Philippe Sarde

[Lee Van Cleef]

Il y avait aussi un drôle de synthé dans Quelques jours avec moi qui faisait Gloup-gloup (je ne pense pas que c'était un moog). Oui, comme ça, ça donne pas forcément envie, mais c'est finalement très réussi et ça apporte au film un cachet spécial, surtout quand il est mélangé avec un grand orchestre.

J'ai revu le film il y a quelques jours (une réussite, d'ailleurs, bien qu'il ne fasse pas vraiment partie de mes Sautet favoris), et c'est vrai que les sonorités employées pas Sarde sont des plus curieuses, au point que j'ai éprouvé quelque peine à y adhérer pleinement. Je ne suis en tout cas pas certain de vouloir tenter l'expérience d'une écoute isolée.

[Taboulez]

Je suis assez d'accord avec Julien pour dire que les synthés et Sarde c'est pas la grande joie.
Eve of Destruction est, pour moi, un des pires travaux du compositeur (mis à part le beau thème secondaire, un peu mélancolique, qui est d'ailleurs très bien utilisé dans les séquences de flashbacks de l'androïde, y apportant un vrai plus émotionnel), le thème (au synthé solo) de Quelques Jours avec moi est assez horrible (comme le souligne Odelay, c'est en effet déjà bien meilleur dans les morceaux à 90% acoustiques), de même que ce qui est fait dans Mon beau Frère a tué ma Soeur... Et je trouve que la partition de César et Rosalie est gachée par le moog justement.

Je préfère largement l'orgue électronique utilisé dans L.627, notamment dans la longue piste "Lulu et Katy".


PS: Ceci dit ça m'étonnerait pas plus que ça, vu ses goûts parfois un peu déviants, que Julien apprécie malgré tout la partition d'Eve of Destruction (lui qui aime déjà le moog de César).

[Martial]

Eve of destruction est un score mineur et Sarde ne sait pas vraiment intégrer les synthés au reste de l'orchestre. Parfois on est un peu dans la bouillie synthético-orchestre ! Mais je ne suis pas du tout d'accord avec Taboulez sur Quelques Jours avec moi et César et Rosalie !

[Homer]

EMais je ne suis pas du tout d'accord avec Taboulez sur Quelques Jours avec moi et César et Rosalie !

Moi non plus, et en particulier sur ce dernier : si j'aime cette partition, c'est justement grâce à ce mélange d'orchestre et d'effets synthétiques très ancrés dans les 70's. Peut-être est-ce également dû au fait que j'adore ce film (et l'oeuvre de Sautet en général), mais je trouve vraiment cette musique en adéquation parfaite avec le film.

[Julien]

Je l'aime bien moi aussi ce moog. En particulier sur le générique d'ouverture, avec la peinture du coucher de soleil. Ça fait très impressionniste. D'ailleurs il me semble que les premières mesures du thème font référence à "La fille aux cheveux de lin" de Debussy. A l'époque, il a été l'un des premier compositeur en France à avoir utilisé le moog je crois. C'était pas tellement courant. Il aurait pu continuer à expérimenter. Bon à l'évidence, il était beaucoup moins intéressé par les sonorités synthétiques qu'un De Roubaix par exemple.

Eve of Destruction est, pour moi, un des pires travaux du compositeur (mis à part le beau thème secondaire, un peu mélancolique, qui est d'ailleurs très bien utilisé dans les séquences de flashbacks de l'androïde, y apportant un vrai plus émotionnel

Le thème rythmique, appuyé par les percussions (Je crois qu'il y a un mélange de percussions synthétiques et acoustiques) est quand même pas mal du tout. Celui que l'on entend sur le générique de fin avec le thème au saxo. Ça anticipe un peu sur la musique de L 627.

[Walden]

écoute de l'album Sautet / Sarde concocté par Sarde et Lerouge, la relation exemplaire d'un metteur en scène et de son compositeur ?

