Hans Zimmer & RCP

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YuHirà
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Pour ceux qui seraient intéressés (j'imagine que vous ne serez pas nombreux mais on ne sait jamais), le magasine professionnel Sound on Sound (https://www.soundonsound.com) met à disposition gratuitement son numéro d'Avril qui comporte 7 pages très détaillées (et il est vrai un peu techniques) sur le processus de fabrication de la BO de Dune 1 et 2. Il suffit juste de créer un compte.

On y apprend notamment que les cornemuses lors de l'arrivée d'Arrakis n'ont pas été enregistrées avec des cornemuses mais avec... des guitares: Guthrie Govan ainsi empilé de multiples couches de guitare passées à travers un multi-effet (le Fractal FM-9) pour obtenir le son qu'on entend dans le film. On apprend également que Pedro Eustache a dû créer un nouvel instrument, le duduk chromatique, afin de pouvoir jouer le thème du premier Dune (le duduk est originellement un instrument diatonique au registre très limité) et que sur le second Dune, il a fait appel aux luthiers Français Guillaume Bonneau et Christophe Dusquene pour générer des sons avec deux synthétiseurs avant gardistes qu'il ont inventé: l'Expressive-E Osmose et le Continuum de Haken (un clavier où les touches sont continues, ce qui permet de faire des glissandos ou de la musique microtonale).

Bref, c'est une plongée assez unique dans le processus, très internationalisé, qu'Hans Zimmer utilise depuis peu pour façonner le son de ses BOS avec ses équipes et pour pousser les limites de ce qu'il est possible de faire.
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DarkCat
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Re: Hans Zimmer & RCP

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YuHirà a écrit : sam. 23 mars 2024 19:15On y apprend notamment que les cornemuses lors de l'arrivée d'Arrakis n'ont pas été enregistrées avec des cornemuses mais avec... des guitares: Guthrie Govan ainsi empilé de multiples couches de guitare passées à travers un multi-effet (le Fractal FM-9) pour obtenir le son qu'on entend dans le film.
Et dire que de simples pignoufs se seraient bêtement contenter d'enregistrer des cornemuses. :lol:
YuHirà a écrit : sam. 23 mars 2024 19:15pour pousser les limites de ce qu'il est possible de faire.
... mais impossible d'écouter ! :mrgreen:
Scorebob
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Le comble du snobisme c'est quand même de ne pas utiliser le son d'une cornemuse que l'on reconnaît bien a l'écran pour lui préférer un bidouillage sonore "alambiqué "qui donnera...un son de cornemuse .
La corne m'use comme dirait le rhinocéros.
YuHirà
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Et dire que de simples pignoufs se seraient bêtement contenter d'enregistrer des cornemuses
Je me pose aussi la question à vrai dire. Les cornemuses (bagpipes) et uileann pipes, qu'on confond souvent, peuvent avoir une justesse assez approximative, ce qui rend leur intégration parfois compliquée avec des instruments tempérés (je suis confronté au problème en ce moment) mais avec les outils d'aujourd'hui comme Melodyne, il est très simple de corriger chaque note en post-prod, même lorsqu'il y a plusieurs notes en même temps.

Peut-être qu'avoir recours à des guitares permettait de mieux contrôler le résultat et le son final de façon non destructive alors que cela aurait été plus compliqué avec des cornemuses.

Après tout, c'est la même raison pour laquelle John Williams et Randy Kleber ont choisi dans Harry Potter de mélanger un patch DX7 au célesta pour obtenir le son qu'on entend dans Hedwige's Theme (qui n'est donc pas un vrai célesta à proprement parler).

Peut-être qu'aussi les expérimentations à la guitare préexistent à l'idée de la cornemuse... vu qu'Hanz Zimmer travaille souvent en amont du tournage avec Nolan!
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Alcibiade
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Re: Hans Zimmer & RCP

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En même temps, l'artifice est le domaine de prédilection de cette fabrique conduite d'une main de fer par Zimmer avec le principe avant-gardiste "Plus la dématérialisation est poussée, plus l'art opère !". À ce stade, on atteint les limites de l'art conceptuel total et la logique serait un sound design complet, à savoir le silence. Si seulement ! :mrgreen:
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Re: Hans Zimmer & RCP

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YuHirà a écrit : sam. 23 mars 2024 19:15 Pour ceux qui seraient intéressés (j'imagine que vous ne serez pas nombreux mais on ne sait jamais), le magasine professionnel Sound on Sound (https://www.soundonsound.com) met à disposition gratuitement son numéro d'Avril qui comporte 7 pages très détaillées (et il est vrai un peu techniques) sur le processus de fabrication de la BO de Dune 1 et 2. Il suffit juste de créer un compte.
Merci YuHiRà pour ce lien c’est super intéressant! J’avais vu une interview de compere Zim quand il expliquait comment il avait demandé à un mec de jouer la même note pendant longtemps pour the dark night et a priori il est toujours autant dans l’expérimentation !
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Dadid
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Re: Hans Zimmer & RCP

