Le sujet a déjà été abordé ailleurs sur ce forum, mais faisons-le ici par le biais du rêve : à supposer que vous disposiez d’un budget illimité, et que vous puissiez engager les musiciens et techniciens de votre choix pour ce faire, toutes contraintes pratiques, toute logique commerciale évacuées, quelles seraient les bandes-originales que vous choisiriez de faire (ré)enregistrer, sachant qu’en tant que producteur vous assureriez les choix artistiques de ce travail afin qu’il soit à votre goût ? Quelques raisons possibles : l’original sonne comme un 78t en décomposition, cette musique n‘a jamais été éditée (ou même enregistrée), ou tout simplement, c’est votre BO fétiche et la redécouvrir sous un autre jour vous emplirait de joie. Plus toutes les bonnes raisons auxquelles je ne pense pas, à vous de voir… le tout est de nous les expliquer.

En me posant cette question, je me suis rendu compte que les titres qui me plairaient le plus sont certainement les choix des autres, ceux auxquels je n'aurais pas songé, dont je ne connais même pas le compositeur, ceux-là me surprendraient le plus. Une découverte totale ! Mais trois titres (pour l’instant) me sont tout de même venus à l’esprit pour des raisons diverses :

- THE JUNGLE BOOK de Miklós Rózsa. Celui-ci a des chances d’être réalisé un jour « prochain ». Il existe plusieurs enregistrements de la superbe suite pour narrateur et orchestre, mais l’original est assez différent, et sa qualité d’enregistrement est très médiocre. Il existe peut-être aussi des morceaux jamais enregistrés… Pas de choix particulier pour l’orchestre et le chef bien que Raine/Prague paraisse logique vu leur expérience en la matière, mais étant donnée la nature british du film, pourquoi pas le LSO ou le BBC orchestra dirigé par Rumon Gumba ? À condition que l’enregistrement soit capté comme une BO et que les détails ne se perdent pas dans le lointain, défaut de son récent disque Rózsa. Pour chanter la berceuse il faut une vraie contralto, et quitte à rêver, si je pouvais faire renaitre Kathleen Ferrier de ses cendres…

- JANE EYRE de John Williams. Un cas particulier : l’album original est un programme idéalement équilibré, très bien joué, seul l’enregistrement pêche un peu techniquement. Il serait peut-être possible d’ajouter quelques bricoles au contenu, mais l’essentiel serait pour moi de redécouvrir ce classique historiquement mineur mais essentiel sous les auspices d’un orchestre de chambre anglais dirigé par un chef très attentionné, conservant globalement les tempi originaux ainsi que l'effectif (pas de gonflage orchestral abusif) et l’âpreté de certains passages tout en soignant les nuances et le son… la quadrature du cercle, donc. L’utilisation de quelques instruments solistes anciens pourrait être un plus pour caractériser le son.

- LOST HORIZON de Dimitri Tiomkin. Nous disposons actuellement des bandes optiques originales (qui ne rendent pas justice aux dimensions de l’œuvre) et de la longue suite dirigée par Charles Gerhardt. Cette dernière est remarquable mais pas toujours idéale dans ses tempi (trop alanguis sur la cérémonie finale ?) ni dans son enregistrement pourtant de bon niveau (dans le même passage : les cordes trop lointaines à mon goût, la dynamique un peu plate). Et surtout l’œuvre mérite d’être intégralement entendue avec la meilleure qualité, quitte à conserver certains arrangements opérés pour le meilleur par Christopher Palmer.

C’est tout pour le moment… Je suis sûr que des projets plus inattendus que ceux-là vont me traverser l’esprit, mais à vous de jouer avant que j’y revienne !

War and Peace de Nino Rota. Le son du Varese me rebute.

Regain d’Arthur Honegger. Le Marco Polo c’est bien beau mais 10 minutes pour ce magnifique film de Pagnol c’est court !

Knight Without Armour , premier film de Miklós Rózsa en 1937. Il n’existe qu’une suite de 10 minutes sur un LP Polydor de 1976 et un morceau au piano sur un CD Intrada.

