Hannibal Rising (Ilan Eshkeri & Shigeru Umebayashi)

Duo de compositeurs sur canapé

Disques • Publié le 25/08/2011 par

Hannibal RisingHANNIBAL RISING (2006)
HANNIBAL LECTER: LES ORIGINES DU MAL
Compositeurs :
 Ilan Eshkeri & Shigeru Umebayashi
Inédit en disque

 

 

2 out of 5 stars

Pour ce nouvel opus de la saga Hannibal Lecter, tout aussi inutile que le précédent, les producteurs ont fait appel à un compositeur quasi-inconnu jusqu’alors mais qui a fait parler de lui depuis avec l’excellent Stardust : Ilan Eshkeri. Ce choix peut surprendre dans la mesure où le précédent collaborateur de Peter Webber était Alexandre Desplat, qu’on aurait vraiment bien aimé entendre sur un film horrifique. En outre, il a longtemps été annoncé que ce serait Thomas Newman qui se chargerait de Hannibal Rising. Enfin, dernier élément surprenant : Eshkeri n’a pas été embauché seul mais s’est trouvé accompagné de Shigeru Umebayashi, illustre compositeur japonais associé aux films de Wong Kar Wai. En résulte alors un travail à quatre mains où l’on ne sait pas qui a fait quoi mais où il semble que chacun ait restreint l’autre au lieu de l’encourager. Piteux constat déjà effectué à propos d’autres travaux de ce type tels Constantine, dû à Brian Tyler mais aussi à Klaus Badelt, et Secret Window (Fenêtre Secrète), dû à Philip Glass mais aussi à Geoff Zanelli. De façon significative, la musique de Hannibal Rising est sans doute demeurée inédite suite à l’insuccès du film.

 

Forcément influencé par les partitions composées pour les précédents opus de la saga, le score d’Eshkeri et d’Umebayashi renvoie le plus souvent à Hannibal de Zimmer (sans doute en raison de son aspect très classique), les travaux de Shore et d’Elfman s’avérant trop personnels, trop fous et passionnés pour être imités, et les compositions synthétiques très 80’s accompagnant Manhunter étant trop datées. Qui dit Hannibal dit musique composée à 90% d’instruments à cordes, et c’est donc un déluge de violons et de violoncelles qui s’abat sur le spectateur. Très monochrome, la partition de Hannibal Rising est cependant loin d’atteindre celle de The Silence Of The Lambs puisqu’elle offre peu de place au lyrisme et choisit de s’axer presque uniquement sur la tension et sur l’angoisse, avec pour résultat d’aligner les clichés et de ne se montrer ni captivante, ni effrayante, ni émouvante, juste ennuyeuse car manquant cruellement de cœur et d’âme. Les thèmes sont difficilement identifiables et l’on n’en reconnaît qu’un seul, plein de la mélancolie et de la douleur du héros, interprété tantôt par des cordes véhémentes tantôt par un piano solitaire.

 

Hannibal : la voie du samouraï ?

 

Tout au long du film la musique gémit, grince et crisse de façon à nous faire comprendre qu’attention, Hannibal va devenir quelqu’un de très méchant ! Hélas, la partition d’Eshkeri et d’Umebayashi souffre de la médiocrité des images, du manque d’inspiration et de rythme insufflé par le réalisateur, ce qui la condamne à souligner pauvrement les grimaces pseudo-menaçantes de Gaspard Ulliel. On peut certes remarquer quelques emballements fugitifs dans la dernière partie, mais l’ensemble paraît tellement impersonnel et fade que l’on ne peut qu’être déçu, même si l’on n’attendait pas grand-chose au départ. En outre, l’inutilité d’une double signature se confirme à chaque instant puisque le style employé est totalement dépourvu d’influence orientale et asiatique (on se dit alors que Shigeru Umebayashi a été appelé en raison de l’importance du personnage de Gong Li dans l’histoire, mais cela ne transparaît jamais dans la musique).

 

Seuls les quelques passages faisant intervenir une voix de soprano fragile et douloureuse évoquant la jeune sœur d’Hannibal présentent un certain intérêt, rappelant les expériences autrement plus poignantes d’Elliot Goldenthal sur Alien 3 et de James Newton Howard sur Devil’s Advocate (L’Associé du Diable). Afin de ne pas nous montrer totalement injustes, citons également le générique de fin, qui permet évidemment à la musique d’être mieux mise en valeur et qui aurait probablement mérité d’être édité sous forme de suite, sur un album dont la conception est restée dans les limbes. Coup d’essai mais pas coup de maître, le score de Hannibal Rising s’avère donc aussi peu convaincant que le film et achève tristement la saga.

 

Au revoir mes agneaux...

Gregory Bouak
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