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avec la crise, l'industrie américaine du rêve s'adapte...
Enquête
Hollywood fait sa mue
LE MONDE | 16.12.09 | 15h55 • Mis à jour le 16.12.09 | 19h49
in 2009, les recettes en salles du cinéma américain pour l'année frisent les 10 milliards de dollars (près de 6,88 milliards d'euros). La Princesse et la grenouille, titre avec lequel Disney renoue avec l'animation traditionnelle, a déjà rapporté 25 millions de dollars. La Fox saura bientôt si elle a eu raison d'investir entre 250 et 500 millions de dollars, selon les évaluations, dans Avatar, le nouveau film de James Cameron qui sort aux Etats-Unis le 18 décembre. La Warner savoure les succès d'Harry Potter 6 et de Very Bad Trip, qui ont placé le studio en tête des majors pour 2009, et Sony a repris du poil de la bête grâce à son documentaire sur Michael Jackson, This Is It.
La sagesse populaire hollywoodienne, telle que l'exprime Steven Spielberg dans Le Monde, veut que "Hollywood résiste très bien en période de crise économique, et ce depuis la Grande Dépression, où le cinéma a offert un divertissement au monde entier".
Mais la crise ne s'arrête pas aux portails monumentaux des studios californiens. Les recettes générées par les ventes de DVD continuent de baisser : selon Digital Entertainment Group, de 9 % en 2008, et de 13,5 % au premier semestre 2009. La part de marché du cinéma américain en dehors des Etats-Unis stagne ou diminue. Adossés à des groupes industriels, les studios doivent supporter leur part des économies que Comcast (Universal), Time Warner ou Sony ont décidées dans le sillage de la crise financière.
Sumner Redstone, PDG de Viacom, propriétaire de Paramount et de CBS, a dû vendre près de 1 milliard de dollars d'actions pour faire face à ses dettes. Sony a gelé les acquisitions de scénarios ou de droits d'adaptation jusqu'au début d'avril 2010, et resserré les budgets des films en cours.
Ces menaces ont suscité un vent de panique, qui s'est traduit, en 2009, par une valse des dirigeants et des recompositions capitalistiques. Le 5 octobre, Universal a remercié les deux responsables de la production cinéma. Cette purge était le prélude à la vente par Vivendi des 20 % que la firme française détenait dans le capital du studio. Désormais propriété de Comcast et de General Electrics, Universal est à nouveau un studio 100 % américain, comme ses pairs, à la notable exception de Sony - le japonais est toujours propriétaire de la Columbia et de Tristar.
Quelques semaines avant les convulsions d'Universal, Disney licenciait sans préavis le président du studio Dick Cook, trente-huit ans de maison. Robert Iger, le PDG de la Walt Disney Company, citait la mauvaise performance du studio : avant-dernier des majors, avec seulement 11,7 % de parts de marché. La purge continue avec le licenciement du responsable du studio Marvel, le département cinéma de l'éditeur de comics (Spider-Man, Hulk, Iron Man...), récemment racheté par Disney.
M. Cook a été remplacé par Rich Ross, venu de la chaîne de télévision Disney Channel. C'est justement à la télévision que Disney va chercher ses nouvelles stars pour adolescents, Miley Cyrus (de la série "Hannah Montana") ou Zac Efron, révélé par le feuilleton, "High School Musical".
Cette valse des "costumes", comme les appellent avec mépris et crainte les cinéastes et les acteurs, se double d'une réflexion stratégique. Avec ses studios d'animation, Disney Animation et Pixar, pilotés par John Lasseter, brillant réalisateur de Toy Story et de Cars, Disney est l'exemple d'une major en pleine transition.
D'un côté, La Princesse et la grenouille, un dessin classiquement animé, de l'autre, Le Drôle de Noël de Scrooge, un film qui utilise les images créées par ordinateur et la performance capture, qui permet de modifier l'apparence des comédiens. C'est un prélude à la sortie d'Avatar dans des salles équipées de projecteurs numériques et en relief. Le succès du film, qui a nécessité, selon le New York Times, 500 millions de dollars d'investissements - dont une bonne part a été consacrée à mettre au point de nouveaux outils - sera décisif pour la Fox.
C'est dans ce contexte instable, entre anciens et nouveaux médias, grands et petits écrans, formats numériques ou analogiques, qu'Hollywood cherche à reconfigurer son modèle. Côté diffusion, les studios commencent à se départir de leur ancienne méfiance vis-à-vis de la vidéo à la demande.
