, lui, répond ! De message en message, l’idée me vint donc de lui proposer un entretien… et sa réponse, positivement enthousiaste, ne tarda pas à venir.
Et pour les plus dissipés du fond, qui se demandent encore ce qu’il a pu composer, on peut citer ses bandes originales pour Le Tableau et Louise en Hiver (Jean-François Laguionie), Le Pharaon, le Sauvage et la Princesse (Michel Ocelot), Bayala : la Magie des Dragons (Aina Järvine) ou encore Le Plaisir du Désordre (Christian Rouaud) et Cache-Cache (Yves Caumon).
Êtes-vous issu d’une famille de musiciens ou d’artistes de façon générale ?
Pas du tout ! Je suis issu d’une famille modeste, mon père était ouvrier, ma mère gardait des enfants. Bretons du Trégor, ils étaient l’un et l’autre « montés » à Paris, comme on dit, pour trouver du travail, et avaient posé leurs valises à Montparnasse… qui était la plus grande ville bretonne, comme chacun sait ! C’est dans ce quartier que je suis né et où j’ai vécu mes premières années. Par la suite, nous avons déménagé en proche banlieue, à Clamart.
Pourquoi avez-vous été attiré par la musique et quel fut votre parcours musical scolaire ?
Un souvenir est resté gravé dans ma mémoire : mon père s’enfermait souvent dans sa chambre pour jouer des airs de chansons sur son harmonica. Je l’écoutais derrière la porte ! J’ai demandé à faire de la musique vers l’âge de six ans. Mes seules références musicales, à l’époque, étaient la musique populaire qu’écoutaient mes parents… et jouer de l’accordéon a été une sorte de hasard social ! Par la suite, j’ai eu la chance d’entrer dans une des premières classes d’accordéon classique, au conservatoire de Clamart. L’accordéon classique est un instrument profondément différent de l’accordéon traditionnel, puisqu’il ne possède pas d’accords préparés à gauche, mais le même clavier des deux côtés, ce qui offre des possibilités harmoniques à peu près équivalentes à celles d’un orgue à deux claviers. J’ai alors découvert et joué le répertoire classique. Un émerveillement ! Parallèlement, j’ai entamé l’étude de l’harmonie au conservatoire d’Issy-les-Moulineaux, auprès d’un professeur au nom un peu désuet aujourd’hui, Désiré Dondeyne, mais qui était un puits de science en matière musicale. Il a beaucoup compté pour moi. Après le bac, j’ai un moment hésité, j’ai fait un an d’Allemand à la Sorbonne, avant de m’avouer que ma véritable vocation était ailleurs… et j’ai finalement achevé mes études à l’École Normale de Musique de Paris, en classes d’écriture, accordéon et musique de chambre.
Enfant, étiez-vous déjà intéressé par les musiques pour l’image ?
Pas spécialement, mais habité par la musique, oui. Une véritable obsession ! Je vénérais Bach, tel un dieu. L’intérêt pour la musique de film est venu beaucoup plus tard.
Écoutez-vous régulièrement de la musique pour votre plaisir ?
Beaucoup moins que dans ma jeunesse (j’étais boulimique), mais je consacre toujours du temps à étudier les partitions de compositeurs qui m’ont nourri et continuent de m’enchanter, surtout les représentants de la musique française du XXème siècle, Fauré, Debussy, Ravel, Poulenc, Honegger, Messiaen, mais aussi les Russes, Stravinsky, Prokofiev, Chostakovitch… Cela dit, j’écoute bien sûr d’autres styles et formes de musique. Dans leur évolution, la musique savante et la musique populaire se sont toujours mutuellement influencées, et cette fusion m’intéresse.
Quels sont les compositeurs qui sont une source d’inspiration dans votre processus créatif ?
Je sais que de nombreux compositeurs de musique de film puisent leur inspiration dans les travaux de leurs prédécesseurs, notamment américains (Hermann, Williams, Elfman, Zimmer…). Ce n’est pas mon cas, car j’écoute finalement assez peu de musique de film. Mes modèles en matière de musique, qui sont des sommets inatteignables, demeurent les géants que j’ai mentionnés précédemment, les compositeurs classiques du XXème siècle. Cela dit, j’admire le travail de Rota, Delerue, Morricone, Petit, Coulais, Yared, Rombi ou, parmi de plus jeunes, Christophe Julien ou Mathieu Lamboley… entre autres !