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A vrai dire la recherche technique et sonore reste (pour moi) le plus intéressant chez Zimmer, et ce qui revient souvent dans les commentaires positifs, même si vu de loin je trouve le résultat - seule chose qui compte vraiment - surévalué. La musique populaire a changé, les aspects techniques de la création sont devenus omniprésents dans la critique, pour le meilleur ou pour le pire. Et puis utiliser une vraie cornemuse n'aurait pas donné le même résultat, elle ne se serait pas facilement mixée au reste, donc pourquoi pas ? Je n'aime pas cette musique, mais ce n'est pas le travail sonore que je critiquerais... plutôt l'inspiration !
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Sam Lowry
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Re: Hans Zimmer & RCP

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DarkCat a écrit : sam. 23 mars 2024 19:49 Et dire que de simples pignoufs se seraient bêtement contenter d'enregistrer des cornemuses. :lol:
Tu m'hôtes les mots du clavier ! C'est n'importe quoi. Et si cet argument :
YuHirà a écrit : sam. 23 mars 2024 20:23 Les cornemuses (bagpipes) et uileann pipes, qu'on confond souvent, peuvent avoir une justesse assez approximative, ce qui rend leur intégration parfois compliquée
est celui qui explique ce bidouillage, c'en est que plus ahurissant encore ! Bientôt ces compositeurs à la petite semaine se diront que c'est trop compliqué de faire jouer de vrais instruments puis que c'est trop compliqué de composer. Remarquez, on y est presque... :mrgreen:
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Il y a bien des bagpipes, dans Dune 1 du moins
On peut le lire au générique : "Bagpipes : Pipers of the Scottish Session orchestra"

Ce que je reprocherais à notre cher allemand Hans Zimmer malgré le fait que Dune 2 soit une bande originale intéressante, c'est qu'il en fait trop sur le storytelling
et que parfois cela mène même à des mensonges comme le fait de dire qu'il a utilisé des guitares pour simuler des cornemuses alors qu'il y en a bien
eu des vraies.
Il a peut être mélangé les deux, mais dire que ce ne sont que des guitares, pour faire comme si il était hyper avant gardiste comparé aux autres ringards de compositeurs,
c'est un peu claqué au sol, comme disent les jeunes.
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Re: Hans Zimmer & RCP

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A vrai dire la recherche technique et sonore reste (pour moi) le plus intéressant chez Zimmer, et ce qui revient souvent dans les commentaires positifs, même si vu de loin je trouve le résultat - seule chose qui compte vraiment - surévalué. La musique populaire a changé, les aspects techniques de la création sont devenus omniprésents dans la critique, pour le meilleur ou pour le pire. Et puis utiliser une vraie cornemuse n'aurait pas donné le même résultat, elle ne se serait pas facilement mixée au reste, donc pourquoi pas ? Je n'aime pas cette musique, mais ce n'est pas le travail sonore que je critiquerais... plutôt l'inspiration !
Ton commentaire me rassure un peu car je pense la même chose. Je ne suis pas fan du tout de la musique de Dune mais je trouve cet aspect non seulement intéressant mais très inspirant.

Qu'on le veuille ou non, Hans Zimmer explore des choses. Il ne cherche peut-être pas dans la direction que beaucoup d'entre vous souhaiteraient, mais il cherche. Et il l'un des rares à le faire.

Je ne comprends pas trop la majorité des réactions ici. Quoiqu'on fasse, même si l'on relaie un article démontrant à quel point il y a un travail derrière, ce ne sera jamais assez. Tous les arguments sont bons pour démonter Hans Zimmer, même les plus éclatés.

Car oui, cet argument est à mon sens éclaté (ou claqué au sol pour reprendre l'expression de Maaza). Depuis que l'orchestre existe, les compositeurs n'ont eu de cesse d'imiter des instruments avec d'autres, grâce à l'orchestration. Dans le thème d'Harry Potter, John Williams utilise à un moment une combinaison d'un basson, d'un cor anglais et d'une flûte alto qui donne l'impression d'entendre un cor très doux. Il aurait pu utiliser un cor, et pourtant il ne le fait pas. Pourquoi? Probablement parce qu'il est plus facile de contrôler la douceur du son de cette façon. Il n'y a donc rien d'étonnant (EDIT: enfin si quand même mais vous avez compris ce que je veux dire :D ) à utiliser des guitares pour imiter les cornemuses (très difficilement malléables) afin de mieux en contrôler le résultat: ça ne demande pas moins de travail d'imagination. Rien ne permet d'affirmer que c'est inutile tant qu'on ne sait pas pour quelle raison ça a été fait.

Je ne comprends pas cette obsession pour le son "pur". Un film c'est un équilibre sonore complexe à établir. J'aimerais vraiment que certains d'entre vous aient la chance un jour d'assister à la post-production complète d'un film, et surtout au mixage d'une musique qui n'est pas enregistrée de la manière traditionnelle (manière traditionnelle = orchestre enregistré au complet sans séparer les sections, sans overdub et avec un Decca Tree, qui plus est sans aucun recours aux instruments virtuels, ce qui est devenu très rare), ainsi qu'aux échanges entre les différentes parties prenantes. Je n'ai aucun doute sur le fait que la majeure partie des compositeurs vivants dont vous appréciez le travail ici ont recours à ces bidouillages. Y compris John Williams, je vous en ai déjà parlé plus haut avec son célesta.

