Certes, et personne ne le nie en vérité; on ne demande pas à ce qu'un thème d'amour soit systématiquement du calibre du Prélude à l'après midi d'un Faune, nous sommes d'accord; et même sans viser très haut, le thème, modeste, débouchera peut-être sur une belle musique qui va nous émouvoir et qu'on adorera écouter, c'est possible,.. mais alors dans ce cas il ne faut pas faire passer l'oeuvre en question pour la neuvième merveille du genre, venir hurler à qui veut l'entendre qu'il s'agit de l'un des grand mètres étalon de sa discipline ou que sais-je encore, ceci sur la base d'une hiérarchie arbitraire et partiale qui ne repose sur pas grand chose de quantifiable ou d'un tant soit peu formel... Car tout de même c'est un peu de ce genre d'excès dont il s'agit dans le cas de la partition qui nous intéresse ici et du statut qui l'entoure... excès ou tout du moins disproportion en regard du contenu réel de la chose.Krull a écrit :mais cette "exigence" est loin d'être obligatoire dans le cadre d'un film et parfois même contre-indiquée !
Parce qu'en revanche les grands mètres-étalon du genre, précisément, parviennent la plupart du temps à rivaliser d'exigence avec ce qui se fait de mieux.
Pierre, je ne te prends pas de haut, tout au contraire, tu poses des questions, qu'elles soient sur le mode de la candeur ou sur celui de l'ironie, je me contente simplement d'y répondre, ne serait-ce parce qu'il ne s'agit pas exactement d'une conversation en privé et que le lecteur de ce fil n'est pas nécessairement au courant des allusions implicites (et donc élitistes) dans les références aux orchestrations d'untel ou untel. Si tu pratiques l'ironie il ne faut pas t'étonner que ton interlocuteur joue le jeu d'être taquin lui aussi.
Mais encore une fois il ne faudrait pas pour autant en tirer des conclusions hâtives. J'adore Prokofiev (et j'aime bien Chostakovitch), simplement ce n'est pas spécialement sur le terrain de l'orchestration perfectionniste que je viendrais louer ses mérites.
Ceci-dit pourquoi avoir choisi d'illustrer la musique populaire en allant piocher un morceau de soupe mixée par un DJ ? Il y a tant de chefs d'oeuvre et autres merveilles dans le domaine de la musique populaire, composés par les grands maîtres du genre comme Gismonti, Valle, Ogermann, Arrigo Barnabé, Hime, Lobo, Vannier, Jobim, Caymmi père et fils, Buarque, Piazzolla, Schifrin, Brouwer, Colombier, D.Ellis, et tant d'autres,... Il n'y a que l'embarras du choix.Full Moon a écrit :J'aime l'idée de pouvoir écouter à la suite Conan, les 5 pièces pour orchestre de Webern et un bon morceau d'Armin van Buuren. Dans tous ces cas les styles, les fonctions, le degré d'élaboration formelle et les présupposés esthétiques sont aux antipodes. Mais cela n'enlève de valeur à aucune de ces œuvres.
D'ailleurs la plupart de leurs plus hautes oeuvres à chacun font souvent recours aux mêmes accords, modulations et autres recherches harmoniques que les plus beaux fleurons de la musique savante,... mais ce n'est pas étonnant puisqu'eux aussi sortent des mêmes conservatoires, ont eu les mêmes professeurs (les N.Boulanger, Messiaen, Barraqué, Koechlin et consorts) et gardent à l'esprit les mêmes références,... pour confectionner de la belle et grande musique tout ce qu'il y a de plus populaire.
À vrai dire, sans même aller jusqu'à recourir aux meilleurs, piocher ne serait-ce qu'un bon petit morceau bien fait, plutôt qu'un bidule assez indigne, aurait sans doute été un peu plus correct et un peu moins méprisant vis-à-vis de l'idée qu'on peut se faire de la musique populaire qui, dans ses belles heures, demeure une vraie grande tradition musicale, et donc mérite mieux que ça.
Sinon bien sûr tu as raison, les exemples que tu as cité ne se voient retirer aucune valeur, mais ils n'en gagnent pas pour autant (!), ils restent ce qu'ils sont et ce qu'ils valent intrinsèquement. Si une musique est de la soupe DJ, ce n'est pas parce qu'on l'écoute juste après Webern (splendide orchestrateur lui aussi dans son genre) qu'elle devient autre chose que de la soupe

(Et qu'on ne me parle pas de fonction... Si on le désirait vraiment on pourrait écrire de la techno impressionniste, par exemple, superbement ouvragée, et qui ferait danser ou planer les gens avec tout autant d'efficacité, voir davantage encore)