La loi du silence de Dimitri Tiomkin. Je ne l'ai plus vu depuis des lustres mais je me souviens d'un magnifique générique au début avec une voix féminine très aérienne.

Dadid a écrit :
et quitte à rêver, si je pouvais faire renaitre Kathleen Ferrier de ses cendres…

Rien que ça Je n’arrive pas à la dissocier du Chant de la Terre où on frôle carrément la perfection

Faute d'avoir un jour la version originale The KEEP de Tangerine Dream , Bsx n'avait rien contre mais rien de neuf de ce côté là bien que les synthés des années 80 / 90 soient parfaitement imitables avec les technologies actuelles.
J'aimerai aussi une reprise du Lionheart de Jerry Goldsmith avec un orchestre plus puissant que celui d'époque et tant qu'on y est un réenregistrement de The Sword and the sorcerer dont l'interprétation d'origine n'est pas fameuse.

Et voici que se radine tout de noir empyjamé le vieux Van Cleef, disposé comme de coutume à repousser de la pointe de son katana la glaciale menace du conformisme — ici, symbolisée par le vampire hollywoodien, ainsi qu'on peut le constater déjà. Je le concède de bonne grâce, il existe à mes oreilles également des tonnes de scores en provenance de la Mecque du cinéma qui mériteraient un habile ravalement de façade, comme, au débotté, On Dangerous Ground et The Satan Bug, desservis par des disques aux multiples nocivités sonores... Mais enfin, bon sang, gentlemen ! Qu'attendez-vous donc pour faire l'école buissonnière, maintenant que Dadid a donné à votre imagination la clef des champs, précieuse et dorée ? Me concernant, je ne me ferais pas le moindrement prier pour changer en une sublime oasis de verdure le désolant Sahara éditorial des pays de l'Est. Les compositeurs russes seraient à la fête, bichonnés, cajolés, gâtés, et peut-être plus particulièrement leurs homologues tchèques, que mon coeur crevassé chérit : Zdenek Liska, Petr Hapka, Lubos Fiser... Et tant pis si les béophiles de France et de Navarre (et de tout un tas d'autres endroits du globe, hélas) s'en tamponnent le coquillard !

Je m'associe volontiers à cette première moisson, et bien que je n'aie pas donné le bon exemple, l'appel du pieds de Lee Van Cleef survient à propos. Les répertoires d'Europe de l'Est auraient bien besoin de l'aide de (re)producteurs aventureux (voire suicidaires) non seulement pour accéder à la postérité, mais à minima pour exister - s'il est possible d'en reproduire la saveur à travers un réenregistrement. Mais nous sommes là pour rêver. Et il n'y a pas qu'eux... Je pense aux répertoires asiatiques, le japonais par exemple, qui malgré les efforts de conservation des labels nippons gratte parfois les oreilles de par son ancienneté. C'est bien pire pour un pan immense du cinéma français, presque disparu, évoqué à l'occasion des superbes concert de Radio France en janvier. REGAIN a été cité par Mortimer, il y en tant d'autres. J'ajoute déjà à ma liste, dans un genre différent :

- HISTOIRE DE FANTÔMES CHINOIS (James Wong Jim & Romeo Diaz): un score difficilement reproductible certes un peu "simpliste" mais qui a tant de charme à mes yeux, et il n'est pas interdit d'imaginer des arrangements symphoniques légers greffés à ces chouettes mélodies.

- ZORRO !!! (la série Disney): à défaut de bandes originales, une petite suite de 15-20 mn réenregistrée me ferait bien plaisir !

- SPIDERMAN (le dessin animé) : bis repetita

Mortimer a écrit :

Dadid a écrit : et quitte à rêver, si je pouvais faire renaitre Kathleen Ferrier de ses cendres…

Rien que ça Je n’arrive pas à la dissocier du Chant de la Terre où on frôle carrément la perfection

Oui, je rêve très très fort là ! Encore plus que son historique "Chant...", c'est aux mélodies anglaises que je songe en les rapprochant de Jungle Book.