Il s'agirait aussi de ne pas oublier que la musique concrète, musique de bidouillages par excellence, existe depuis 76 ans :D Ce n'est pas comme si c'était nouveau :-)
est celui qui explique ce bidouillage, c'en est que plus ahurissant encore ! Bientôt ces compositeurs à la petite semaine se diront que c'est trop compliqué de faire jouer de vrais instruments puis que c'est trop compliqué de composer. Remarquez, on y est presque... :mrgreen:
Je t'aime bien Sam (vraiment), mais comme tu n'es pas confronté aux enjeux auxquels les compositeurs sont confrontés au quotidien, tu devrais plutôt être heureux que l'on te donne accès à ces informations un peu "cachées" qui pourraient te permettent de mieux comprendre le pourquoi du comment plutôt que de te servir de la moindre de ces informations pour démonter des compositeurs dont tu n'aimes pas le travail.

Ne pas aimer le résultat, c'est une chose et c'est parfaitement défendable. Démonter systématiquement un compositeur pour des bidouillages alors que ces derniers procèdent d'une volonté manifeste dont contrairement à d'autres il ne se cache pas, ce n'est à mon sens pas très charitable et pas tout à fait honnête intellectuellement parlant.
Il y a bien des bagpipes, dans Dune 1 du moins On peut le lire au générique : "Bagpipes : Pipers of the Scottish Session orchestra"
C'est effectivement troublant. Soit j'ai mal lu l'article, soit l'information n'est valable que pour l'arrivée sur Arrakis.
Ce que je reprocherais à notre cher allemand Hans Zimmer malgré le fait que Dune 2 soit une bande originale intéressante, c'est qu'il en fait trop sur le storytelling
et que parfois cela mène même à des mensonges comme le fait de dire qu'il a utilisé des guitares pour simuler des cornemuses alors qu'il y en a bien
eu des vraies.
Je suis d'accord sur le fait qu'Hans Zimmer force un peu trop parfois sur le storytelling. Pour le lire régulièrement sur les forums professionnels, il semble parfois un peu trop satisfait de lui-même.
Je ne suis pas en revanche certain qu'il mente sur son processus de travail, compte tenu du nombre de personnes impliquées et de personnes avec qui... il a pu se fâcher :D
Il a peut être mélangé les deux, mais dire que ce ne sont que des guitares, pour faire comme si il était hyper avant gardiste comparé aux autres ringards de compositeurs,
c'est un peu claqué au sol, comme disent les jeunes.
Je ne peux pas présumer de ses intentions mais je pense que si mélange il y a, c'est probablement une tentative de mieux contrôler le résultat sonore. Comme je l'expliquais plus haut, la plupart d'entre nous passons notre temps à le faire. C'est ce qu'on appelle du "stacking" ou "layering". Si les compositeurs que vous aimez ne le faisaient pas à l'époque, c'est que tout simplement que ce n'était pas possible techniquement parlant (ou du moins pas facilement dans les délais impartis). Je n'ai cependant aucun doute sur le fait que s'il avait eu cette possibilité, Jerry Goldsmith y aurait eu recours.
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Alcibiade
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Loin de moi l'idée de retirer à Zimmer son titre de bon technicien du son, et en soi on peut parfaitement être fasciné par les expérimentations permises par les technologies qui manipulent les sons naturels ou créent de nouveaux sons ; combien ont usé de cela que ce soit le theremin pour Rózca ou Herrmann, le EVI pour Jarre, les acrobaties électroniques de Goldsmith, et tellement d'autres ! Pour ma part, ce qui me laisse dubitatif, c'est plutôt le rapport entre les moyens et la fin. Dans le cas des compositeurs susnommés, les moyens (qu'ils soient naturels ou synthétiques) étaient toujours au service de la fin, à savoir la musique de films (voire pour les partitions les plus ambitieuses et libres la musique elle-même). Dans le cas des scores zimmeriens (et ce n'était pourtant pas le cas au début, loin s'en faut justement, et pourtant l'adéquation à l'image était parfaite et qu'on se souvienne de "Paperhouse" ou de "Fenêtre sur Pacifique" ; ce qui rend la trajectoire d'un Zimmer d'autant plus tragique), les moyens sont devenus la fin elle-même, c'est-à-dire qu'il n'y a plus d'intérêt porté à la musique elle-même ; seul compte le procédé technique lui-même (le montage, les prouesses de la manipulation numérique, les raccords avec l'image, les pulsations pour provoquer tel effet, etc.). Bref, on parle d'industrie (ce qui n'est nullement détestable, c'est un domaine estimable comme tant d'autres avec l'application et le soin portés à la reproduction de routines pour produire vite et bien) et peut-être même d'ingénierie s'il y a des nouveautés dans la production avec des innovations dans la façon de procéder, mais on ne parle plus ici, stricto sensu, de création. Produire avec talent n'est pas créer avec génie, comme un bon travailleur voire un innovateur ne sont pas nécessairement des poètes. Le poète, s'il ne peut se passer bien entendu de règles et de techniques (car c'est un.mythe de dire que l'art est sans règles et techniques), met cependant celles-ci au service d'une fin, et ne considère pas que les moyens eux-mêmes, quels que soient l'artifice et la débauche de ceux-ci, constituent la fin.
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DarkCat
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Pour ma part, le problème n'est finalement pas qu'il bidouille, qu'il tente, qu'il expérimente, voire qu'il s'amuse, mais bel et bien le résultat. Il peut aussi faire ça chez lui et pour lui, sans nous l'imposer dans des films. :lol:
Cela dit, comme on lui file plein de sous pour faire ça, il aurait évidemment tort de s'en priver. Surtout que plein de monde crie au génie ! :mrgreen:
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Pardon mais si ses bidouillages savants et complexes finissent par sonner comme du Vangélis du pauvre a mes oreilles durant la projection du film (par ailleurs très bon ) c'était vraiment pas la peine de se prendre autant la tête . En dehors de quelques passages éthérés fort peu inspirés ou en tous cas absolument révolutionnaires et originaux (faut pas nous la faire on connaît la musique) le score se résume quand même encore a des percussions simplistes et des BRRRRRRAAAAAAAAMMMMMMM assourdissants .
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Sam Lowry
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Je t'aime bien Yu (vraiment), mais comme tu es confronté aux enjeux auxquels les compositeurs sont confrontés au quotidien, tu devrais plutôt être dépité d'un tel procédé qui ne rime à rien et qui pourrait te permettent de mieux comprendre le pourquoi du comment plutôt que de te servir de la moindre de ces informations pour louer des compositeurs dont tu aimes pas le travail.
Bon, passé cette blagounette, évidemment que je ne suis pas d'accord avec toi. Ou alors, on arrête d'aller dans le sens du cynisme hollywoodien et on reconnait que ce genre de chose n'a RIEN à voir avec de la composition. C'est du bidouillage. Parfois très recherché, je te l'accorde. Mais pour quel résultat au final ? Darky le dit très bien. C'est finalement "pointless" ce genre de méthode. Imagine Goldsmith dire en interview "alors, pour THE RUSSIA HOUSE, j'ai eu l'idée de faire intervenir un joueur de Duduk. Malheureusement, comme ce n'est pas un instrument avec lequel on peut faire ce qu'on veut, j'ai choisi de combiner un morceau de tuyau en PVC que mon plombier m'avait laissé quand j'ai fait refaire ma cuisine avec le son d'une clarinette passé à l'envers et un morceau de film alimentaire que j'ai collé dessus pour en altérer le son, ensuite j'ai passé le tout au séquenceur pour réharmoniser l'ensemble afin d'obtenir le son d'un Duduk qui soit moins difficile à maîtriser....." Tu ne le prendrais pas pour le dernier des cons ? Ou alors pour le mec qui, devant la difficulté, préfère contourner le problème et ensuite ce vanter de ça ? C'est comme si mon fils me disait : "papa, j'ai découvert la calculatrice. Pourquoi on se fait chier à faire du calcul mental ?.."
Bref, je l'ai dit beaucoup de fois. Total Trax m'a même permis de démontrer (enfin, j'espère) dans un 3ème épisode consacré à Zimmer, qu'il fut un temps où Zimmer ne se contentait d'avoir une "idée sonore" mais qu'il essayait de faire de la musique. Tu connais sûrement :mrgreen: . Toi qui es compositeur, toi qui t'es astreint à prendre des cours de solfège, d'harmonie et de contrepoint qui permettent de faire sonner correctement un orchestre malgré les limitation inhérentes à chaque groupe d'instrument. Non ? ;)
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Re: Hans Zimmer & RCP