[Walden]

les délices ravéliens/debussystes du CHOIX DES ARMES sont redoutables, et ce mélange avec le jazz...Sarde, maître d’œuvre des brassages les plus fous...pour le plus grand bonheur d'un grand mélomane comme Alain Corneau (un de nos très grands cinéastes) ! Et je ne parle pas du paysage lyrique de FORT SAGANNE, le violoncelle de Xavier Gagnepain, la splendeur méditative et les élans romantiques du London Symphony Orchestra...Encore une fois, avec Philippe, c'est énooorme, fabuleux !

[Odelay]

Triste nouvelle aujourd'hui que la disparition d'Alain Corneau pour lequel Philippe Sarde avait écrit deux partitions extraordinaires (Le Choix des Armes et Fort Saganne) qui font toutes les deux parties de mon top 10 tout compositeurs confondus. Ce fous de musique l'avait vraiment inspiré.

[Dadid]

Ah oui, et si on y ajoute "Police Python 357" de delerue, M. Corneau aura décidément influencé quelques merveilles.

[Starfe]

une rencontre avec Philou et Tatave orchestrée par Lerouge au Forum des Images le 24 novembre!

faut vraiment que j'arrive à me liberer ce soir là...

[Walden]

sniff, pourquoi je peux pas être à Paris ce jour là ???

[Odelay]

Oh punaise!
C'est noté

[Dadid]

Je n'ai pas vu le film, mais les extraits proposés sur Amazon me plaisent bien par leur côté proche de la musique de l'époque. Je suis tenté... De bons camarades ayant vu le film ou acheté le CD pourraient-il m'honorer de quelques commentaires avisés (ou pas ) ?

[Taboulez]

Je n'ai pas vu le film, mais les extraits proposés sur Amazon me plaisent bien par leur côté proche de la musique de l'époque. Je suis tenté... De bons camarades ayant vu le film ou acheté le CD pourraient-il m'honorer de quelques commentaires avisés (ou pas ) ?

On peut écouter l'album intégral sur Deezer depuis peu, pour se faire une idée .

Bon sinon, je sais que Martial et Odelay notamment ne partagent pas cet avis, mais pour ma part je suis pas franchement emballé, c'est même plutôt le contraire.
Globalement j'ai parfois eu l'impression d'écouter une sorte d'amalgame entre du Coulais et l'aspect ethno-celtico-worldmusic de Horner (on est d'ailleurs pas si loin parfois du Juge Fayard qui anticipait déjà avec 15 ans d'avance le Braveheart de Horner)...

À mon avis la responsabilité de cet échec (un échec à mes yeux en tout cas) relève au moins autant de Tavernier que de Sarde lui-même. À la base il y a déjà le désir d'épure de Tavernier (aboutissant à réduire la formation vers l'austérité: pas de violons, ni même de larges sections de bois qui auraient pourtant permis d'insuffler tellement plus de chatoyance et de couleur !), ce qui restreint de facto la marge de manoeuvre de l'ami Philippe... mais le problème c'est que Sarde lui-même commet plusieurs maladresses esthétiques, comme ces incessants ostinatos qui, confiés à un pupitre de corde aussi terne (en raison de la formation austère donc), ont pour résultat de sonner un peu cheap façon Bruno Coulais ou Jeremy Soule... alors quand en plus on y ajoute un nappage d'esthétique ethno-troubadour, et de pulsation parfois presque pop, ça finit par ressembler à ces musiques de film à la mode ces derniers temps, avec tous les travers que ça implique ...


Heureusement quelques beaux moments viennent sauver l'honneur comme:
- les toutes dernières mesures d' "Après la Bataille" pour le côté quasi-stravinskien
- toutes les variations du thème de la princesse ("Sous le Charme de Guise", la première partie de "Il ressemblait à Henri de Guise", "Contre l'Arbre/La Leçon") où l'on retrouve l'écriture Sardienne, un peu de son raffinement et de ce son à la rondeur langoureuse, coutumière du compositeur.
- "Bataille", le morceau surprenant de la partition (ses percussions, son aspect chaotique et puis ce cuivre décalé, qui peut même rappeler à l'occasion le fameux cor de chasse du Crabe Tambour)

Voilà.

