Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Onfray s'enthousiasme pour un film, c'est assez rare pour être souligné !
MARIE ANTOINETTE SARKOZY
Journée harassante. Retour dans ma campagne après une journée de travail à Paris. En romain de l’Empire décadent, je me prépare de quoi dîner allongé devant la télévision et avise sur le programme Marie-Antoinette de Sofia Coppola. Je me souviens qu’au moment de la parution de ce film, la critique avait été méchante : si elle l’a été , je suppose que le film est bon… Donc : Chablis, bar à l’huile d’olive et cinéma.
Je n’aime pas beaucoup le septième art devenu l’art de l’argent, des producteurs, des financiers, des banquiers qui font la loi. Jadis, Baudelaire prévoyait que les bourgeois demanderaient un jour du poète rôti à manger : nous y sommes, les bourgeois sont devenus anthropophages, les notaires aiment le cinéma comme le piranha la chaire fraîche.
J’attends donc, dubitatif, les premières minutes du film dans lesquelles, la plupart du temps, tout est dit. Et là, magie, tout se trouve livré d’un seul coup, mais dans l’excellence : images magnifiques : de la peinture classique en mouvement et sur écran large , Lancret, Watteau et Fragonard vingt-quatre images seconde ; des couleurs pastels qui disent l’âme et l’esprit de la très jeune autrichienne mal mariée ; un montage intelligent, discret, subtil, qui suscite plus qu’il n’appuie et ne démontre ; un refus des scènes de violence et de sexe que prisent tant les producteurs ; une collection de signes subtils : clins d’œil, froncements de sourcils, esquisses de sourires, intonations, postures du corps, mimiques des faciès, jeu des masques qui illustrent les thèses du sociologue Erving Goffman sur la mise en scène de la vie quotidienne ; des séries de plans en cascade qui résument les dix mille pages de Pléiade des Mémoires de Saint-Simon ; une psychologie des personnages esquissée, mais vraie, au contraire des habituelles caricatures de personnages taillés à la serpe : un roi sans sexe et une reine voluptueuse, un monarque chasseur, serrurier, et une épouse contrainte à jouer un rôle qui ne lui convient pas : ce qu’on appellerait aujourd’hui un mariage forcé, et qui vaudrait à la dame l’onction de la bienpensance ; puis la Révolution qui construit un couple, atterré, à la hauteur, mais trop tard… Tout est juste dans ce film.
Juste aussi l’usage de la musique de la très contemporaine Marianne Faithfull qui rappelle, si besoin était, que cette histoire vaut pour comprendre la fin de la royauté et l’avènement de la révolution, certes, mais aussi, et surtout, pour saisir notre époque : les puissants qui nous gouvernent vivent dans une bulle et ignorent les misères et les malheurs du peuple qui souffre ; le désir, justement, de ce peuple qu’on entende sa plainte et qu’on lui apporte remède : il ne veut pas la République, ce peuple, mais du pain ; l’insolence extrême de la vie de la France d’en haut en regard de la misère de la France d’en bas ; la veulerie des courtisans qui lèchent le soulier du Roi, quel que soit le monarque – on reconnaît ici les ancêtres de quelques « intellectuels » fameux de notre époque avachie ; la politique internationale comme loterie qui ponctionne le petit pécule des pauvres. Tout ceci mènera, on le sait, à la Révolution et à l’échafaud.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, Sofia Coppola réussit un prodige avec un film sublime en tout : esthétique, historicité, véracité, philosophie politique, psychologie de moraliste, au sens de La Rochefoucauld, style, caractère intempestif au sens de Nietzsche… Le film a l’élégance de se clore sur la fuite de Versailles que suivent l’écran noir et le générique. Derrière cet écran noir se profile notre époque, et plus particulièrement son avenir possible…
Michel Onfray
MARIE ANTOINETTE SARKOZY
Journée harassante. Retour dans ma campagne après une journée de travail à Paris. En romain de l’Empire décadent, je me prépare de quoi dîner allongé devant la télévision et avise sur le programme Marie-Antoinette de Sofia Coppola. Je me souviens qu’au moment de la parution de ce film, la critique avait été méchante : si elle l’a été , je suppose que le film est bon… Donc : Chablis, bar à l’huile d’olive et cinéma.
Je n’aime pas beaucoup le septième art devenu l’art de l’argent, des producteurs, des financiers, des banquiers qui font la loi. Jadis, Baudelaire prévoyait que les bourgeois demanderaient un jour du poète rôti à manger : nous y sommes, les bourgeois sont devenus anthropophages, les notaires aiment le cinéma comme le piranha la chaire fraîche.
J’attends donc, dubitatif, les premières minutes du film dans lesquelles, la plupart du temps, tout est dit. Et là, magie, tout se trouve livré d’un seul coup, mais dans l’excellence : images magnifiques : de la peinture classique en mouvement et sur écran large , Lancret, Watteau et Fragonard vingt-quatre images seconde ; des couleurs pastels qui disent l’âme et l’esprit de la très jeune autrichienne mal mariée ; un montage intelligent, discret, subtil, qui suscite plus qu’il n’appuie et ne démontre ; un refus des scènes de violence et de sexe que prisent tant les producteurs ; une collection de signes subtils : clins d’œil, froncements de sourcils, esquisses de sourires, intonations, postures du corps, mimiques des faciès, jeu des masques qui illustrent les thèses du sociologue Erving Goffman sur la mise en scène de la vie quotidienne ; des séries de plans en cascade qui résument les dix mille pages de Pléiade des Mémoires de Saint-Simon ; une psychologie des personnages esquissée, mais vraie, au contraire des habituelles caricatures de personnages taillés à la serpe : un roi sans sexe et une reine voluptueuse, un monarque chasseur, serrurier, et une épouse contrainte à jouer un rôle qui ne lui convient pas : ce qu’on appellerait aujourd’hui un mariage forcé, et qui vaudrait à la dame l’onction de la bienpensance ; puis la Révolution qui construit un couple, atterré, à la hauteur, mais trop tard… Tout est juste dans ce film.
Juste aussi l’usage de la musique de la très contemporaine Marianne Faithfull qui rappelle, si besoin était, que cette histoire vaut pour comprendre la fin de la royauté et l’avènement de la révolution, certes, mais aussi, et surtout, pour saisir notre époque : les puissants qui nous gouvernent vivent dans une bulle et ignorent les misères et les malheurs du peuple qui souffre ; le désir, justement, de ce peuple qu’on entende sa plainte et qu’on lui apporte remède : il ne veut pas la République, ce peuple, mais du pain ; l’insolence extrême de la vie de la France d’en haut en regard de la misère de la France d’en bas ; la veulerie des courtisans qui lèchent le soulier du Roi, quel que soit le monarque – on reconnaît ici les ancêtres de quelques « intellectuels » fameux de notre époque avachie ; la politique internationale comme loterie qui ponctionne le petit pécule des pauvres. Tout ceci mènera, on le sait, à la Révolution et à l’échafaud.
Les mêmes causes produisant les mêmes effets, Sofia Coppola réussit un prodige avec un film sublime en tout : esthétique, historicité, véracité, philosophie politique, psychologie de moraliste, au sens de La Rochefoucauld, style, caractère intempestif au sens de Nietzsche… Le film a l’élégance de se clore sur la fuite de Versailles que suivent l’écran noir et le générique. Derrière cet écran noir se profile notre époque, et plus particulièrement son avenir possible…
Michel Onfray
BRAINSTORM main title (James Horner)
http://www.youtube.com/watch?v=HMj_80T6cyg
Film composer great Elmer Bernstein (Magnificent Seven, To Kill A Mockingbird) once said to me, “The dirty little secret is that we’re not musicians – we’re dramatists.”(Michael E Levine)
http://www.youtube.com/watch?v=HMj_80T6cyg
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- Wyatt Earp
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Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Il avait dû boire trop de Chablis... Parce que dans le genre film branchouille, difficile de faire pire, malgré la craquante Kirsten Dunst qui sauve tout juste le film ! La photo est dégueulasse, la réal se vautre dans le sous-Gondry, quant aux choix musicaux ils sont sympas mais CHEVALIER gérait beaucoup mieux l'affaire...
Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Alors on devait être beaucoup dans ce casIl avait dû boire trop de Chablis...