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La musique de Zimmer est devenue un savant mélange entre

et


Il est donc proche de trouver l'anti-accord marron absolu. :lol:
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Re: Hans Zimmer & RCP

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En fait... Dune est une oeuvre complexe, donc il faut faire du complexe dans la musique (alors que Toto lui avait compris l'inverse)... Sherlock Holmes, Wonder Woman ou Madagascar... c'est pas compliqué donc il faut pas réfléxionisoné la musique... Lone Ranger est encore un autre exemple d'une écoute où on peut avoir du plaisir... mais dès qu'on touche à "l'intellect" comme Interstellar par exemple... bah faut faire du complexe...

Heureusement qu'il a pris HANNIBAL comme une comédie :lol:
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Re: Hans Zimmer & RCP

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C'est vrai qu'au final les scores du teuton où l'on prend du plaisir en dehors du film c'est ceux où il y a le moins de pression et les moins intellectuels : les Madagascar, Rango, les Pirates des Caraïbes et Lone Ranger, les Sherlock Holmes, WW 1984...
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Re: Hans Zimmer & RCP

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C'est finalement "pointless" ce genre de méthode. Imagine Goldsmith dire en interview "alors, pour THE RUSSIA HOUSE, j'ai eu l'idée de faire intervenir un joueur de Duduk. Malheureusement, comme ce n'est pas un instrument avec lequel on peut faire ce qu'on veut, j'ai choisi de combiner un morceau de tuyau en PVC que mon plombier m'avait laissé quand j'ai fait refaire ma cuisine avec le son d'une clarinette passé à l'envers et un morceau de film alimentaire que j'ai collé dessus pour en altérer le son, ensuite j'ai passé le tout au séquenceur pour réharmoniser l'ensemble afin d'obtenir le son d'un Duduk qui soit moins difficile à maîtriser....." Tu ne le prendrais pas pour le dernier des cons ? Ou alors pour le mec qui, devant la difficulté, préfère contourner le problème et ensuite ce vanter de ça ? C'est comme si mon fils me disait : "papa, j'ai découvert la calculatrice. Pourquoi on se fait chier à faire du calcul mental ?.."
Alors non seulement ça ne me poserait aucun problème si Goldsmith disait ça en interview (sincèrement, cela aurait plutôt tendance à éveiller ma curiosité et à me donner envie d'expérimenter) mais je ne suis pas certain que ta comparaison avec les mathématiques soit pertinente.

