Enthousiasmé par un aparté avec le shériff, je déplie un sujet sur le dernier film de John Woo.
C'était déjà pas évident, il y a 4/5 ans, de discuter de John Woo, sortant d'une période américaine qui est bien sûr la seule que la plupart des gens connaissent. Maintenant qu'il n'embauche plus Tom Cruise ou Ben Affleck, il est passé sous les radars de la grande partie des médias cinéma grand public. Silence assourdissant. Qui parle de la version longue des trois royaumes (ah si, IMPACT !) ? Qui a parlé VRAIMENT de la version courte ? On est en face de l'aboutissement de la carrière d'un cinéaste en totale possession de ses moyens, en état de grâce, face à un film qui n'est pas loin d'égaler Les Sept Samouraïs- avec lesquels il a plus d'un point commun. Nous sommes le seul pays hors asie- si j'ai bien compris- où les deux versions sont disponibles... Pour un résultat critique (puisqu'on en parlait dans un autre sujet) quasi nul à ma connaissance...
Et il semble que pour toujours, John Woo sera en France- hormis quelques plumes acérées- le mec qui filme des colombes au ralenti.
Alors si quelqu'un pense aussi que nous sommes face, avec les Trois Royaumes à une somme épique qui, en terme de mise en scène enfonce tout ce qui a été fait dans le genre depuis 10 ans (Peter Jackson c'est toi que je regarde !)qu'il lève son verre avec moi à la santé de John Woo !

J'ai bien l'intention de ne faire qu'une bouchée de la providentielle version intégrale parue chez HK, dans l'espoir qu'elle corrigera la désagréable impression de trop-peu que m'avait laissée le film lors de sa sortie en salles. Car, même si Les Trois Royaumes est sans conteste une fresque ample, généreuse et incroyablement spectaculaire (les multiples scènes de bataille laminent la concurrence, tout comme les flingages des grandes années hongkongaises de John Woo ont atteint des sommets inédits de virtuosité), je dois avouer, à mon grand dam, n'y avoir retrouvé qu'une infime portion du lyrisme inouï qui m'avait tant chaviré dans The Killer ou Une Balle dans la Tête. La faute, peut-être, à cette monstrueuse logistique qui semble vouloir asphyxier l'émotion dès qu'elle promet d'affleurer.

Ca y est, je viens de voir la fameuse version intégrale du rouleau-compresseur de John Woo. Les scènes de bataille, bien évidemment, sont plus homériques que jamais (c'est carrément le A Toute Epreuve du film en costumes, les enfants !), mais les passages inédits censés densifier le récit s'avèrent quelque peu inégaux, entre découvertes bienvenues (la psychologie plus fouillée de l'ambitieux Cao Cao, les terribles enjeux au centre du vol des 100 000 flèches) et moments intimistes plutôt dispensables (la relation entre la princesse infiltrée dans le camp ennemi et un bénêt). Quant à l'émotion, il n'y a décidément rien à faire, le film n'en dispense toujours que de maigres quantités, au grand désarroi du monstrueux fan de Woo que je suis.