Ce que j'ai adoré dans ce film, c'est sa modernité, l'art qu'a Sofia Coppola de nous faire comprendre ce qu'a pu ressentir une Reine aussi jeune en injectant dans son film des anachronismes qui font référence à notre existence (musique, les converse dans un coin, etc...) J'étais très sceptique au départ. Finalement, j'ai trouvé cette approche audacieuse de l'histoire, aussi intelligente qu'envoûtante.
Très belle chronique de Michel Onfray par ailleurs

- Wyatt Earp
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Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Tu es abonné à Cosmo ?
Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Le titre de l'article explique très bien pourquoi ce film suscite son enthousiasme.
"*I* shall not be back... but something will."
- Hellboy
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Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Il vient d'où, ce texte ?
Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Hellboy a écrit :Il vient d'où, ce texte ?
t'inquiètes, c'est une chronique publiée sur son site officiel
http://pagesperso-orange.fr/michel.onfr ... onfray.htm
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http://www.youtube.com/watch?v=HMj_80T6cyg
Film composer great Elmer Bernstein (Magnificent Seven, To Kill A Mockingbird) once said to me, “The dirty little secret is that we’re not musicians – we’re dramatists.”(Michael E Levine)
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Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Ceci étant dit, un homme qui boit du Chablis a tous les droits... 

- Hellboy
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Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Ivrogne !!!Goran a écrit :Ceci étant dit, un homme qui boit du Chablis a tous les droits...

Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Vous en êtes un autre, monsieur ! 

Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse....Hellboy a écrit :Ivrogne !!!Goran a écrit :Ceci étant dit, un homme qui boit du Chablis a tous les droits...
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Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
C'est exact. Je l'admets...Goran a écrit :Vous en êtes un autre, monsieur !

Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Ce n'est pas plutôt Michel Gondry, le branchouille de l'histoireParce que dans le genre film branchouille, difficile de faire pire


coming soon...
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Re: Marie-Antoinette de Sofia Coppola célébré par Michel Onfray
Il l'est aussi parfois de façon très agaçante, mais au moins, il a réalisé le magique ETERNAL SUNSHINE, pas un film pour la rive gauche.