Vaste sujet que tu nous proposes là, cher Krull ! Il va falloir jouer serré pour ne pas se lancer dans d'interminables digressions. Je vais quand même me lancer mais bon courage à ceux qui voudront bien me lire...
Pour ma part, comme je l'ai déjà dit dans l'autre topic, j'ai tendance à préférer la musique symphonique. Pendant toute mon enfance et mon adolescence j'ai écouté de la musique classique, essentiellement celle du XIXe siècle, depuis Felix Mendelssohn jusqu'à Gustav Mahler. J'avais avant tout besoin que la musique, comme les livres, comme les films, comme la peinture, me raconte des histoires, et j'écoutais surtout les compositeurs qui faisaient de la musique dite "à programme", par le biais de la symphonie ou du poème symphonique : Berlioz, Liszt, Saint-Saëns, Bruckner, Tchaikovsky, Rimsky-Korsakov, Debussy, Richard Strauss... A partir de là mon oreille s'est "hélas" totalement formatée ; je dis "hélas" car cela m'a rendu souvent hermétique à d'autres genres musicaux et j'ai du mal à apprécier ce que l'ensemble de mes amis et la plupart des gens apprécient. Vous imaginez bien les difficultés de communication et la frustration des deux partis mais c'est plus fort que moi : je vais avoir tendance à trouver tout autre type de musique pauvre, insignifiant, ennuyeux voire déprimant...
Dans la variété ou dans le rock (genres eux-mêmes très variés, riches et multiples, j'en ai tout à fait conscience), je ne retrouve pas assez ce qui me plaît, il n'y a pas toutes les couleurs chatoyantes que je vais trouver dans une musique composée de nombreux instruments différents ; et puis je préfère les instruments acoustiques aux instruments électriques ou synthétiques, je les trouve plus chaleureux, plus vivants. Par ailleurs le format chanson ne me convient pas, c'est trop court, ça ne permet pas de développer assez d'idées musicales différentes, assez de mélodies, assez de sonorités variées, on est contraint de fonctionner avec quelque chose de bref, de direct, d'immédiatement mémorisable... J'aime que la composition prenne son temps - le temps nécessaire à une vraie histoire -, s'étende majestueusement jusqu'au format symphonie. Gustav Mahler, décidément mon compositeur favori, disait que pour lui, écrire une symphonie équivalait, en utilisant tous les moyens à sa disposition, à bâtir un monde.
Cette ampleur, tant dans les proportions de l'oeuvre que dans le nombre d'instruments qui l'interprètent, me paraît bien correspondre au genre ou au registre que je préfère, à savoir l'épique. J'ai besoin de trouver dans la musique ce qui peut exprimer, plus éloquemment que tout autre forme d'expression artistique, ce qui dépasse l'humain, ce qui a trait au mythologique, au religieux, au merveilleux... J'ai besoin du rêve, de l'évasion, et il est sûr que les genres musicaux les plus populaires, qui passent presque systématiquement par la chanson, me semblent trop "petits", à dimension trop humaine : je ne vois et n'entends rien d'autre que quelqu'un qui chante ou qui joue d'un instrument, et ce quelqu'un pourrait être mon voisin de palier, mon collègue, un élève...
![Mort [dead]](./images/smilies/icon_dead.gif)
Quand l'orchestre joue, j'ai affaire à une entité qui dépasse la somme de ses composants, une chose autonome, presque surnaturelle, qui me raconte des histoires surnaturelles... Et non, je n'ai rien fumé !
Après, même si je renie totalement des genres comme le rap et la techno, que je trouve affreusement pauvres à tous points de vue mais détestables avant tout parce qu'ils ne proposent rien de ce qui me plaît, je ne suis pas fermé et j'apprécie ponctuellement certains chanteurs, je peux goûter ce qui vient du jazz, du
new age, du
metal, de la
world music (qui là encore n'est pas une mais multiple, donc c'est presque absurde de la considérer comme un seul ensemble), etc... Surtout, j'apprécie quand ces différentes influences se mêlent pour former un résultat inédit, hybride, c'est là l'un des avantages de la musique de film que l'on se permet trop peu ailleurs. Maintenant que j'ai dit tout ça, ce que je vais aimer en matière de musique de film devient assez prévisible mais il y a bien sûr quantité d'exceptions liées à un coup de coeur imprévu, à une découverte, et tout simplement au fait qu'une musique fonctionne pleinement dans un film et provoque des émotions fortes, bien qu'elle ne corresponde pas à mes critères
a priori.
Je suis donc prisonnier d'une forme, mais j'ai droit à quelques échappatoires de temps en temps !
Bon, pour redescendre un peu sur terre, je vais quand même prendre des exemples concrets ! Si je n'ai pas aimé
The Social Network, c'est parce que : 1) son aspect électro et planant, que je peux apprécier dans d'autres partitions, lui confère un aspect glaçant, aride et ennuyeux qui me rebute ; 2) je ne l'ai pas écoutée en dehors mais dans le film j'ai trouvé qu'elle ne servait à rien, qu'elle ne jouait aucun un rôle, elle m'a paru insipide. Mais que ses défenseurs se rassurent, elle gagnera quand même l'Oscar... grâce à ma poisse, car cette récompense va toujours au score, sur les cinq, que j'apprécie le moins !

Si je n'ai pas aimé
Inception, c'est parce que : 1) elle faisait partie d'un film que dans l'ensemble je n'ai pas aimé ; 2) au contraire de la précédente, elle était beaucoup trop présente dans plusieurs séquences, écrasante et manquant de subtilité ; dans le reste du film, elle me donnait juste envie, comme les personnages, de dormir...
Voilà, c'est fini !
