de Lee Van Cleef le Mar 4 Aoû 2020 18:23
Jean-Loup Dabadie avait déjà vu son trépas coïncider avec les hasards de la programmation d'Arte. Rebelote dans le cas d'Olivia de Havilland, dont l'un des meilleurs films avait trouvé place dans une future case cinéma de la noble chaîne quelques jours seulement avant sa mort. Hier soir, donc, fut diffusé le formidable The Heiress, sans conteste l'un des mélodrames hollywoodiens les plus durs qu'il m'ait été donné de voir. William Wyler, chantre de l'académisme pépère aux yeux de beaucoup, vrai cinéaste talentueux en ce qui concerne le vieux Van Cleef, filme somptueusement ce récit noirissime où l'amour est jeté bas sans aucun ménagement. Que ce soit auprès de son père, chef-d'oeuvre d'austérité ayant toujours été incapable de l'accepter pour ce qu'elle est, ou de son soupirant, un Monty Clift charmeur derrière le sourire duquel se terre l'arrivisme, l'infortunée Olivia passe par toutes les étapes du désenchantement sentimental, jusqu'à devenir, à son tour, un être glacial dont une lourde cuirasse est chargée de protéger le coeur trop meurtri.
L'éternelle Belle Marianne en impose, et pas qu'à moitié, dans un rôle pour lequel son âge ne la prédestinait a priori pas. Son sourire éblouissant et ses grands yeux si expressifs n'ont aucune peine à la faire passer d'abord pour une candide jouvencelle consumée par l'irruption soudaine de la passion, et les premières marques imprimées sur son visage par les 33 ans qui étaient les siens à cette époque lui font ensuite, à l'écran, les très convaincants stigmates d'une indicible amertume.