En science, on préfère toujours la solution la plus plus simple et la plus directe à la solution la plus alambiquée (rasoir d'Ockham). On considère donc comme inutile de prendre 10 étapes pour calculer ou prouver quelque chose si on peut le faire aussi bien en 2 étapes. Face à une montagne, on se DOIT de ne pas la contourner, mais de la creuser pour arriver de l'autre côté le plus rapidement possible. Le problème que pose l'usage de la calculatrice plutôt que le calcul mental, ce n'est pas tant la paresse mais la dépendance à un outil qui flétrit non seulement les capacités cognitives mais ne permet pas l'autonomie.

La création artistique, c'est au contraire une errance continuelle, parce que l'art ne cherche pas à aboutir à un résultat en particulier si ce n'est de faire réagir (je n'utilise pas le terme émouvoir à dessein, car je pense que même la répulsion est une émotion valide si c'est l'effet recherché par son créateur). L'art se DOIT de ne pas choisir la solution la plus simple et la plus évidente parce que cela conduirait à faire comme tout le monde. J'aime bien cette citation de Gérard de Nerval: "Le premier qui compara une femme à une rose, c'est un poète, le second fut un imbécile." Pour éviter les poncifs, avoir un regard neuf sur le monde, offrir à l'auditeur ou au spectateur quelque chose de nouveau, il faut parfois savoir aller ailleurs, faire les choses les plus absurdes, penser hors cadre, quitte à repenser sa façon de composer et ses outils. C'est d'ailleurs ce qui fait que même lorsqu'on a toute la maîtrise de son art la période de création n'est en général pas la période qu'un artiste apprécie le plus dans la vie tant elle s'apparente à une période de perdition (je vous renvoie à ce TedX).

Contourner un problème, c'est aussi s'autoriser à chercher d'autres voies qui n'ont jamais été empruntées. Face à l'Everest, tout alpiniste a pour ambition de monter au sommet et donc de faire l'effort d'affronter la difficulté que cette ascension représente. Mais ces alpinistes se sont-ils intéressés à ce qu'il y a autour? Est-ce qu'il n'y aurait pas d'autres trésors cachées dans la vallée? Devrait-on reprocher à un touriste qui visite la région de ne pas vouloir faire comme tout le monde et de s'épargner cette ascension?

Pourquoi en art ce ne serait pas la même chose? Si je contourne un problème, est-ce que je ne pourrais pas trouver d'autres façons de faire?
Et si le résultat n'est pas bon à la fin, cela invalide-t-il nécessairement cette démarche? Par définition, expérimenter, c'est s'exposer à l'échec. C'est pas moins confortable que d'orchestrer une musique dans le style de Williams alors qu'on a 36 000 articles, livres, vidéos YouTube analysant en détail comment il écrit - la recette on l'a, il suffit juste de s'y mettre en trouvant le thème...

Oui cela peut sembler sans intérêt d'émuler des cornemuses avec des guitares, mais cette expérimentation, aussi absurde soit-elle, permetra sans doute de découvrir d'autres choses qui serviront peut-être par la suite.
Et puis, tu sembles occulter le fait que Dune se passe dans un monde qui n'existe pas, donc un monde où les cornemuses ne sont pas censées exister. Ça a pour moi du sens de chercher à imiter des cornemuses plutôt qu'à en enregistrer des vraies.

Le style de Thomas Newman est notamment caractérisé par l'utilisation de l'EWI, qui émule plusieurs instruments à vents et qu'on l'entend en permanence chez lui. L'EWI contourne un problème: on ne peut pas forcément maîtriser tous les instruments à vents. Avec l'EWI on peut jouer de tous les instruments avec le même doigté, et donc avec celui qu'on connaît le mieux. Comme l'Orchestron ou le Mellotron (et j'aurais même envie de citer tout simplement l'orgue), on a fini par réaliser que les sons de l'EWI avaient une singularité par rapport aux instruments qu'il émule, ce qui fait qu'il est devenu une fin en lui-même.
Total Trax m'a même permis de démontrer (enfin, j'espère) dans un 3ème épisode consacré à Zimmer, qu'il fut un temps où Zimmer ne se contentait d'avoir une "idée sonore" mais qu'il essayait de faire de la musique. Tu connais sûrement :mrgreen: . Toi qui es compositeur, toi qui t'es astreint à prendre des cours de solfège, d'harmonie et de contrepoint qui permettent de faire sonner correctement un orchestre malgré les limitation inhérentes à chaque groupe d'instrument. Non ? ;)
Malgré mon background classique, je me suis toujours refusé à opposer le son à l'harmonie/mélodie/contrepoint. J'ai tout autant été influencé par les chorals de Bach et le "O Magnum Mysterium" de Lauridsen (qui ont déterminé tout mon langage harmonique) que la musique concrète et électroacoustique, que j'ai découverte très tôt et qui m'a immédiatement fait forte impression. Ma difficulté à accepter qu'on puisse écrire que Zimmer fait du sound-design et non pas de la musique vient du fait que j'ai baigné un moment dans cette musique électroacoustique, que c'est la musique de concert que l'on m'a le plus commandée, et que jamais il n'a été question dans les milieux pourtant "autorisés" de remettre en question ce qualificatif de musique. Luc Ferrari est l'un des plus grands compositeurs français de musique électroacoustique et il a fait ce genre de choses qui est 1000 fois plus proche du sound design que ce que fait Zimmer. Pour le coup j'accepterais tout à fait qu'on puisse douter du qualiticatif de musique dans le cas de cette oeuvre de Ferrari. Mais malgré son dénuement, la musique de Zimmer garde toujours un rythme, une mélodie (même rudimentaire) et une harmonie (ce qui en passant est la définition juridique d'une oeuvre musicale).

