Voilà! Le monstre est dévoré. Après une douce et sereine marche vers la paix et la liberté, j'ai suivi, avec
The Hoful Eight un chemin beaucoup plus tourmenté et horrifique vers l'enfer. Le cd fait quand même 72 minutes environ. Bon, évidemment, si on retire les dialogues et les quelques chansons, le score s'étend sur une durée plus raisonnable.

Mon lecteur cd est de bonne qualité, seul le programmateur est un peu défaillant, à moins que ce soit moi qui ne sache pas m'en servir. Pour le coup, il m'aurait été utile. Cela me renvoie sur deux oeuvres respectivement composées par
Heiner Goebbels et
Hans Werner Henze et entrecoupées par des narrations en allemand sans musique que, désormais, je ne peux plus vraiment éluder.

Passons à l'essentiel! En général, chez
Ennio Morricone, j'aime les cd d'une moyenne de 45 minutes - pas systématiquement biensûr - mais c'est une durée qui m'est idéale, je vais vous expliquer pourquoi: il y a toujours un thème (au minimum) que je vais avoir envie de réécouter en boucles, quatre ou cinq fois de suite. Je n'y peux rien, lorsque je kiffe un thème, histoire de parler comme ma fille, j'ai ce besoin immédiat de le répéter plusieurs fois. C'est ce qui est arrivé avec
The H8ful Eight. J'ai écouté "L'ultima diligenza di red rock - version intégrale", morceau complètement démentiel, et, fatalement, j'ai éprouvé ce besoin irrésistible de le réécouter en boucle, quatre fois en tout. La bête dure quand même 7'30". Donc, nous multiplions ces 7 minutes par 3 et on passe déjà d'un cd de 72 minutes environ à un cd de 93 environ.
Vers les 3 minutes de cette entrée en matière, il y a dans l'exploitation du thème principal si bien imaginé par ailleurs, une orchestration atypique. A ce moment-là, je lui ai trouvé une expression ironique et morbide à la fois. J'aime lorsque Morricone marie ces deux caractères,
Le Trio Infernal demeure un sommet du genre. Après, la musique se lâche complètement, avec beaucoup de fulgurance. Le morceau qui suit, intitulé "Overture" s'articule autour d'un motif de quelques notes, moment très obsessionnel qui s'enrichit des différents éléments de l'orchestre, nettement moins démentiel que le précédent mais qui a le mérite de maintenir un climat anxiogène. Le thème principal réapparaîtra dans différentes moutures, plus courtes et souvent aussi viscérales. Il y en a une plus "débonnaire" et dépouillée qui a selon moi son intérêt propre. Je ne m'arrêterai pas sur chaque extrait car je n'en suis qu'à une première écoute. Un autre thème important et imposant est "Neve - version intégrale". Bien qu'un peu trop long, j'aime ses différents rebondissements, son ambiance, ses combinaisons instrumentales, sa forme méandrique et alambiquée. C'est selon moi le thème qui fait référence à la partie orchestrale que Morricone avait composée pour
The Thing: une certaine écriture des cordes, une atmosphère, dans la première phase que l'on peut retrouver également dans la superbe musique qu'il composa pour le film TV d'Elio Petri;
Les Mains Sales. Mais, ici, c'est une toute autre orchestration et un tout autre développement. D'ailleurs, au début, une oreille attentive reconnaîtra le thème principal quasi-suggéré à la clarinette...peut-être basse... D'autre part, la même oreille attentive et connaisseuse remarquera que plus nous évoluons dans les méandres de ce long morceau, plus nous nous éloignons de l'"ambiance-The Thing" et plus nous nous approchons d'une ambiance qui évoque, sous certains aspects, celle si atypique de
Rampage. Sans être ce que je préfère dans cette B.O., j'aime beaucoup me vautrer dans ce type d'ambiance musicale sinueuse et très élaborée.
L'autre extrait qui, en dehors du premier, a gagné ma préférence est la plage 11, "Raggi di sole sulla Montagna". Celui-là est plutôt court, une merveille un peu frustrante que j'aurais voulue plus développée, une merveille mélodique et harmonique chiadée, entre tonalité et atonalité, avec une pincée de romantisme - attérissant sur cette musique comme un miracle d'humanité - et une pointe de poésie. Je l'ai réécouté trois fois de suite. Un troisième extrait provoqua chez moi un même engouement. Il est très différent puisqu'il s'agit d'un morceau d'action intitulé "L'inferno bianco". J' en aime particulièrement la construction rythmique très bancale lui donnant un aspect aléatoire ou faussement aléatoire. Ce n'est cependant pas la première fois qu'il explore cette technique particulière, déjà dans
In the Line of Fire et un peu aussi dans
Musashi. J'aime beaucoup la manière dont il est orchestré et le jeu corrosif d'un basson solo. Je l'ai écouté seulement deux fois de suite parce que je me suis rendu compte qu'il y en avait une reprise de même durée: très bien développé celui-là que ce soit dans la version I ou dans la version II. Le dernier extrait composé par
Ennio Morricone sur le disque est un trait sec et affirmatif d'une durée mémorable de 27 secondes. Je ne l'ai pas réécouté en boucle celui-là. Je me suis juste remis "L'ultima diligenza di red rock - version intégrale". Du coup, j'ai eu l'impression d'écouter un double-cd!
