Fermeture définitive des studios Davout

Le fameux studio d'enregistrement fermera ses portes pour toujours le 9 avril prochain

News • Publié le 29/03/2017 par

Studios Davout

 

C’est ici qu’un beau jour de mars 1966, les Demoiselles de Rochefort sont très officiellement devenues deux sœurs jumelles nées sous le signe des Gémeaux, et là aussi que résonnèrent pour la première fois, la même année, les fameux Cha ba da ba da de Francis Lai et Pierre Barouh pour le film de Claude Lelouch, Un Homme et une Femme. Bien entendu la grande majorité des journalistes musicaux préfèreront sans doute garder avant tout en mémoire les venues entre ses murs d’artistes des scènes française et internationale tels que Serge Gainsbourg, Alain Bashung, les Rolling Stones, AC/DC, Prince, U2, Nina Simone, Miles Davis ou Chet Baker, pour n’en citer que quelques-uns. Mais Davout est un nom que les passionnés de musique de film connaissent également très bien.

 

L’histoire du lieu débute en 1890 par l’établissement d’une chiffonnerie, laquelle sera dans le courant des années 30 d’abord reconvertie en cinéma de quartier (le Davout, tout simplement) avant que le musicien Yves Chamberland, très vite rejoint par l’ingénieur du son Claude Ermelin, n’y fonde un studio d’enregistrement en 1965. A l’époque, en dehors des structures des grandes maisons de disques telles que Pathé Marconi, Philips ou Barclay, il n’existe déjà qu’un seul studio indépendant, Europa Sonor, nouvellement créé lui aussi quelques temps auparavant seulement (il fermera ses portes dès 1975). A Davout, le cinéma s’invite donc très vite. François de Roubaix y enregistrera Les Chevaliers du Ciel en 1967, Michel Legrand The Thomas Crown Affair (L’Affaire Thomas Crown) en 1968, Eric Demarsan Le Cercle Rouge en 1970, Claude Bolling Lucky Luke en 1971, John Barry le onzième James Bond officiel, Moonraker, en 1979, Jean-Claude Petit Jean de Florette en 1986.. En 2016, Alexandre Desplat y est encore venu mettre la touche finale à sa partition pour L’Odyssée : en tout, et malgré une relative traversée du désert dans le courant des années 80, près d’un millier de bandes originales auront pris vie dans l’enceinte d’un studio affectueusement surnommé le « Abbey Road français » et où un Vladimir Cosma et un Georges Delerue, notamment, avaient leurs habitudes. Ces dernières années, c’est Philippe Rombi qui y avaient les siennes, et c’est d’ailleurs à lui que reviendra le malheureux honneur de clore définitivement l’histoire du studio, le 9 avril prochain : initialement prévue le 30 mars, la fermeture a en effet été repoussée de quelques jours afin de permettre au compositeur de boucler l’enregistrement destiné au nouveau film de son complice François Ozon, L’Amant Double, avec l’Orchestre Bel’Arte.

 

La menace d’une fermeture imminente de Davout ne date pas d’hier. Il y a dix ans environ déjà que son sort semblait incertain, la Mairie de Paris ayant entre temps instauré son droit de préemption sur l’endroit avant, donc, de lancer une procédure d’expropriation en faveur d’un projet déclaré d’utilité publique prévoyant la réalisation d’une école élémentaire et d’une crèche. Le gérant du studio, Marc Prada, semble néanmoins décidé à ce que l’aventure ne s’arrête pas là et songe déjà à un relogement. On peut d’ailleurs lire sur l’un des documents de la Direction de l’urbanisme que la Mairie de Paris était censée étudier la question en parallèle de sa décision de récupérer le 73 boulevard Davout : espérons de tout cœur qu’il ne s’agissait pas là de vaines paroles d’ores et déjà emportées par le vent…

 

Philippe Rombi aux Studios Davout

Florent Groult