Je pense surtout qu'il y a deux sortes d'artistes (avec évidemment plein de nuances entre les deux). Ceux qui cherchent à créer de la meilleure façon possible avec des outils éprouvés, en restant dans un certain cadre, et ceux qui tentent à tout prix d'être hors cadre quitte à réinventer leurs outils et leur palette sonore.

Je ne vois pas pourquoi la deuxième démarche serait invalide sous prétexte qu'elle appauvrit le langage traditionnel. Ces deux approches sont pour moi équivalentes et je pense qu'il n'y a pas lieu de hiérarchiser dans l'absolu. Cette hiérarchie ne peut être que personnelle.

Aviez-vous remarqué que le classicisme, soit la musique "savante" la plus écoutée et la plus appréciée au monde, est une régression sur le plan du langage harmonique et contrapuntique par rapport à la musique baroque et à la musique de Bach?
C'est un fait: dans le classicisme, la modalité est globalement si ce n'est totalement absente, le contrepoint y est plus sommaire, et l'on y trouve moins de diversité au niveau des accords (moins de septièmes d'espèce par exemple). Mais Beethoven a à mon sens apporté à la musique sa science de l'orchestration (donc du son...) en la rendant spectaculaire et Mozart sa science de la forme et de la mélodie.

Loin de moi l'idée de comparer Zimmer à Mozart et Beethoven (ce n'est vraiment mais alors vraiment pas mon intention) mais comme tout créateur, Zimmer a évolué. Il a d'abord été le premier style d'artiste que je décris: probablement frustré de ne pas avoir eu d'éducation musicale et fasciné par l'orchestre, il a d'abord voulu être l'égal de ceux qui maniaient cette formation. Il a donc à tout prix cherché à rentrer dans ce cadre. Ce qui a donné les musiques que vous préférez. Et puis, il a fini par comprendre qu'il n'était pas un classique et il s'est rapproché du second style d'artiste, en essayant d'innover dans le son plutôt que d'essayer de faire ce qu'il n'est pas capable de faire au niveau harmonique. Dans son cas ça s'est accompagné par une régression au niveau mélodique et harmonique. Mais pour moi, cela ne diffère pas vraiment de la trajectoire d'un Picasso qui s'arrête de peindre des Arlequins réalistes pour leur préférer la quasi-abstraction cubiste (ce type de trajectoire est ultra fréquente en art contemporain).
YuHirà
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Re: Hans Zimmer & RCP

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En fait... Dune est une oeuvre complexe, donc il faut faire du complexe dans la musique (alors que Toto lui avait compris l'inverse)... Sherlock Holmes, Wonder Woman ou Madagascar... c'est pas compliqué donc il faut pas réfléxionisoné la musique... Lone Ranger est encore un autre exemple d'une écoute où on peut avoir du plaisir... mais dès qu'on touche à "l'intellect" comme Interstellar par exemple... bah faut faire du complexe...
Ce qui me frappe chez Zimmer, c'est sa capacité à analyser avec acuité un scénario. Il l'a démontré à plusieurs reprises. Quelle que soit la perception que vous pouvez avoir de sa musique, c'est une très grande qualité pour un compositeur de film. Or chez les compositeurs de sa génération ou d'avant, c'était beaucoup moins courant que chez les compositeurs émergents d'aujourd'hui.

Là encore, je pense qu'il y a deux types de compositeurs de musique de film (avec également plein de nuances entre les deux). Ceux qui sont d'abord musiciens (et qui sont appelés pour leurs qualités musicales) et ceux qui sont d'abord cinéastes (ceux qui sont appelés pour leur capacité à comprendre et servir le film). Je pense que la longévité de Zimmer s'explique par le fait qu'il appartient avant tout à la seconde catégorie et que fondamentalement, le fait que sa musique soit complexe ou pas, il s'en fiche comme de l'an 40. Je crois que livré à lui-même, sans images devant lui, il n'aurait probablement jamais été aussi loin musicalement.
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Alcibiade
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Re: Hans Zimmer & RCP