Avant la musique de film, vous avez été instrumentiste et accompagnateur pour divers artistes, comme la célèbre Régine, mais aussi orchestrateur et compositeur pour le théâtre…
Dans ma précédente vie de musicien de scène, j’ai beaucoup travaillé pour le théâtre (cinq ans avec Jérôme Deschamps, Macha Makeïeff, ou encore avec Pierre Santini et aussi aux Théâtre des Amandiers de Nanterre), et j’ai accompagné des chanteurs et chanteuses, comme par exemple Régine, en effet, mais également Romain Didier, Philippe Meyer (car il chante quand il ne fait pas de radio !)… Mais l’expérience qui m’a le plus marqué, c’est d’avoir accompagné six ans Allain Leprest, qui était pour moi le Rimbaud du XXème siècle (et pas seulement selon moi… des gens comme Nougaro, Trintignant, d’Ormesson disaient la même chose). Et dans cette précédente vie, celle d’avant le cinéma, je n’ai jamais cessé de donner des concerts d’accordéon, parallèlement à la musique pour le théâtre et la chanson. C’est même ce qui me motivait le plus. J’ai fondé deux duos, avec Guy-Olivier Ferla puis Philippe Borecek. Nous avons créé beaucoup d’œuvres de musique contemporaine, à l’époque où l’instrument était plutôt mal connu dans ce milieu. Les compositeurs l’emploient abondamment aujourd’hui ; c’était nouveau dans les années 80/90. Ce qui nous a considérablement aidés, Guy Ferla et moi, c’est l’intérêt porté à notre duo par Menuhin et Cziffra, qui nous ont accueillis au sein de leur fondation.
Et d’ailleurs de quels instruments, au pluriel, jouez-vous ?
Je dis parfois que je joue du crayon. Plus sérieusement, je ne sais jouer que de l’accordéon car ses possibilités polyphoniques sont très importantes, dans sa version « à basses chromatiques ». Pas besoin de jouer de piano, même si j’adore ce dernier et que j’écris beaucoup pour lui… J’adore du reste tous les instruments ! Ce qui est génial, quand on orchestre, c’est l’impression de jouer de tous les instruments !
Sur l’album Songs de l’Opéra de Quat’ Sous, on peut justement vous entendre jouer de l’accordéon de concert avec Philippe Borecek, un autre fameux accordéoniste…
En matière de transcriptions du répertoire classique, c’est vrai que j’ai beaucoup travaillé sur les partitions de Kurt Weill. J’avais reçu de son éditeur viennois, Universal, l’autorisation de « réduire » la partition d’orchestre de L’Opéra de Quat’Sous pour deux accordéons, d’où le disque que vous mentionnez. J’ai toujours été fasciné par ce compositeur, qui a su si bien, justement, marier musique savante et musique populaire. Outre les concerts, j’ai créé deux spectacles autour de ce répertoire.
Quelle a été votre première composition en tant que professionnel ? Et en musique de film ?
Ma première musique éditée a été Souvenirs d’Accordéon, que j’ai écrite vers vingt ans pour Pierre Haralambon, un chanteur « à texte » comme on disait à l’époque, qui avait signé pour cinq albums chez Barclay… mais qui s’est fâché avec le célèbre éditeur ! Sa carrière a été brisée dès le second disque ! Et j’ai commencé à travailler pour le cinéma en 2005, sur Cache-Cache.
Puis vous vous tournez exclusivement vers la composition pour le cinéma. Quel a été le déclic ?
Finalement, je suis un « jeune » compositeur de musique de film ! Je n’ai fait ce choix radical qu’en 2008, en arrêtant la scène. Un pont a été jeté entre ces deux activités en 2005. A l’époque, je travaillais pour la Compagnie Jérôme Deschamps, ce qui occupait tout mon temps (on était constamment en tournée). Un très bon ami, Thierry Machuel, lui-même compositeur, avait commencé à écrire la musique du long-métrage d’Yves Caumon, Cache-Cache. Or le réalisateur, qui connaissait l’utilisation de l’accordéon en musique contemporaine, n’a pas tardé à exprimer un souhait : que cet instrument soit au cœur de la bande originale. C’est ainsi que j’ai composé toutes les pièces comportant de l’accordéon, que j’ai ensuite interprétées. Cette expérience (le rapport de la musique à l’image) m’a passionné et j’ai souhaité poursuivre sur cette voie, au point d’arrêter la scène en 2008. J’avais vécu des émotions extrêmement fortes en tant qu’interprète, je ne me sentais frustré de rien de ce côté-là, et prêt à passer à autre chose : la composition, exclusivement.
