Re: Films... j"aime ou j'aime pas
Publié : lun. 23 avr. 2018 09:48
Revu SPHERE de Barry Levinson hier soir. Alors je sais que le film a été un désastre à sa sortie en 1998. Je sais que le film a été descendu unanimement par les critiques - étonnamment, le bouquin de Michael Crichton a reçu de bonnes critiques, lui ! - et je sais que beaucoup ont considéré que c'était un vaste nanar qui avait aussi coulé la carrière de Sharon Stone qui ne tournera plus rien de majeur après SPHERE.
MAIS, car il y a un mais, je tiens vivement à redorer le blason de ce film car j'adore SPHERE et je le considère comme un très bon film de science-fiction de la fin des années 90. C'est un film réellement étonnant, découpé en chapitres comme dans un livre (fait plutôt inhabituel pour un film hollywoodien). Je trouve que les personnages sont intéressants car ils ont une vraie personnalité, et c'est réellement Samuel L. Jackson qui prend le dessus ici : j'adore les expressions du visage de l'acteur, mi-ange, mi-démon, on ne sait pas s'il est machiavélique, s'il est associable ou si au contraire il aide les autres et se montre coopératif. J'aime beaucoup Dustin Hoffman qui est un peu l'anti-héros hollywoodien : terrorisé pendant la scène de l'incendie, il laisse l'un de ses amis qu'il connaît depuis ses 17 ans mourir, là où n'importe quelle production hollywoodienne aurait balancé une scène héroïque pour éviter de fâcher le public U.S.
Le film a rajouté l'histoire personnelle de Beth (Stone) et ses griefs contre Norman (Hoffman) alors que le livre était plus simple sur ce sujet. Cela donne quelques passages intéressants où Stone paraît beaucoup plus vulnérable et torturée que dans ses anciens films, brisant son image de sex-symbol/femme fatale qui lui collait trop souvent à la peau dans les années 90. On est clairement loin ici de la Sharon Stone de BASIC INSTINCT ou TOTAL RECALL et c'est tant mieux car l'actrice est parfaite dans ce rôle de femme suicidaire et fragile mais finalement très humaine. D'une façon générale, j'aime beaucoup l'aspect scientifiques des personnages : à l'inverse d'un film comme PROMETHEUS de Ridley Scott où les scientifiques résonnaient comme de parfaits abrutis, dans SPHERE, les savants ont des réactions logiques et parviennent à des déductions pour une fois censées (cf. Harry qui déduit qu'ils vont tous mourir). J'aime beaucoup la façon dont ils tentent d'interpréter les messages de "Jerry" sur l'écran d'ordinateur : l'idée d'un clavier d'ordi matérialisé et modélisé sur une sphère pour décrypter le code, c'était géant !
Evidemment, le film repose essentiellement sur son concept développé autour de la sphère extra-terrestre : le concept du pouvoir qui permet de matérialiser les pensées et les rêves dans la réalité est absolument fabuleux, et même si l'idée rappelle un peu trop le SOLARIS de Tarkovsky, le concept est finement exécuté à l'écran. Levinson joue en permanence sur la suggestion et même si certaines scènes sont un brin lourdingues (zoom et gros plans "machiavélique" sur les paupières de Samuel L. Jackson pendant qu'il rêve) je trouve le résultat extra, car le réalisateur a eu la bonne idée de ne pas céder aux effets spéciaux à outrance ou aux plans numériques qu'on commençait à voir régulièrement dans ce type de film à la fin des années 90. Certains ont critiqué le fait que la séquence de l'attaque du calmar géant était cheap et ridicule, mais je trouve au contraire l'idée d'avoir suggéré le calmar sur les plans du sonar absolument géniale. Je trouve la scène beaucoup plus terrifiante du fait que la créature est suggérée, et les plans avec les milliers d'oeufs qui tombent au fond de l'océan sont intriguant et aussi très anxiogènes : on se dit alors "quel type d'animal est capable de pondre des oeufs pareils ?" On ne reverrait plus aujourd'hui ce genre de scène dans un blockbuster hollywoodien moderne ! J'adore aussi la folie durant la scène de la pression qui menace de détruire la station et l'incendie qui suit : Levinson arrive à créer un sentiment de panique et de chaos absolu incroyablement intense.