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Une approche très intéressante de l'art Yuhirà. Et si je te comprends bien, c'est l'expérimentation libre c'est-à-dire l'attention à la sophistication des moyens employés sans anticipation d'une fin quelconque qui permettrait d'atteindre un sens de façon inattendue. En soi, c'est la définition même de la recherche d'ailleurs. C'est certain qu'il faut jouer pour trouver, combiner les techniques pour faire jaillir une chose nouvelle, essayer pour réussir mais je me demande quand même si, premièrement, Zimmer partage cette conviction, et si, deuxièmement, la méthode de recherche qu'est la sienne est si gratuite que cela, puisque il s'agit toujours en dernier ressort de synchroniser les sons avec les images. Ou alors il faudrait me dire que Zimmer fait de l'expérimentation pour de l'expérimentation sans égard pour les images et les attentes des réalisateurs et des producteurs ; ce qui est à mon sens faux. Sa démarche n'est pas libre, elle est technique ou comme tu le reconnais "cinématographique" ; la seule fin étant l'image (et encore une fois, il n'y a rien de honteux à cela). Il y a pourtant à côté des musiques fonctionnelles qui ont une réalité sans les images parce qu'elles ne sont pas que cela et que les mélodies ou les motifs, la fluidité d'ensemble, le style convainquent et emportent (et c'est la musique de film au sens noble qui ne peut par principe être libre mais qui demeure de la musique avec une signature), et il y a encore d'autres musiques qui par contre osent courageusement l'expérimentation pour elle-même au risque de déplaire aux attendus de la production. Lorsque par exemple j'écoute l'expérimentation d'un Young comme sur "The vagrant" (partition pourtant retenue par Walas) ou sur "Invaders from mars" (partition partiellement rejetée par Hooper) ou sur des oeuvres entièrement libres comme "Masses", je me dis qu'il y a bien de l'expérimentation sur les moyens sans anticipation d'une fin et que celle-ci aboutit parfois, en suscitant une émotion esthétique pure (le ressenti d'une nouveauté atteinte par l'apparence d'une improvisation totale alors que les moyens sont pourtant parfaitement connus et maîtrisés par le compositeur) au détour d'une recherche sur les sons. Je n'ai jamais ressenti cela chez Zimmer, à savoir une recherche risquée et libre qui sorte d'un cadre prédéfini justement de recettes pour fonctionner seulement à l'image sans autre but (malheureusement) que cela.
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Dadid
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Re: Hans Zimmer & RCP

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YuHirà a écrit : lun. 25 mars 2024 18:50 Ce qui me frappe chez Zimmer, c'est sa capacité à analyser avec acuité un scénario. Il l'a démontré à plusieurs reprises. Quelle que soit la perception que vous pouvez avoir de sa musique, c'est une très grande qualité pour un compositeur de film. Or chez les compositeurs de sa génération ou d'avant, c'était beaucoup moins courant que chez les compositeurs émergents d'aujourd'hui.
J'ignore si c'est la réalité, c'est fort possible, mais au delà de la compréhension du film c'est surtout la nature des moyens employés. Les compositeurs de l'âge d'or (pour aller aux plus anciens) composaient dans un style orchestral qu'on va dire "classique/post-romantique" pour aller vite, avec des échos populaires, mais dans un éventail d'influences restreint. La musique devait rassurer et affirmer le label "grand spectacle", sans désarçonner le spectateur du samedi soir, avec nombre d'exceptions, évidemment ; mais en gros le savoir-faire des "anciens" reposait sur l'étude des compositeurs "classiques". Les décennies passant, d'autres genres de musique, populaires ou au contraire modernistes, ont alimenté le flux de BO et généré différents métissages, puis l'électronique s'y est imposée de plus en plus fortement, ouvrant un nouvel univers de possibles et une fusion plus intime avec l'image et sa bande sonore. Après un glissement progressif, il me semble que le savoir-faire des jeunes compositeurs de BO repose énormément sur l’étude des compositeurs de BO, et avec, l'assimilation d'une palette de styles bien plus large, parfois surprenante pour certains (ce qui n'empêche pas les études classiques, mais elles ne suffisent plus). Le dernier stade du caméléon ! :D Zimmer est un peu différent, car son background est avant tout électronique, c'est plus un enfant de Vangelis, par ce biais il s'est greffé sur la vague "ethnique / musique du monde" et apporté du sang neuf (mais bien souvent aussi un sang bien gras et épais, trop riche pour moi !)

Mon problème aujourd’hui (je ne parle même pas de sa manière "hyper collaborative" parfois de travailler, ce sont d'autres polémiques), est que Dune est une musique archi-conventionnelle selon les critères actuels, ou le bouton de volume masque mal l'absence d'inspiration, malgré le travail sonore qu'il a pu faire en amont, et qui doit bien se retrouver dans le détail, mais peu d’éléments marquants ou innovants, originaux, ressortent à l’écoute.
Alcibiade a écrit : lun. 25 mars 2024 20:03 Je n'ai jamais ressenti cela chez Zimmer, à savoir une recherche risquée et libre qui sorte d'un cadre prédéfini justement de recettes pour fonctionner seulement à l'image sans autre but (malheureusement) que cela.
Voilà.
Maaza
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Re: Hans Zimmer & RCP

Message non lu par Maaza »

Analyses assez justes Yuhira

C'est vrai que Dune, c'est créatif, inventif, mais in fine, Hans Zimmer bénéficiera toujours d'une aura qui lui confère le label "génie musical" à chacune de ses sorties.