Comment choisissez-vous vos projets ?
Disons qu’au début je ne me montrais pas trop difficile ; aujourd’hui je choisis davantage. Ce qui prime, c’est l’intérêt strictement artistique que je porte aux projets qu’on me propose.
J’ai remarqué que les films d’animation occupaient une bonne part de votre filmographie…
En 2008, je souhaitais m’orienter vers le cinéma, sous toutes ses formes, et j’ai travaillé pour des fictions et des documentaires en prises de vues réelles, mais j’ai rencontré Jean-François Laguionie en 2011, et cet événement m’a fait entrer dans le monde de l’animation. Aujourd’hui je réalise la chance que j’ai, étant donné le rôle majeur de la musique dans cette forme cinématographique.
Travaillez-vous différemment selon qu’il s’agisse d’un film en prises de vues réelles ou d’animation ?
Oui et non. Qu’il s’agisse de prises de vues réelles ou d’animation, je crois que la musique donne son sens final à l’image. Le public n’a généralement pas conscience de l’impact de la musique sur la compréhension qu’on a d’une scène à l’écran ! Vous pouvez du reste, sciemment et grâce à la musique, faire dire à une séquence le contraire de ce que raconte l’image ! Mais en animation, la musique apporte un « supplément d’âme » (selon Laguionie, qui m’a beaucoup appris dans ce domaine), elle se situe dans la sphère des sentiments, ce que l’image ne montre pas, ou pas suffisamment, car un dessin, si beau soit-il, n’est souvent pas aussi expressif qu’en prises de vues réelles. De ce point de vue, la musique joue un rôle essentiel. Hollywood a sans doute une conception différente, en ce sens que le cinéma américain demande fréquemment au musicien de souligner l’action ou, même, de la paraphraser. Des cinéastes comme Laguionie ou Ocelot, avec qui j’ai aussi travaillé, demandent plutôt au compositeur de rendre compte de l’intériorité des personnages. Ce qu’il y a de différent aussi, en animation par rapport au cinéma en prises de vues réelles, c’est la durée de production d’un long-métrage, qui est beaucoup plus longue, et moi, j’aime bien prendre mon temps sur un film !
Composez-vous avec ou sans les images ?
Je me détache des images lorsque je compose, je préfère les visionner deux ou trois fois puis tout éteindre, permettre à la musique de monter en moi, travailler sur les impressions laissées par le film. Cela s’apparente un peu à des exercices de méditation !
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre collaboration avec le réalisateur Jean-François Laguionie?
L’histoire entre Jean-François Laguionie et moi est faite de complicité et d’amitié. Le jour où nous nous sommes rencontrés, je me souviens l’avoir entendu dire : « Je crois que nous nous comprenons… » C’est exactement ce que je ressens quatorze ans après. Trois collaborations, et trois cas de figure bien différents. D’abord, pour Le Tableau, la production ne m’a accordé que trois mois pour composer la partition, en majeure partie symphonique ; le film était terminé. Sur Louise en Hiver, j’ai bénéficié de conditions idéales : j’ai travaillé neuf mois sur l’animatique (le film proprement dit n’était pas prêt), ce qui m’a permis de m’imprégner de l’histoire et de la psychologie de Louise… Quant à Slocum et Moi, il s’agit d’une expérience unique car j’ai été appelé très très en amont ! Jean-François souhaitait que la musique soit un préalable à tout, il voulait bâtir le film sur la musique et non l’inverse.
Votre approche musicale est-elle différente, selon le réalisateur avec lequel vous collaborez ?
Je crois que non. Une chose est commune dans l’approche : je travaille en lien étroit avec le réalisateur, je pose énormément de questions au démarrage de la collaboration, j’essaie de comprendre séquence par séquence, plan par plan, le rêve de musique du cinéaste… ce qu’il composerait s’il était musicien ! Et ensuite, je demande une liberté totale.
