Petite déception hier soir au TCE : Michel Legrand était absent, et le sera aussi ce soir, pour raisons de santé. Dommage ! Le fascicule imprimé remis aux spectateurs était d'ailleurs à jour, ce qui laisse penser que ce n'est pas un problème de dernière minute, au point qu'en le découvrant je me suis demandé si j'avais mal compris en achetant mon billet... Mais non : Macha Méril est venue porter sur scène les regrets du compositeur. En même temps, à son âge, assurer à la fois le concerto pour piano et la direction d'orchestre, ce n'est pas évident...
L'orchestre Pasdeloup était donc dirigé par
Mathieu Herzog, et la partie de piano par un jeune interprète (née en 1992, ça ne me rajeunit pas),
Ismaël Margain. Lequel a assuré sans broncher, ce qui ne m'a pas pour autant fait redécouvrir ce concerto dont je ne sais pas trop quoi penser : pas désagréable, véloce, mais finalement un peu sage dans son écriture et pas vraiment passionnant. Il faudra que je réécoute, ceci dit, la voix de Legrand s'y fait clairement entendre.
Mais ceci n'était que l’apéritif, car tout le monde était là pour
Between yesterday and tomorrow. Natalie Dessay était bien présente, assistée le temps de deux chansons par
Jasmine Roy (chanteuse dans différentes comédies musicales également connue comme coach vocal) dans le rôle de sa mère, et sa fille
Neima Naouri (concoctée avec le baryton-basse Laurent Naouri) dans celui de... sa fille. Dans le disque Natalie Dessay assurait tous les rôles en re-recording, mais ici les duos apportaient un surcroit d'émotion, surtout le second. J'attendais de beaux moments et n'ai pas été déçu. Déjà le spectacle était joliment mis en scène, avec quelques costumes et éléments très simples (une valise, une paire de chaussure, des fleurs...) ce qui est important pour mettre en valeur son aspect théâtral, car il s'agit bien de ça : en plus d'assurer côté chant, il faut incarner le personnage. Et Natalie Dessay, seule devant l’orchestre 90% du temps, a fait feu de tous bois, à l'aise dans tous les registres, passant avec maestria d'un âge à l'autre, d'un sentiment à l'autre, avec plus d'exacerbation encore qu'au disque. La voix, haute et tendue voire un peu ingrate au début (l'enfance, l'adolescence), s'est libérée pour se faire progressivement plus chaude avec la maturité, et c'est là que la chanteuse nous a transmis le plus de frissons. Il faut dire que ce cycle est vraiment beau, très mélodique. "Wait", peut-être la chanson la plus difficile à tenir (surtout en concert) et qu'il ne faut pas louper car elle constitue le sommet de l'arc narratif et mélodique, a provoqué des applaudissements et c’était mérité. Mais tout était non seulement maitrisé mais incarné. A la fin, la descente dans le néant, l'orchestre s'est fait presque inaudible, et un silence abyssal s'est emparé du théâtre, suspendu aux derniers mots, et enfin au dernier souffle, de la chanteuse/actrice. Ouf...
L'orchestre Pasdeloup a bien assuré lui aussi, assisté d'une contrebasse rythmique et d'un guitariste, le son n'était pas toujours très "fin" mais emportait l'adhésion, et les cuivres swinguaient superbement quand c'était nécessaire.
Une très belle soirée, où Michel Legrand était finalement bien présent, par la musique.
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En bonus, rien à voir mais connaissiez-vous cette
"rencontre des deux papys" ? (alors encore jeunes !)