Un petit Morricone qui mériterait d'être réenregistré ou dont on aimerait retrouver des masters plus propres.

Hundra ?????
Punaise, ma mémoire doit me faire défaut car je ne sais même pas ce que c'est que ce truc là !!! ça doit dater de l'époque de Red Sonja non ?

A deux ans près oui ! C'est vrai que le son de Hundra n'est pas génial . Mais bon vu le film..Ca devait être un Conan au féminin et ce fut un ratage sur toute la ligne.

C'était extrêmement fauché comme prod et c'est à ce demander comment ils ont fait pour avoir Morricone comme compositeur sur ce nanar même pas sympathique.

Un Morricone prestigieux serait nettement plus à propos.
Justement, je pensais à Novecento (1900), double film de Bertolucci, dont le LP/CD ne présente que 50 minutes ou guère plus, et qui a beaucoup d'inédits.
L'intérêt d'un réenregistrement est que le master est perdu ou détruit, donc le programme initial n'a jamais pu être augmenté.

La vaste fresque de Bertolucci sur l'Italie illustrée par Morricone aurait plus de gueule que le pauvre Hundra ...
Mais ne rêvons pas, donc je me rabattrai sur l'enregistrement des inédits à partir du double DVD/Blu-Ray restauré récemment.

Dadid a écrit :Je pense aux répertoires asiatiques, le japonais par exemple, qui malgré les efforts de conservation des labels nippons gratte parfois les oreilles de par son ancienneté.

Comme, du moins à ma très parcellaire connaissance, cette musique n'a jamais vu le jour sur disque ("It looks like a job for Cinema-Kan !" ai-je envie de lancer d'une voix de stentor), je donnerais gros, montagnes de pierres rouges flamboyantes et de saphirs extorqués aux noirs abysses, pour que ressuscite sous les bons auspices d'un orchestre dévoué le Miyamoto Musashi d'Ikuma Dan. Le plus grand héros de l'Archipel trouvait dans le visage revêche de Toshiro Mifune une incarnation gorgée de panache brut, et dans la partition un thème inoubliable, dérivé superbe de la seconde et volumineuse symphonie du même compositeur.

Le Joueur d'Echecs, dont la piste musicale originelle semble irrémédiablement perdue, s'était révélé paré de majestueux atours symphoniques après que Carl Davis eut décidé, ô ! sainte initiative, de ressusciter avec le concours du Live Cinema Orchestra l'ample partition d'Henri Rabaud. Depuis lors, je prie chaque soir les divinités mortelles du ninjutsu afin que Le Miracle des Loups, qui doit se contenter lui d'une tristounette transcription au piano de la musique signée du même Rabaud, connaisse un jour semblable destinée.

Thierry La Fronde
Tonnerre Mécanique

Et je mourrais heureux! enfin comblé musicalement plutôt!!

Vous vous doutez certainement ce que vous allez lire ci-dessous.

Pas de titres spécifiques, mais un coffret (ou deux, ou trois, ou...) qui redonnerait leurs lettres de noblesse aux musiques des films français de cape et d'épée des années 50 et 60.

Au programme, on trouverait des œuvres de Georges van Parys et Maurice Thiriet (Fanfan la Tulipe, La Tour, prends garde !), Jean Marion (Les Trois Mousquetaires, Le Bossu, Le Capitan, Le Miracle des loups, Cadet Rousselle, Les Mystères de Paris), Paul Misraki (Les Trois Mousquetaires), Georges van Parys (Le Capitaine Fracasse, Le Masque de fer, Le Chevalier de Pardaillan, Mandrin, bandit gentilhomme) ou encore René Sylviano (Le Vicomte de Bragelonne), Michel Magne (Cyrano et d'Artagnan), Georges Garvarentz (Surcouf, le tigre des sept mers)
Cette courte liste n'est évidemment pas exhaustive, car il y aurait de quoi faire, tant il y a de titres.

Allez, je vais continuer mon doux rêve musical...

