Si vous aimez un thème d'action,si vous en acceptez la mécanique,l'orchestration,l'architecture,la dynamique,si vous y êtes pleinement sensibles,il devient l'excitation émotionnelle,physique et intellectuelle qui va galvaniser une scène, disons,de poursuite,comme celle sur les toits,dans LES INCORRUPTIBLES,une excitation qui peut et risque fort de se poursuivre hors du contexte filmique,mais si le thème d'action est mauvais ou que vous n'y êtes pas réceptifs,ce qui n'est bien sûr pas la même chose,il devient aussitôt redondant,pléonastique,comme si un thème d'action pouvait être autrement que redondant ou pléonastique,comme si un thème d'angoisse sur une scène d'angoisse pouvait être autrement que redondant ou pléonastique,comme si un thème d'amour sur une scène d'amour pouvait être autrement que redondant et pléonastique...bien qu'il existe des films qui avec bonheur usèrent du contraste musical... La scène de l'explosion dans GIU LA TESTA de SERGIO LEONE,pour citer l'un des exemples les plus célèbres...puis,il y a le choix parfois judicieux de ne pas employer de musique...Dans BULLITT,l'idée de ne pas avoir plaqué un thème d'action sur la cultissime scène de poursuite en voitures,livrée aux seuls effets sonores,fonctionna à merveille. Pourquoi? Parce que les effets sonores composés de crissements de pneus et de bruits de ferrailles,devinrent,par leur densité,une sorte de musique bruitiste qui rythme l'action,rendant inutile toute intervention complémentaire du compositeur,en l'occurrence,LALO SCHIFRIN. Mais,chaque film demeure une aventure unique et ce qui est faisable chez les uns ne l'est pas chez d'autres. Ainsi,sur des actions franches comme celles que l'on rencontre dans le film de WOLFGANG PETERSEN,
IN THE LINE OF FIRE,où certaines scènes se devaient d'être phagocytéés par les compositions atonales d'ENNIO MORRICONE,le contre-pied ou l'absence de musique n'aurait pas fonctionné.
Maintenant,on pourra toujours démontrer des exemples de thèmes d'action de structure complexe,ayant à la fois un rôle
illustratif et suggestif. La seconde partie de "The dream and the deer" dans WOLF,un film de MIKE NICHOLS,en est un.
Le thème d'action,opérant dans un contexte onirique,quasi-surréaliste,ne se contente pas d'illustrer la poursuite et la capture de la biche par "l'homme-loup",mais évoque aussi le plaisir vorace de celui-ci enfonçant ses crocs dans sa chair...
L'effet est éloquent dans la mesure où ce "plaisir vorace et naturel" est << visible >> dans la composition de MORRICONE,
également pourvue d'une dimension naturalistique par un travail hors-pair sur les orchestrations et les timbres...un thème d'action qui ne montre pas l'horreur de la capture mais la jubilation d'un "loup presque louga" affamé assaillant sa
proie...J'exulte!
De ENNIO MORRICONE,en matière de thèmes d'action très réussis,je citerai volontiers:
"Passaggi nel tempo" - IL GRANDE SILENZIO.1969
Un passage énorme dans "Altri,dopo di noi" de THE RED TENT.1970.
"Peirol,forza il blocco" - L'AVVENTURIERO. 1967
"Repressione di stato" - IL PREFETTO DI FERRO.1977
"Battaglia e Mar Rosso" - MOSE.1975.
"The chase" - WOLF.1994.
"Guerra ethnica" - RISOLUZIONE 819 .2008.
Bien sûr,j'aurais pu fonder mon propos avec des thèmes d'action écrits par d'autres compositeurs.
SALTO de WOJCIECH KILAR 1965.
"The storm" - DRACULA - WOJCIECH KILAR.
"Kuragins" - GUERRA E PACE de JAN A.P. KACZMAREK.
"Border crossing" - THE LAST RUN et ceux de LINK,entre autres,du formidable JERRY GOLDSMITH.
"Vers la ville" - L'ENFANT QUI VOULAIT ÊTRE UN OURS de BRUNO COULAIS,mon compositeur français de chevet,actuel,le plus audacieux et quel mélodiste,à mon goût. Une vraie personnalité musicale que l'on reconnait dès les premières mesures.
J'achèverai mon récit sur la diabolique "Valse" de AGONY de l'excellent ALFRED SCHNITTKE,parce qu'il faut
bien que je m'arrête quelque-part,même si c'est au coeur de l'action

et que j'aurais tellement d'autres exemples à citer.