Décidément si même les grands compositeurs se mettent à tomber dans les pièges esthétiques de la musique de film actuelle (je me souviens que ça m'avait déjà fait le même effet avec quelques morceaux du récent Baaria de Morricone)...
Heureusement que j'avais eu l'occasion d'écouter pas mal d'extraits depuis ces dernières semaines, du coup je savais un peu à quoi m'attendre concernant ce Montpensier, parce que si j'avais découvert ça d'un coup, je crois que j'aurais été assez refroidi (alors que sur un film de ce genre, si Tavernier n'avait pas bridé son compositeur, on aurait sans doute pu avoir droit à une partition romanesque splendide dans l'héritage de L'Ours par exemple !).

[Odelay]

Je suis d'accord avec la 2ème ligne de Taboulez où il dit que je ne serai pas d'accord.

N'étant pas un énorme fan de L'Ours (la musique) que j'ai toujours trouvé un peu trop brouillon, c'est peut être pour cela que j'aime tant cette nouvelle partition.

[Dadid]

Dadid dit : merci ! Je vais donc écouter plus largement pour me faire une idée.

[Janus]

Décidément si même les grands compositeurs se mettent à tomber dans les pièges esthétiques de la musique de film actuelle (je me souviens que ça m'avait déjà fait le même effet avec quelques morceaux du récent Baaria de Morricone)...

Dans BAARIA? Où ça?

[Beetlejuice]

Hé hé hé ! J'me doutais bien que Maître Janus réagirait tôt ou tard ...
Par contre pas d'avis sur la récente édition de "the giustiziere" (the human factor de Dmytryk, 1975) dans le topic dédié (génial stakhanoviste)?!
Janus hiberne ou quoi ?

[Janus]

Hé hé hé ! J'me doutais bien que Maître Janus réagirait tôt ou tard ...
Par contre pas d'avis sur la récente édition de "the giustiziere" (the human factor de Dmytryk, 1975) dans le topic dédié (génial stakhanoviste)?!
Janus hiberne ou quoi ?

Je suis sur plusieurs feux,c'est le cas de le dire car ma cuisine est en train de brûler,du coup!

J'ai écouté des secondes d'extraits de la dernière B.O. de SARDE et le début du thème "La bataille" m'a un peu fait penser dans l'esprit à un morceau symphonique aux sonorités asiatiques et sur une rhytmique bancale que MORRICONE a composé sur MUSASHI,un thème que j'adore d'ailleurs! (celui de Morricone) Seulement dans BAARIA,c'est une partition très classique dans ses orchestrations,même si le tout premier extrait,on entend un instrument peu usité qu'est la Ciaramolla.Quand au second morceau,il reprend un thème qu'il avait écrit dans les années 70 pour un film des frères TAVIANI; ALLONSANFAN dans une version plus symphonique et néo-verdienne. Rien qui correspond aux "pièges esthétiques" de la musique de film actuelle au sens où l'entend Taboulez...et je dis ça bien que MORRICONE a toujours été sensible aux différentes modes des époques qu'il traversa,comme SARDE,ce qui personnellement m'a toujours paru être davantage une qualité qu'un défaut. Mais bon,peut-être que Taboulez a écouté des remix!

[Beetlejuice]

Tu cuisinais pas du taboulé, au moins ?!

[Julien]

Pour l'aspect ethno-troubadour ou World music, je trouve que c'est un peu plus subtil que ça quand même. Il y a une vraie richesse dans l'orchestration. Pas mal de flûtes, de percussions diverses et surtout une utilisation intéressante du violoncelle qui apporte une certaine gravité au film. Les violons sont tellement employés dans ce type d'histoire romanesque que ça en devient souvent un cliché. Je pense qu'il a voulut éviter cet écueil en les mettant en retrait. Le seul passage que j'ai trouvé peut-être un peu casse-gueule c'est sur le générique de fin où l'on entend une sorte de plain-chant médiéval, entonné par un chœur, sur un rythme de danse ; mais sinon j'ai trouvé que c'était quand même pas si mal et puis c'est une musique qui s'intègre bien au film qui lui même d'ailleurs n'est pas non plus exceptionnel.