Je ne peux m'empêcher de penser que si Jean Charles X ou Benoit Trucmuche, compositeurs lambdas, avaient sorti une bande originale comme Dune, on aurait au mieux dit que ça faisait le job à l'image, au pire que c'était un travail passable.

Quand j'écoute Harry Potter de John Williams, je suis littéralement sur le popotin.
Vingt ans après, je suis encore plus béat d'admiration devant un tel génie musical.

Je ne suis pas certain de vivre ce sentiment avec les bandes originales de Hans Zimmer d'ici 20 ans.
Après c'est peut être simplement un décalage générationnel de ma part.
Scorebob
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Re: Hans Zimmer & RCP

Message non lu par Scorebob »

Mais non , le score n'est pas vraiment écoutable en dehors du film , même pour un score atmosphérique il ya trop peu de variations et de progression pour que ce soit d'une plaisante écoute a moins que l'on soit un fan absolu des films .
YuHirà
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Re: Hans Zimmer & RCP

Message non lu par YuHirà »

C'est certain qu'il faut jouer pour trouver, combiner les techniques pour faire jaillir une chose nouvelle, essayer pour réussir mais je me demande quand même si, premièrement, Zimmer partage cette conviction, et si, deuxièmement, la méthode de recherche qu'est la sienne est si gratuite que cela, puisque il s'agit toujours en dernier ressort de synchroniser les sons avec les images.
Je ne suis pas sûr que cela soit incompatible et que l'expérimentation doit nécessairement être gratuite. Je pense aussi que c'est l'image elle-même qui peut autoriser à penser hors cadre.

On est certes contraint par le cadre du film, par la narration, par le budget, par le réalisateur, par le producteur... mais il y a une liberté esthétique du fait que l'image justifie tout et qu'on peut changer de genre et se livrer à toutes sortes d'expérimentations à chaque film sans que ça ne pose problème. Morricone, qui a également influencé Zimmer, était beaucoup dans l'expérimentation débridée aussi!

Je suis d'ailleurs persuadé que nombre de compositeurs classiques qui se sont tournés vers le cinéma dans la seconde moitié du XXe siècle ne l'ont pas tant fait pour des raisons pécuniaires que pour échapper à l'académisme d'avant garde alors dominant dans les conservatoires. Ce n'était pas juste une domination à laquelle on pouvait échapper en décidant de faire autrement: à force d'être façonné par les professeurs de l'époque, il y avait ce sentiment très diffus de ne pas faire de la musique intéressante si on ne donnait pas des gages à l'avant garde. C'était très sournois et très paralysant car celui qui décidait d'étouffer sa voix intérieure et de s'auto-censurer, ce n'était pas les autres mais le compositeur lui-même!

Alors qu'au cinéma tout était permis.

Après effectivement je ne suis pas la tête de Zimmer mais je pense qu'il y a vraiment chez lui depuis quelques années cette volonté de sortir délibèrement des sentiers battus. Ne serait-ce que pour mettre à distance ceux qui passent leur temps à l'imiter.
Après un glissement progressif, il me semble que le savoir-faire des jeunes compositeurs de BO repose énormément sur l’étude des compositeurs de BO,
Ce qui est profondément dommage car la musique de film finit par s'auto-référencer en permanence. Je suis toujours interloqué lorsque des compositeurs se procurent des partitions de BOs pour étudier l'orchestration en première intention. Au mieux, cela donne des idées, mais cela ne permet certainement pas d'en tirer des leçons sur ce qui marche ou pas puisqu'on bidouille le résultat en permanence. On double les cordes avec du faux, on n'enregistre parfois même plus les harmoniques, les stacs et les pizzicatos, encore moins les percussions. Ce qu'il y a sur le CD ou le film, c'est une version fantasmée, pas ce que l'on obtiendrait si on exécuterait la même partition en concert... Etudier une BO n'a aucun sens si on ne sait pas ce qu'il s'est passé entre l'écriture et le mixage final.

Un bon compositeur de BO est pour moi un compositeur qui cherche également ses influences en dehors de ce qui a déjà été fait pour ce medium.
C'est vrai que Dune, c'est créatif, inventif, mais in fine, Hans Zimmer bénéficiera toujours d'une aura qui lui confère le label "génie musical" à chacune de ses sorties.
Sans aucun doute, mais je pense que c'est valable pour tout personne reconnue, John Williams compris. Après tout, le génie de Bach en tant que compositeur n'a été découvert qu'un siècle plus tard. Peu de gens avaient reconnu dans l'organiste ses qualités de compositeur alors qu'elles étaient manifestes. Il a fallu que Mendelssohn l'adoube pour qu'on lui reconnaisse du génie. Des fois, je me demande si Mozart aurait été considéré comme un tel génie par la postérité s'il n'avait pas été exhibé par son père dans toute l'Europe comme musicien prodige alors qu'il n'était qu'un enfant.
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Ratatouille
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Re: Hans Zimmer & RCP

Message non lu par Ratatouille »

Zimmer fait du bon quand il a des bons collaborateurs (pas de jeux de mots attention...) !





Mais je me suis toujours posé la question... qui l'a aidé sur ce film... (Delerue devait en composer la musique si je me souviens bien...)
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