Il y a même cette bizarrerie qui en dit long sur l'histoire, lorsque les flammes disparaissent brusquement lorsque Sharon Stone arrive dans la station. La musique d'Elliot Goldenthal joue aussi beaucoup dans ce sentiment de chaos : d'ailleurs, le morceau qui accompagne la scène où Barnes hurle à Norman l'ordre de rétablir la pression sur la vanne rouge est l'un des passages les plus mémorables de la partition et d'une frénésie musicale absolue, largement surmixée sur les images (au point qu'on entend presque plus ce que dit Barnes à ce moment là !). J'adore SPHERE car il y a des choses et des parti pris réellement singuliers dans la mise en scène qui nous font dire que le film pourrait ressembler à n'importe quel type de superproduction U.S. de l'époque mais qu'il s'en éloigne finalement sur plus d'un point. J'aime un peu moins la séquence où les trois héros s'échappent à bord du mini-sub et la scène où ils décident d'oublier ce qu'ils ont vécu à la fin du film, réalisant que le pouvoir de la sphère est trop dangereux pour l'humanité. Dommage que les scénaristes n'aient pas gardé l'idée intéressante du livre où l'on réalisait à la toute fin que Norman n'avait peut être pas tout oublié, histoire de laisser la fin en suspend...
D'une façon générale, SPHERE fonctionne complètement en traitant l'aspect psychologique de ce concept passionnant de matérialisation des pensées et des rêves, rappelant la noirceur de l'âme humaine, mais aussi une rencontre entre l'humanité et les extra-terrestres sous la forme d'une sphère géante liquide. Heureusement, le film a omis un détail décevant du livre : la scène où Norman rentrait dans la sphère et parlait avec une autre personne qui lui révélait la vérité sur le pouvoir de la sphère. Levinson a été un peu plus malin que Crichton en jouant encore une fois la carte de la suggestion tout en conservant une large part de mystère sur le pouvoir, la sphère et ses origines (l'idée du trou noir et du "unknown event" reste inexpliquée, et c'est tant mieux !). Pour finir, j'évoquerai aussi un autre passage mémorable de la partition de Goldenthal : lorsque Beth se retrouve emportée par des trombes d'eau dans la station, avec le son qui disparaît progressivement, remplacée par des notes vaporeuses et fragiles d'un piano solitaire, une idée non-hollywoodienne magnifique, tout comme la scène où Beth et Norman sont attaqués par les oeufs du calmar, accompagnée par une étrange musique chorégraphique écrite sur un mode majeur presque poétique, très étonnant sur la forme.
Bref, vous l'aurez compris, j'adore SPHERE et je tiens à valoriser ce film qui fait partie selon moi de ces productions incomprises sur lesquelles les gens s'acharnent injustement alors qu'il s'agit pour moi de l'un des meilleurs films de sci-fi de la fin des années 90, à redécouvrir sans plus tarder !
MAIS, car il y a un mais, je tiens vivement à redorer le blason de ce film car j'adore SPHERE et je le considère comme un très bon film de science-fiction de la fin des années 90. C'est un film réellement étonnant, découpé en chapitres comme dans un livre (fait plutôt inhabituel pour un film hollywoodien). Je trouve que les personnages sont intéressants car ils ont une vraie personnalité, et c'est réellement Samuel L. Jackson qui prend le dessus ici : j'adore les expressions du visage de l'acteur, mi-ange, mi-démon, on ne sait pas s'il est machiavélique, s'il est associable ou si au contraire il aide les autres et se montre coopératif. J'aime beaucoup Dustin Hoffman qui est un peu l'anti-héros hollywoodien : terrorisé pendant la scène de l'incendie, il laisse l'un de ses amis qu'il connaît depuis ses 17 ans mourir, là où n'importe quelle production hollywoodienne aurait balancé une scène héroïque pour éviter de fâcher le public U.S.
Le film a rajouté l'histoire personnelle de Beth (Stone) et ses griefs contre Norman (Hoffman) alors que le livre était plus simple sur ce sujet. Cela donne quelques passages intéressants où Stone paraît beaucoup plus vulnérable et torturée que dans ses anciens films, brisant son image de sex-symbol/femme fatale qui lui collait trop souvent à la peau dans les années 90. On est clairement loin ici de la Sharon Stone de BASIC INSTINCT ou TOTAL RECALL et c'est tant mieux car l'actrice est parfaite dans ce rôle de femme suicidaire et fragile mais finalement très humaine. D'une façon générale, j'aime beaucoup l'aspect scientifiques des personnages : à l'inverse d'un film comme PROMETHEUS de Ridley Scott où les scientifiques résonnaient comme de parfaits abrutis, dans SPHERE, les savants ont des réactions logiques et parviennent à des déductions pour une fois censées (cf. Harry qui déduit qu'ils vont tous mourir). J'aime beaucoup la façon dont ils tentent d'interpréter les messages de "Jerry" sur l'écran d'ordinateur : l'idée d'un clavier d'ordi matérialisé et modélisé sur une sphère pour décrypter le code, c'était géant !