Ton programme me plait bien, DarkCat, j'adorerais découvrir ça. Ce n'est en théorie pas impossible, d'ailleurs, car les solutions existent, les droits doivent pouvoir s'acquérir, il ne reste en réalité qu'un seul très gros problème à résoudre pour produire un tel coffret : combien tu as dans ton porte-monnaie ?

Mais l'objet de ce topic est de rêver.

Alors, je viens de vider mon porte-monnaie et je peux te dire que j'ai déjà 22,87 € !!
La campagne de financement démarre donc très bien.

Après, je ne suis pas certain que l'on arrive à en vendre beaucoup, hormis à quelques vieux béophiles.
Pas certain, notamment que les fans hardcore de Zimmy y trouvent leur bonheur, même avec un bon son.

Mais !? Attendez, j'ai finalement la solution pour éditer mes coffrets. Il suffit de ne pas éditer une paire de bouses du niveau de "Dark Phoenix" ou "Anna" et hop, on a de l'argent facilement disponible pour éditer ces belles musiques de l'art musical français. Comment ça, la vie n'est pas aussi simple...

Samson and Delilah de Victor Young dont il n'existe qu'une suite de 23minutes et The Uninvited du meme (, un enregistrement de quelques pistes chez Naxos par Stromberg existe ,mais Stella by starlight merite mieux ) . Young est d'ailleurs à mon sens beaucoup trop oublié des ré éditions et extended , son Around the world in 80 days meriterait bien une intégrale à l'image de The great race de Mancini chez LaLa Land

DarkCat a écrit :Pas de titres spécifiques, mais un coffret (ou deux, ou trois, ou...) qui redonnerait leurs lettres de noblesse aux musiques des films français de cape et d'épée des années 50 et 60.

Je n'en reviens toujours pas que Lerouge n'ait jamais tenté d'exploiter ce filon, à mon sens plus que prometteur. Les noms d'André Hunebelle et Jean Marais voisinant sur une seule et même pochette de disque garantissaient, à mon sens, que soient tout ouïe les nombreux téléspectateurs abecqués des lustres durant aux diffusions cathodiques du Bossu ou du Capitan.

Michael Remy a écrit :Tonnerre Mécanique

Et je mourrais heureux! enfin comblé musicalement plutôt!!

Es-tu bien certain d'avoir arrêté ton meilleur choix ? La déception risquerait fort de te meurtrir à l'égal d'un fer tiré des rougeoiements d'un brasero, eu égard au très probable fil à retordre que les synthés futuristes de Tangerine Dream donneraient à quiconque s'avisant de les dupliquer.

Le générique original de la série figure dans l'album Le Parc pour évoquer celui de Los Angeles (ils ne se sont pas foulés sur ce coup là ).

DarkCat a écrit :Pas de titres spécifiques, mais un coffret (ou deux, ou trois, ou...) qui redonnerait leurs lettres de noblesse aux musiques des films français de cape et d'épée des années 50 et 60.

Hé, vise un peu, le chat du Cheshire ! Ces messieurs de Cinémusique viennent justement de sortir la musique du Bossu ! On s'abstiendra néanmoins de claironner tous postillons aqueux dehors à l'évènement, et pas seulement parce qu'il s'agit d'une énième obole aux sombres divinités de la dématérialisation. Déjà, ce tracklisting aux clavicules saillantes, dont le label s'est désormais fait un chantre fidèle, ne promet pas franchement un festin gavé de victuailles symphoniques. Et surtout, loin des fastes d'un réenregistrement d'envergure, il y a toutes les (mal)chances que cette parution n'ait guère mieux à proposer qu'une vulgaire décalcomanie à même le film, avec bruitages, dialogues et tutti quanti pour faire la nique aux cuivres joyeux de Jean Marion.

Ah la sale blague.

Oui, Lee, j'avais vu ça.
Et comme c'est du démat, j'avais traité l'info avec un profond mépris.
Mais bon, à l'écoute des extraits,que l'on ose pas me dire que ça ne ferait pas un merveilleux candidat pour un réenregistrement de qualité !