Lee Van Cleef a écrit :Janus a écrit :D'autre part, "Ni franchement-bon-ni-mauvais", mon cher Lee, ne veut pas dire grand chose, objectivement parlant, en tout cas pas davantage qu'un dithyrambe excessif.
Tout est pourtant dans l'énoncé, peu élégamment tourné, certes, mais d'une limpide simplicité : il y a au menu de cette partition quelques gentilles qualités qui lui épargnent l'opprobre, mais rien de suffisamment enthousiasmant non plus pour s'expliquer les grands brasiers lyriques allumés en nombre par les exégètes du Maestro. A titre de comparaison, je trouve
Fraulein Doktor plat, sans saveur ni consistance, un score générique ne soulevant que l'ennui... auquel nous arrache, de façon aussi violente qu'inopinée, l'extraordinaire final de six minutes, que mes oreilles considèrent comme l'une des plus belles pièces savantes architecturées par Morricone. Avec
En Mai..., on ne relèvera nul sursaut d'une telle trempe, aucune étincelle de génie, tonale ou non, qui l'écarterait ne fût-ce que brièvement de sa routine un peu plan-plan car déjà toute tracée. "Illogiquement", pourraient penser certains, mais inéluctablement malgré tout, son souvenir a commencé à partir en poussière dans les confins de mon esprit.
Mon désaccord ne se situait pas sur ce point précis. Sur cette partition, je n'ai pas d'avis à donner qui confirmerait ou infirmerait ton ressenti puisque je ne l'ai pas encore écoutée ni vu le film comme je l'ai déjà écrit plus haut, mais disons que chez moi, "ni bon-ni-mauvais" ne veut rien dire. Chez moi, il n'existe pas de musique ni bonne ni mauvaise, une musique est plus ou moins bonne ou plus ou moins mauvaise. Voilà!

Et je ne pense pas que le film de Carion puisse permettre un final exceptionnel comme celui de
Fraulein Doktor qui n'est sûrement pas du genre à plaire à tout le monde et qui effraierait certainement beaucoup de cinéastes actuels, ni une effusion lyrique et dramatique d'une grande intensité comme on peut en entendre dans
The Scarlett and the Black ou dans les
Karol: attention chefs d'oeuvre!!, puisque de toute façon la volonté du réalisateur semble avoir été la retenue et la sobriété. Après, c'est à chacun de recevoir cette musique avec le "jugement" et l'"émotion qui sont les siens et je vois d'ailleurs que pour l'instant, les avis divergent, que chaque auditeur ne va pas forcément être ému par le même morceau, que l'on peut parfois être ému par quelque chose de très simple ou de simplement beau sans que quiconque ait à douter de la sincérité de celui qui aime ni de le suspecter de partisanisme. Personnellement, comme je l'ai déjà écrit et comme tu aurais dû le lire, ce n'est pas sur ce film que j'attendais un surpassement artistique du compositeur transalpin. Je m'attendais à un opus moyen. La dernière excellente partition d'
Ennio Morricone est selon moi
La meilleure offre et celle que j'attends avec un peu plus d'attente est
La Correspondance, le prochain Tornatore qui sera sans doute dans une veine moins torturée et plus romantique que ce qui ressort de leur précédente collaboration. Et après on verra bien avec
Tarantino qui le remet en selle sur un western, le genre qui l'a rendu célèbre dans le monde entier.
Julien a écrit :l'impression que me donne cette bo c'est qu'elle ressemble surtout à du Morricone
Ca me ferait bien chier qu'elle ressemble à du "Steiner" ou à je-ne-sais-quoi d'autre...bien que le début du final (premier sur le cd) m'a fait penser à Glass...

Lorsque j'achète Bach, c'est pour entendre du Bach, lorsque j'écoute Goldsmith c'est pour entendre du Goldsmith et lorsque j'écoute Morricone, c'est pour entendre du Morricone. Après, il m'arrive d'être déçu, de rester sur ma faim, d'avoir espéré mieux. C'est une expérience inévitable lorsque l'on suit un compositeur, tel qu'il soit. Pareil lorsque j'écoute l'intégrale des cantates de
J. S. Bach. Leurs détracteurs disent qu'elles sortent toutes d'un même moule routinier...

Oui et non et c'est vrai qu'il y en a des plus formidables que d'autres, des plus inspirées, des plus consistantes que d'autres. Pourtant, même dans une "petite" cantate routinière, plan plan, il va y avoir au moins un Aria qui va s'avérer être une petite perle dans la plus pure tradition bachienne, Bach y faisant du Bach sans le moindre complexe ni souci de renouvellement. (Le renouvellement est un leurre de mélomane. En réalité, un compositeur ne se renouvelle jamais vraiment.) Et bien, je suis dans la même situation avec les B.O. d'
Ennio Morricone, il y a toujours, excepté
Hundra 
, au minimum une perle, un diamant, le plus souvent deux, ce qui fait que j'ai besoin de ces "petites" cantates et de de ces "petites" B.O.. C'est justement en partie aussi grâce à ces pépites égarées et isolées que l'on reconnaît l'essence des grands compositeurs, ceux qui arrivent quand même à faire pousser une rose sur du béton. Je peux faire pratiquement le même rapprochement avec
Lalo Schifrin, cela même si sur
Man on a Swing je ne retiens rien, pas la moindre perle qui sauverait cette partition du néant absolu. C'est peut-être la première fois que je m'ennuie autant sur une B.O. de Schifrin. Incompréhensible!
Lee a écrit:
<<...mais rien de suffisamment enthousiasmant non plus pour s'expliquer les grands brasiers lyriques allumés en nombre par les exégètes du Maestro...>>
Désolé, mais je n'ai lu aucun brasiers lyriques allumés ici en nombre, juste quelques propos favorables et positifs, parfois un peu passionnés, sur cette B.O. par certains béophiles. Il ne faut pas exagérer non plus sinon plus personne ne va oser exprimer son ressenti ici. Il n'y a rien d'enflammé dans le commentaire de Patrick ou de Jaweco par exemple, ni dans celui de Dadid. Jaweco parle de "simplement beau". C'est un dithyrambe excessif, ça? J'en ai lu des bien plus emphatiques sur les fils "Goldsmith" et "Horner", entre autres. Il y a juste PJ30 qui considère comme un Must le thème final, pas la B.O., juste le Final pour des raisons qui sont les siennes et après tout, pourquoi pas. C'est son avis et il est aussi valable et subjectif que le tien après tout. On n'aime pas toujours une musique pour les mêmes raisons. Par exemple, Le final de
Fraulein Doktor et le final de
Cefalonia sont deux morceaux radicalement différents et pourtant je les adore tous les deux pour des raisons complètement différentes. Le premier me fascine par sa construction impressionnante d'une grande créativité alors que le second me transporte par la grande humanité qui en émerge ainsi que par sa beauté, tout simplement...Sinon, toi aussi tu encenses des trucs que d'autres ne trouvent pas terribles, qui me laissent parfois circonspects, mais personne n'ira t'accuser de partisanisme pour autant ou d'avoir tes préférences. Surtout pas moi! Lorsque j'entends sur ce forum des mots comme "splendeur" ou "fantastique" et que j'écoute, enthousiaste, les B.O. qui ont suscité ces termes extrêment élogieux, je m'étonne aussi, réécoute même pour vérifier que je n'ai pas raté quelque-chose quelque-part, sous un cuivre ronflant ou une corde tartignole, mais après tout, c'est comme ça, la musique divise autant qu'elle rassemble, divise plus souvent d'ailleurs.