Evidemment, le film repose essentiellement sur son concept développé autour de la sphère extra-terrestre : le concept du pouvoir qui permet de matérialiser les pensées et les rêves dans la réalité est absolument fabuleux, et même si l'idée rappelle un peu trop le SOLARIS de Tarkovsky, le concept est finement exécuté à l'écran. Levinson joue en permanence sur la suggestion et même si certaines scènes sont un brin lourdingues (zoom et gros plans "machiavélique" sur les paupières de Samuel L. Jackson pendant qu'il rêve) je trouve le résultat extra, car le réalisateur a eu la bonne idée de ne pas céder aux effets spéciaux à outrance ou aux plans numériques qu'on commençait à voir régulièrement dans ce type de film à la fin des années 90. Certains ont critiqué le fait que la séquence de l'attaque du calmar géant était cheap et ridicule, mais je trouve au contraire l'idée d'avoir suggéré le calmar sur les plans du sonar absolument géniale. Je trouve la scène beaucoup plus terrifiante du fait que la créature est suggérée, et les plans avec les milliers d'oeufs qui tombent au fond de l'océan sont intriguant et aussi très anxiogènes : on se dit alors "quel type d'animal est capable de pondre des oeufs pareils ?" On ne reverrait plus aujourd'hui ce genre de scène dans un blockbuster hollywoodien moderne ! J'adore aussi la folie durant la scène de la pression qui menace de détruire la station et l'incendie qui suit : Levinson arrive à créer un sentiment de panique et de chaos absolu incroyablement intense.
Il y a même cette bizarrerie qui en dit long sur l'histoire, lorsque les flammes disparaissent brusquement lorsque Sharon Stone arrive dans la station. La musique d'Elliot Goldenthal joue aussi beaucoup dans ce sentiment de chaos : d'ailleurs, le morceau qui accompagne la scène où Barnes hurle à Norman l'ordre de rétablir la pression sur la vanne rouge est l'un des passages les plus mémorables de la partition et d'une frénésie musicale absolue, largement surmixée sur les images (au point qu'on entend presque plus ce que dit Barnes à ce moment là !). J'adore SPHERE car il y a des choses et des parti pris réellement singuliers dans la mise en scène qui nous font dire que le film pourrait ressembler à n'importe quel type de superproduction U.S. de l'époque mais qu'il s'en éloigne finalement sur plus d'un point. J'aime un peu moins la séquence où les trois héros s'échappent à bord du mini-sub et la scène où ils décident d'oublier ce qu'ils ont vécu à la fin du film, réalisant que le pouvoir de la sphère est trop dangereux pour l'humanité. Dommage que les scénaristes n'aient pas gardé l'idée intéressante du livre où l'on réalisait à la toute fin que Norman n'avait peut être pas tout oublié, histoire de laisser la fin en suspend...
D'une façon générale, SPHERE fonctionne complètement en traitant l'aspect psychologique de ce concept passionnant de matérialisation des pensées et des rêves, rappelant la noirceur de l'âme humaine, mais aussi une rencontre entre l'humanité et les extra-terrestres sous la forme d'une sphère géante liquide. Heureusement, le film a omis un détail décevant du livre : la scène où Norman rentrait dans la sphère et parlait avec une autre personne qui lui révélait la vérité sur le pouvoir de la sphère. Levinson a été un peu plus malin que Crichton en jouant encore une fois la carte de la suggestion tout en conservant une large part de mystère sur le pouvoir, la sphère et ses origines (l'idée du trou noir et du "unknown event" reste inexpliquée, et c'est tant mieux !). Pour finir, j'évoquerai aussi un autre passage mémorable de la partition de Goldenthal : lorsque Beth se retrouve emportée par des trombes d'eau dans la station, avec le son qui disparaît progressivement, remplacée par des notes vaporeuses et fragiles d'un piano solitaire, une idée non-hollywoodienne magnifique, tout comme la scène où Beth et Norman sont attaqués par les oeufs du calmar, accompagnée par une étrange musique chorégraphique écrite sur un mode majeur presque poétique, très étonnant sur la forme.
Bref, vous l'aurez compris, j'adore SPHERE et je tiens à valoriser ce film qui fait partie selon moi de ces productions incomprises sur lesquelles les gens s'acharnent injustement alors qu'il s'agit pour moi de l'un des meilleurs films de sci-fi de la fin des années 90, à redécouvrir sans plus tarder !