Comment êtes-vous arrivé sur Bayala, créé d’après une gamme de jouets du fabricant Schleich ?
J’ai été contacté par la partie française de la production, le studio o2o, qui était chargée de superviser et financer la musique de ce projet. J’ai accepté d’écrire cette musique afin de vivre, de l’intérieur, une expérience de cinéma clairement plus commercial, façon Disney, tandis que, jusqu’à lors, mon travail s’inscrivait – et s’inscrit toujours – dans ce qu’il est convenu d’appeler le « cinéma d’auteur ». Ce que cela m’a appris, c’est que dans ce type de cinéma, le pouvoir en matière de choix artistiques est davantage entre les mains des producteurs, à l’inverse du cinéma d’auteur, où c’est le cinéaste qui conduit la barque.
Lorsque vous composez, utilisez-vous les outils numériques ou préférez-vous le faire à l’ancienne ?
Les deux ! J’ai besoin, pour commencer, du papier à musique, du crayon et, bien sûr, de la gomme ! J’aime ce contact. J’écris ce qu’on appelle un « monstre » en orchestration, sur quelques portées, 2, 3 ou 4, pas plus, mais déjà avec des indications d’instruments, ce qui me sert à réaliser des maquettes. Ensuite je passe sur échantillonneurs, je réalise des maquettes pour faire entendre mes idées au réalisateur. Lorsque je reçois son aval, j’écris l’orchestration définitive, pour les musiciens en chair et en os. Il y a quelques années, j’écrivais le conducteur à la main, que je confiais au copiste ; aujourd’hui j’effectue le même travail, mais directement sur écran, grâce à un logiciel d’édition de partitions (Sibelius). Je fonds orchestration et copie en une seule et même étape.
Que pensez-vous de l’évolution de la musique de film ?
Je ne souffre d’aucun tropisme américain. Même si je reste admiratif de ce que ce pays a offert – et continue d’offrir – comme merveilles en matière de musique de film, je conteste le modèle comme devant s’imposer à tous. Déjà, je n’adhère pas à la façon de procéder, qui conduit de nombreux compositeurs à signer des musiques écrites pour l’essentiel par des bataillons d’assistants. Cette conception tayloriste de notre métier est aux antipodes de la mienne. Je demeure un artisan. Ensuite, j’adhère de moins en moins au « style », auquel il faudrait se conformer (car supposé plaire au plus grand nombre), un style très fortement influencé par l’utilisation des banques de sons… Les spectateurs n’ont pas conscience d’une chose : la musique n’est souvent plus réellement composée mais produite par des machines, à grands renforts de séquences toutes faites qui ont nivelé le goût du public… mais aussi le goût et l’attente des réalisateurs et des producteurs, qui en redemandent. C’est pourquoi on a de plus en plus souvent l’impression d’entendre la même musique, d’un film à l’autre, par exemple ces formules rythmiques, des ostinatos de cordes, ridicules à force d’être reproduits. Enfin, je reste très attaché à la notion de mélodie (celle que l’on retient en sortant d’une salle de cinéma), qui disparaît progressivement au profit de climats qui relèvent davantage du design sonore que de la composition musicale. Je retourne la question que vous me posez : je me demande personnellement ce que pensent les amoureux de musiques de films de cette évolution…
Pour ma part, c’est souvent la déprime qui prévaut. D’ailleurs, à l’heure où le rouleau compresseur de l’I.A. s’invite partout, ne craignez-vous pas pour la pérennité de votre profession ?
Dans mes pires cauchemars, je n’avais pas anticipé l’arrivée de l’I.A. !
Le Breton que vous êtes semble régulièrement collaborer avec des orchestres locaux, comme l’Orchestre National de Bretagne. Est-ce pour mettre en avant les talents bretons ? Le musicien et chef d’orchestre Johannes Le Pennec est souvent associé à votre travail. Est-ce un parent ?