J'ai écouté des secondes d'extraits de la dernière B.O. de SARDE et le début du thème "La bataille" m'a un peu fait penser dans l'esprit à un morceau symphonique aux sonorités asiatiques et sur une rhytmique bancale que MORRICONE a composé sur MUSASHI

Dans l'instrumentation ça n'a rien à voir mais au niveau du rythme ça me fait un peu penser à du mambo-jazz comme ce que l'on peut entendre dans les musiques de Misraki ou certains trucs de Masaru Satô. En tout cas ce morceau est vraiment pas mal, surtout les passages où l'on entend une sorte de trompe de chasse, un peu étouffée par dessus la rythmique.

[Janus]

Les violons sont tellement employés dans ce type d'histoire romanesque que ça en devient souvent un cliché.

Là,je m'avance en aveugle car je n'ai écouté cette musique de SARDE que par bribes,mais,sur le principe,je suis d'accord avec toi. J'ai eu vent de ce parti-pris lancé comme un défi à SARDE par TAVERNIER et c'est justement la raison précise pour laquelle j'ai réellement envie de découvrir cette composition. C'est souvent ce type de contrainte qui permet à un musicien d'élaborer une approche qui sort des sentiers battus,de s'écarter ainsi des chemins balisés d'une musique en costume ordinaire avec sa dose de lyrisme attendu et prévisible. Les compositeurs,je les préfère davantage lorsqu'ils s'encanaillent plutôt que lorsqu'ils s'embourgeoisent et s'enlisent dans un "bon goût" institutionnalisé. Je pense qu'il n'y a rien de mal (bien au contraire) à ce qu'un compositeur reste perméable aux "perversions" de son époque à partir du moment où c'est fait avec méthode,talent et conviction. J'ai toujours perçu la B.O. comme une sorte de carrefour où se croisent tous les genres musicaux allant des formes élitistes de la musique savante aux formes plus spontanées et temporelles de la musique populaire.Contrairement à la musique savante,la musique de film n'a pas pour but ultime ou vocation première d'être nécessairement intemporelle au sens où on l'entend habituellement et c'est justement pour les raisons évoquées ci-dessus qu'elle est un art unique et inclassable.

[Dadid]

N'écoutant que mon courage (et The Hawaiians qui tourne sur ma platine) , j'ai finalement passé commande. Pour les belles choses entendues dans les brefs extraits que j'ai écoutés (même si le générique de fin à un petit côté "les visiteurs" ), et puis je ne voudrais pas qu'une future musique de Sarde demeure inédite parce que...

[Beetlejuice]

Là,je m'avance en aveugle car je n'ai écouté cette musique de SARDE que par bribes,mais,sur le principe,je suis d'accord avec toi. J'ai eu vent de ce parti-pris lancé comme un défi à SARDE par TAVERNIER et c'est justement la raison précise pour laquelle j'ai réellement envie de découvrir cette composition. C'est souvent ce type de contrainte qui permet à un musicien d'élaborer une approche qui sort des sentiers battus,de s'écarter ainsi des chemins balisés d'une musique en costume ordinaire avec sa dose de lyrisme attendu et prévisible. Les compositeurs,je les préfère davantage lorsqu'ils s'encanaillent plutôt que lorsqu'ils s'embourgeoisent et s'enlisent dans un "bon goût" institutionnalisé. Je pense qu'il n'y a rien de mal (bien au contraire) à ce qu'un compositeur reste perméable aux "perversions" de son époque à partir du moment où c'est fait avec méthode,talent et conviction. J'ai toujours perçu la B.O. comme une sorte de carrefour où se croisent tous les genres musicaux allant des formes élitistes de la musique savante aux formes plus spontanées et temporelles de la musique populaire.Contrairement à la musique savante,la musique de film n'a pas pour but ultime ou vocation première d'être nécessairement intemporelle au sens où on l'entend habituellement et c'est justement pour les raisons évoquées ci-dessus qu'elle est un art unique et inclassable.

Alors là, bravo Janus, je ne saurai dire mieux, je m'incline devant cette prose à laquelle j'adhère totalement

[Julien]

En tout cas on est quand même loin de la musique synthétique à la Hans Zimmer, que l'on aurait pu craindre, ainsi que du modernisme radical du Danton de Prodromides. En somme, Philippe Sarde fait du Philippe Sarde et reste plutôt fidèle à son style habituel.