Warner annonce des résultats de vente en ligne encourageants, avec six millions de transactions (soit 30 millions de dollars) pour Gran Torino, le film de Clint Eastwood. Et Disney envisage de nouveaux modes de distribution, comme ce digital cloud (nuage numérique), une plate-forme qui permettrait de télécharger des films vers des supports multiples : magnétoscopes, ordinateurs ou supports mobiles.
Les studios réduisent aussi les salaires des stars. L'inflation des cachets, évidente depuis le début des années 1980, due à la puissance des agences artistiques qui représentent les stars, connaît un coup d'arrêt en raison de la crise financière et des échecs répétés de films mettant en vedette Julia Roberts (Duplicity) ou Eddie Murphy (Dans ses rêves). Les studios sont de plus en plus réticents à verser des dizaines de millions de dollars de cachets, auxquels s'ajoutent les pourcentages perçus dès le premier dollar de recettes.
Le terme de star power laisse la place à l'expression branded entertainment : la distraction de marque. Le prototype de ces nouveaux films est Pirates des Caraïbes, inspiré d'une attraction des studios Disney. Sont ensuite venus des films mettant en valeur des jouets (Transformers, G.I. Joe) ou des héros de feuilletons pour enfants ("Hannah Montana" ).
Il faut ajouter à la liste de ces marques les vieux feuilletons télévisés ("Star Trek") ou les personnages de bande dessinée (tout le panthéon Marvel). Plutôt que de reposer sur les épaules fragiles de vedettes, la notoriété des films dépend de la notoriété de marques. On attend des longs métrages tirés du Monopoly...
Il est probable que ces films, forcément coûteux, drainent les ressources des studios. En conséquence, ceux-ci ont presque tous fermé les divisions dédiées à la production de films d'auteur : Warner Independent ou Paramount Vantage ne sont plus que des souvenirs.
Cette année, la course aux Oscars est plus ouverte que jamais du fait de la raréfaction de ces films à moyen budget interprétés par des vedettes, comme en produisaient les frères Weinstein à la belle époque de Miramax. Et le succès d'un distributeur indépendant, Summit Entertainment (4,7 % de parts de marché) ne peut faire croire à une renaissance du cinéma d'auteur : il repose presque entièrement sur les recettes de la saga à succès Twilight.
Cette instabilité affecte aussi l'organisme qui représente les majors, la Motion Picture Association of America (MPAA), qui doit réduire son budget de 20 %. Son président, Dan Glickman, annonce son départ en septembre 2010. Parmi ses successeurs possibles, Arnold Schwarzenegger, dont le mandat de gouverneur de Californie s'achève à la fin de l'année 2010.
Une transition qui devrait permettre à la MPAA de repenser son rôle de représentation des majors, qui appartiennent tous (sauf Disney) à des conglomérats dont les intérêts divergents sont de plus en plus difficiles à gérer.
Steven Spielberg considère néanmoins la situation avec sérénité : "Nous traversons simplement un nouveau cycle. Hollywood a toujours peur des nouvelles technologies tant qu'elles n'ont pas fait leurs preuves, comme les dinosaures numériques de "Jurassic Park", qui ont inauguré l'âge numérique."
Le succès phénoménal de Paranormal Activity, premier film d'un inconnu, réalisé avec un budget de 15 000 dollars, et qui a accumulé plus de 100 millions de dollars de recettes en deux mois, rappelle que le cinéma reste une industrie de prototype et semble donner raison à Spielberg. On dit que c'est lui qui, à l'époque où sa société de production DreamWorks avait acquis les droits du film, a eu l'idée de cette fin paranormale...
Claudine Mulard (correspondante à Los Angeles) et Thomas Sotinel
Article paru dans l'édition du 17.12.09
Hollywood fait sa mue
Hollywood fait sa mue
BRAINSTORM main title (James Horner)
http://www.youtube.com/watch?v=HMj_80T6cyg
Film composer great Elmer Bernstein (Magnificent Seven, To Kill A Mockingbird) once said to me, “The dirty little secret is that we’re not musicians – we’re dramatists.”(Michael E Levine)
http://www.youtube.com/watch?v=HMj_80T6cyg
Film composer great Elmer Bernstein (Magnificent Seven, To Kill A Mockingbird) once said to me, “The dirty little secret is that we’re not musicians – we’re dramatists.”(Michael E Levine)