Je ne travaille pas avec l’ONB parce qu’il est basé en Bretagne, mais parce qu’il figure parmi les meilleurs orchestres français. Quant à Johannes, il s’agit de mon fils aîné. J’ai cette chance assez incroyable d’avoir un fils chef d’orchestre. Habituellement il travaille sur le répertoire classique, il est appelé par différentes formations, dont l’ONB du reste, mais il m’accorde de son temps pour diriger ma musique depuis 2008, et cette complicité est assez merveilleuse à vivre.
Compte-tenu de votre relation forte avec l’ONB, aimeriez-vous pouvoir proposer vos musiques sous forme de suites pouvant être interprétées en concert ?
Lorsque je compose pour le cinéma, je crois que j’ai toujours plus ou moins consciemment le désir que ma musique puisse être entendue indépendamment de l’image. Même si je n’oublie jamais qu’il s’agit avant tout de servir un film !
Je voudrais revenir, rapidement, sur le côté breton. N’êtes-vous pas un peu agacé, lorsque l’on vous qualifie de compositeur breton, comme je l’ai malicieusement fait à plusieurs reprises ?
Ce n’est pas parce que je ne vis plus à Paris, mais en Bretagne, que je me considère comme un « compositeur breton » ; cette référence à mon lieu d’habitation conduit très fréquemment dans la presse à cette association « compositeur breton ». Est-ce qu’on parle de « compositeur parisien » ?
Si vos œuvres sont trouvables en version dématérialisée, très peu le sont en CD…
Je regrette bien sûr cette évolution ! Je demande chaque fois que mes B.O. soient éditées sur un support physique… sans succès.
Le Pharaon, le Sauvage et la Princesse est uniquement sorti en CD au Japon. Le saviez-vous ?
Oui. J’ai été très sensible à cette initiative japonaise (comme j’ai été sensible au fait que Slocum et Moi ait reçu récemment le Grand Prix au Tokyo Award Animation Festival, et un autre prix en Corée). C’est drôle que vous posiez la question car si, contrairement à beaucoup de compositeurs, je ne me sens pas attiré par les lumières hollywoodiennes, en revanche, je rêve depuis longtemps de poser mes notes sur un film japonais d’animation. J’espère que ça arrivera.
En parlant du Japon, que pensez-vous du travail des compositeurs japonais sur l’animation ?
J’ai omis de dire que la musique des compositeurs de cinéma japonais me laisse rarement insensible ! Dans des genres différents, ils ont intégré tous les codes de la musique occidentale, ça chante à tous les étages, les orchestrations sont superbes et leur musique est très vibrante. De surcroît, ils gardent leur personnalité en traitant souvent des thèmes hérités de leur tradition.
Grâce à l’évolution technologique, les jeux vidéo peuvent maintenant bénéficier d’une véritable musique symphonique. Seriez-vous intéressé par ce genre de projet vidéoludique ?
Je ne ferme pas la porte à ce genre de projet, mais on ne m’en a jamais proposé.
Fin mars 2025, vous étiez présent au Luxembourg City Film Festival, et précédemment au Festival d’Annecy. Avez-vous constaté une évolution quant au regard porté par le public sur la musique de film ? Les spectateurs vous parlent-ils de votre travail ?
Oui, et cela me touche qu’à l’issue de ces interventions, des gens – dont beaucoup de jeunes compositeurs et compositrices – viennent me voir pour me dire leur attachement à la mélodie et à l’orchestration. Ils ont pleinement conscience du rôle de l’élément mélodique dans la narration.
Pouvez-vous nous parler de vos futurs projets, qu’ils soient pour l’image ou non ?
Ce qui m’occupe l’esprit en ce moment, c’est notamment un projet de conte musical avec l’ONB.
Quels conseils donneriez-vous à un jeune qui envisagerait de se lancer dans la musique de film ?
Je conseille souvent d’être à l’affût des courts-métrages de jeunes réalisateurs, afin de nouer des contacts. Je crois beaucoup, d’un point de vue créatif, au binôme réalisateur/compositeur, aux collaborations durables. A cet égard, j’ai noté des initiatives visant à adosser les classes de musique de film aux écoles de cinéma. Je pense que c’est une excellente chose.
Pour en savoir plus : la page Youtube de Pascal le Pennec.
Entretien réalisé en mars 2025 par Franck Le Roux
Illustrations : © DR / Pascal Le Pennec
Remerciements à à Pascal Le Pennec pour sa gentillesse et sa sincérité.